Bad Breeding - Contempt

Le punk-hardcore qui a des choses intéressantes à dire, mode d’emploi.

1. Temple Of Victory
2. Survival
3. Devotion
4. Liberty
5. Discipline
6. Retribution
7. Gilded Cage/Sanctuary
8. Vacant Paradise
9. Idolatry
10. Contempt

date de sortie : 14-06-2024 Label : One Little Independant Records/Iron Lung Records

Pour celui-là, Bad Breeding délaisse le noir, le blanc et le gris exclusifs et s’ouvre un peu à la couleur. Sur la pochette en tout cas (la centrale nucléaire-crâne-îles britanniques est l’œuvre du toujours farouchement anti-guerre Peter Kennard) parce que pour le reste, on se situe toujours dans le sillage anarcho-punk-hardcore patiemment labouré sur les quatre albums précédents (dont le merveilleux Human Capital en 2022). Toutefois, avec quatre titres au-delà des cinq minutes (une première), Contempt est aussi leur album le plus long. Sans doute aussi le plus intense et le plus lourd. Évidemment, ça se joue à pas grand chose mais il me semble que la production de Ben Greenberg exacerbe la sauvagerie déjà bien sauvage de Bad Breeding. Les scories industrielles sont poussées plus avant (Gilded Cage/Sanctuary) et le vernis noise expé. a gagné quelques couches supplémentaires. Bref, c’est tout pareil mais aussi différent. Alors bien sûr, le groupe ne réinvente toujours rien ni n’apporte grand-chose de nouveau au crédo punk-hardcore mais il sonne magnifiquement bien et les dix nouvelles occurrences s’avèrent toujours aussi jubilatoires.
Le discours, lui, ne change pas et comme à l’habitude, l’album s’accompagne d’un livret photocopié très intéressant contenant des essais d’Alasdair Dunn (des très concernés et singuliers Ashenspire) ou Aidan Frere-Smith portant sur la crise des sans-abris ou l’abattage problématique des blaireaux au Royaume-Uni, sur le capitalisme vorace et dévastateur et notre statut pas clair de victimes consentantes du système renforçant notre propre oppression. C’est même le thème central de Contempt et évidemment, ça fait mal ("Will you submit or learn to fight ? And celebrate violence as a binding tool. Fracture and puncture, dismantle the facade. It’s the only war worth fighting for…" entend-on par exemple sur Survival en réponse à "Is this survival ?"). C’est jusqu’au-boutiste, incisif et tranché, au diapason de la musique et ça en décuple l’impact (et réciproquement).


Pour y revenir, on dira juste que Contempt balance une balle meurtrière dès l’entame (Temple Of Victory) - la voix venimeuse qui éructe lorsque la guitare tisse des arabesques vrillées étrangement mélodiques - immédiatement suivie d’un brûlot tout autant sidérant (Survival), que l’embrigadement advient donc très vite et que tout le reste est du même acabit. Navigant entre moments où les penchants hardcore grignotent leur punk (Survival donc mais aussi Retribution, Devotion, Liberty ou encore Vacant Paradise par exemple, en gros la plupart des titres les plus courts) et d’autres où Bad Breeding délaisse sa course fracassante pour une approche plus larvée et en recherche (en gros, tous les morceaux les plus longs, Discipline incorporant par exemple des cuivres dans ses arrangements). Du coup, même si les potards restent systématiquement dans le rouge, le groupe varie ses azimuts et les trente-sept minutes filent à une vitesse supraluminique sans jamais tomber dans les affres de la redite ou de l’affadissement.
Mais bon, ça c’est une constante chez eux et je ne m’attendais pas à moins. Je reste néanmoins soufflé par la facilité avec laquelle Bad Breeding conserve sa rage et sa colère intactes tout en faisant muter imperceptiblement les armes pour les exprimer. Et pour une fois, on louera l’inconséquence des conservateurs et nantis Anglais (entre autres) qui au moins permet l’éclosion d’une telle musique insurrectionnelle tout autant que vitale.


Chroniques - 07.08.2024 par leoluce
 


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