Aujourd’hui on fait court, à l’image du format que le beatmaker belge Lucian Dittulescu aka Ynoji semble privilégier depuis quelques années (y compris sur album puisqu’à l’exception de Conjuro l’an passé chez Abstrakt Reflections, aucune de ses sorties ne dépasse la grosse demi-heure). Au programme donc de cette quatrième réalisation pour Xtraplex (qui fait suite au sommet Kollider d’il y a un an et demi), la continuation directe de l’EP Ronokironikon célébré dans nos pages il y a quelques mois et en une demi-douzaine de bombinettes anxiogènes et tribales, cet Ekra s’avère à peine moins colossal.

Bien qu’à l’aise on l’a vu en petit gabarit, c’est sur un album en bonne et due forme (mais concis à n’en pas douter) qu’Ynoji terminera sa course en 2017 puisque Kojito, qui verra le jour cet hiver, marquera du propre aveu de Lucian Dittulescu la fin du projet. Raison de plus pour se délecter de cette nouvelle collection de brûlots mentaux radicaux et viciés, dont les nappes dark ambient incantatoires et saturées se frottent aux rythmiques martelées et aux basses grondantes (Trob, Tai Lin) dans une atmosphère d’apocalypse en marche qu’on jurerait sortie tout droit la mythologie inca - c’est d’ailleurs en Argentine, mais également en Australie (terre des aborigènes qui ont tant inspiré Steve Roach, dont Ynoji est de toute évidence le descendant le plus "harsh") que le musicien a collecté les field recordings discrètement fondus dans le magma incandescent de cette ode aux astres destructeurs.

De cette huitième cuvée dont l’artwork primal, obscur et poétique, est signé Ynoji lui-même, on retiendra le hard dubstep spectral de Rina (illustré quant à lui en vidéo par les fragiles abstractions pulsées du graphiste attitré de Xtraplex, Han Leese - cf. ci-dessus), l’épileptique Galtariner croisant percussions organiques et emballements drum’n’bass, et surtout le final Okiro dont les onomatopées d’enfant possédé et autres borborygmes digitaux belliqueux sur fond de beats tempétueux et salves d’idiophones cliquetants semblent appeler à la fin des temps, pour le plus grand plaisir masochiste de nos tympans :