Drôle d’EP que ce Shibuya qui voit le duo ambient norvégien rendre hommage à ses trois muses tokyoïtes via un glissement progressif vers la techno. Alors que paraissent sur Bandcamp (cf. en bonus ci-dessous) les chutes du superbe Sval édité par 12k il y a tout juste six ans ce mois-ci, la transformation n’en est que plus flagrante - et non moins intrigante.

Ainsi, si demeure sur Hiro, entame downtempo centrée sur des motifs de clavier cristallins, un goût prédominant pour l’impressionnisme mouvant et les nappes susurrées, le hi hat laisse déjà entrevoir une formule plus carrée qu’à l’accoutumée, et Masa quoique plus insidieux parvient dans la foulée au parfait compromis, bidouillages vocaux hédonistes et beat four to the floor marqué n’entamant en rien l’élégance d’une trame ambient onirique à souhait. Un équilibre que Yui, hommage à la poétesse drone ambient Yui Onodera notamment appréciée pour le naturalisme scintillant du beau et fragile Generic City en collaboration avec le nippon d’adoption Celer, a du mal à perpétuer du haut de ses 10 minutes au tempo nettement accru, une techno certes cotonneuse et dont la toile de fond ne cesse de muer mais un peu trop sage dans son évolution pour marquer les esprits.

Autant dire que l’on s’est éloigné des évanescents ballets de textures et claviers clairs-obscurs qui faisaient la beauté glacée et ouatée de Sval en 2010 et perdurent aujourd’hui via les inédits Ad Undas et Opp Ned ressortis des tiroirs par nos amis Rune Sagevik et Jostein Dahl Gjelsvik, lesquels ne semblent pas se rappeler pourquoi ils furent écartés à l’époque. Rien d’étonnant tant les pulsations délicates et autres nappes opalines de synthés doucement inquiétants du second évoquent le fabuleux Tele, tandis que le premier, complétant une trilogie de titres enregistrés à l’époque avec Iden Reinhart aka Strië, met la voix caressante de l’Allemande en avant sur fond de cliquetis, de glitchs discrets et de déformations analogiques évoquant quelque vieille cassette gondolée, pour le genre de berceuse atone engourdie par le givre dont on se délecterait volontiers sur la longueur d’un album.