Borko - Celebrating Life
Qui est réellement Borko ? Énigmatique émissaire venu du froid avec, dans son sillage, 8 missives tantôt glacées et enflammées qui se marient parfois pour une explosion étrangement colorée qui forme, sans nul doute, la plus divine surprise de 2008.
1. Continental Love
2. Spoonstabber
3. Shoo Ba Ba
4. Sushi Stakeout
5. Dingdong Kingdom
6. Summer Logic
7. Doo Doo Doo
8. Hondo & Borko
On savait déjà l’Islande antinomique. Mais se doutait-on de la force et de la ressource de son paysage musical polymorphe, qui frappe là où ne l’attend pas ? Car, il faut bien l’avouer, les multiples facettes de la musique islandaise sont toutes passionnantes comme un reflet des différents aspects de cette île où la glace et le feu croisent le sabre pour un festival généreux, tellement de fois fantasmé qu’il en est devenu presque utopique.
C’est dans ce pays où la nuit est d’encre qu’est originaire celui qui officie sous l’identité de Borko, Björn Kristjánsson. Pas très glamour, un peu looser sur les bords, coincé sur son ordinateur par un temps dégueulasse, l’islandais a pourtant réussi, à travers un premier album brillant, à créer une musique vivante, mobile, cosmopolite et moderne. Tour à tour chaleureux et hostile, Celebrating Life est l’avatar musical parfait de l’Islande, de par ses contrastes et ses mélanges habiles dont la seule constante est le talent qui, s’il devait prendre une apparence humaine aurait très certainement des traits semblables à ceux de cet islandais moyen, il y a quelques mois encore professeur de musique dans une école primaire.
Tout s’ouvre pourtant sur un sample de voix qui déraille et tourne en boucle. Panique lorsque l’on pense que l’on est tombé sur une énième daube électro vendu sous couvert d’une hype aussi grande qu’injustifiée, à l’instar des horribles The Field, couvés par Pitchfork, qui nous avaient refourgué une des plus grandes aberrations musicales de l’an dernier avec l’inaudible From Here We Go Sublime. Bon. A ceci près que l’on se rend compte que Björn Kristjánsson est tout sauf hype – rappelez-vous, pas très glamour, un brin ringard avec une tendance geek prononcée - et chasse plutôt sur les terres autrement plus authentiques et aventureuses de múm, qui a d’ailleurs longtemps couvé Borko sous son aile.
Et donc là, bang. On ne sait comment, la mayonnaise prend. Un clavier, un xylophone, une rythmique quasiment inexistante. Mais ça n’a pas d’importance. Le miracle se produit. Le sample, intégré à la mélodie disparait petit à petit pour laisser ce morceau se terminer dans une fanfare fulgurante qui rappelle le Festival de Sigur Rós en plus honnête, introspectif et touchant.
Tissant sa toile en mélangeant des sonorités électroniques fascinantes et parfois abstraites avec des lignes mélodiques géniales pour dresser un cocon de velours, le plus souvent instrumental, dans lequel on se niche paisiblement, Celebrating Life est un refuge intimiste et paisible. Dehors, la nuit est noire et les éclairs zèbrent le ciel. Tout départ est impossible. Écouter ce disque. Encore.
Grandioses, ces 8 titres aux noms débiles (Shoo Ba Ba ou encore Doo Doo Doo) lorgnent du côté d’une musique cinématique, ornée de cuivres, noire et blanche à gauche, toute en couleurs à droite. Malgré cette création toute en mouvement, Kristjánsson est pourtant doté d’une plume photographique, capturant comme un témoin précieux émotions et images brutes. C’est cette beauté picturale qui rend rare et nécessaire ce Celebrating Life qui explicitait déjà tout dans son titre. Une ode à la vie, optimiste mais lucide, consciente des plaisirs qu’elle procure sans sous-estimer les entraves qu’elle dresse sur notre route. On pense même parfois à Hood, moins pour les crépitements lo-fi que pour le côté contemplatif d’une absurde banalité, colorée ici avant que l’on sente la tristesse nous envahir.
Au travers des sonorités japonaises savamment exploitées, Sushi Stakeout fait voler en éclat l’ensemble de nos certitudes. Les mots manquent parfois face à un album aussi aérien, dans le sens où il ne ressemble à rien de terrestre, singulier et humain. Et quand Björn Kristjánsson lâche les chiens sur un Dingdong Kingdom ravageur, c’est notre bulle fragile qui est secouée par un morceau qui connait effectivement les mêmes balancements que l’inébranlable mouvement pendulaire d’une horloge. Balancé au dehors dans la nuit, on se retrouve à nu. Alors, on ne peut plus lutter.
Complainte analogique passionnante, cosmopolite et intemporelle, Celebrating Life et ses tourments existentiels n’est rien de moins qu’un grand disque. Un tableau de l’ère numérique que l’on parcoure émerveillé et dont on ressort régénéré. En 2008, Indie Rock Mag avait tout prévu, sauf l’intrusion de ce trouble-fête polaire qui pourrait bien chambouler telle une avalanche nos bilans de fin d’année après nous avoir réconfortés tout l’hiver. Celebrating Borko !
Retard oblige, l’équipe d’IRM vous a condensé ici deux classements finalement complémentaires. D’un côté, un bilan 2012 dans lequel une partie de la rédaction, il faut bien l’avouer, a eu du mal à se reconnaître, au point de peiner plusieurs semaines à mettre un point final à cet article. De l’autre, un top de janvier résumant au contraire cette curiosité (...)
Du post-rock au jazz en passant par le psychédélisme où l’électronique, Celebrating Life nous avait impressionnés en 2008 par sa largeur de vue, soufflant le chaud, le froid et à peu près toutes les couleurs du ciel d’Islande en l’espace d’une poignée de morceaux aussi intelligents que spontanés. Huit titres au chant très en retrait ou parfois même (...)
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