Fragments - Imaginary Seas
Après l’EP Landscapes et le concert de poche donné à Rennes en décembre dernier, le premier album de Fragments générait forcément une attente certaine, d’autant plus que depuis, la multiplication des écoutes du dernier disque de The Last Morning Soundtrack, projet solo de Sylvain Texier, en a fait l’une des valeurs sûres du cru 2015.
1. We Are Sailors
2. Echoes
3. Off The Map
4. Ceremony
5. Mountains & Lakes
6. Sycamore Trees
7. Lighthouse
8. Helsinki
9. Island Adrift
10. Pyramids
Tout en retrouvant le prolongement des travaux de ce dernier, les fans de The Last Morning Soundtrack seront probablement surpris de découvrir que Fragments est un projet exclusivement instrumental. Ils s’interrogeront donc sans aucun doute sur les raisons qui peuvent conduire à se passer, lorsqu’il est pourtant à disposition, d’un organe vocal aussi touchant.
Il n’existe naturellement pas une seule réponse à cette question, mais le souci d’une certaine cohérence et la recherche de nouvelles expériences musicales peuvent constituer un début d’explication. Pour donner envie d’écouter Fragments, il serait en effet tentant de s’appuyer sur la seule présence de l’homme à tout faire de The Last Morning, mais ce serait à la fois dénué de sens et faire injure à Benjamin Le Baron et Tom Beaudouin qui, en participant activement à la composition des morceaux, ne se contentent pas d’un simple rôle de faire-valoir.
A l’instar des compositions qu’il défend sur ce disque, le trio a su prendre le temps d’évoluer. C’est que l’on n’a pas à faire ici à une troupe de jeunes hommes pressés. Le cas échéant, ces derniers auraient pu se hâter pour publier bien plus tôt ce premier LP, surfant ainsi sur l’amorce d’une once de célébrité lorsque, en 2014, ils s’invitaient aux Rencontres Transmusicales puis au Printemps de Bourges, avant d’enchaîner l’année suivante avec les Vieilles Charrues, soient trois des manifestations locales drainant le plus de badauds.
Ce n’est pas vraiment le genre de la maison, et les Rennais ont préféré mettre à profit ces expériences pour rôder leurs titres et leur savoir-faire. C’est ainsi que, précédés d’une petite réputation sur l’active scène bretonne, ils publient aujourd’hui un disque qui, sans se départir de la liberté des premiers efforts, est déjà empreint d’une certaine maturité.
Imaginary Seas porte bien son nom, en ce sens que les sonorités qui le composent sont essentiellement centrées sur le voyage et l’onirisme. Les mers imaginaires sur lesquelles vogue l’auditeur sont généralement calmes, mais peuvent admettre quelques turbulences. C’est ainsi le cas d’un Mountains & Lakes à l’émotion contenue – ce qui ne fait qu’en décupler la teneur – dont l’évolution le conduit vers des territoires à mi-chemin entre les univers de Mogwai et de Sigur Rós.
A l’instar d’une boussole, c’est vers le Nord que nous dirigent les cerveaux des trois artistes. Les grands espaces y sont forcément célébrés, mais une certaine place est toujours offerte à la nuance, à l’instar de Helsinki, dont les sonorités comme le titre traduisent l’hésitation entre l’isolement – il s’agit de la capitale européenne la plus septentrionale après Reykjavik – et l’urbanisme – la mégapole rassemble néanmoins 600.000 habitants.
Entre road trip mental et voyage initiatique, la navigation permet à l’auditeur d’explorer des sommets de rêverie (Off The Map) et atteint son point culminant aux deux tiers de ces mers imaginaires, avec le single Lighthouse, titre à la fois le plus évident, mais également le plus résolument optimiste. La découverte de ce phare (et de la lumière ?) était donc l’objet majeur de cette traversée, et, comme toujours, le chemin du retour semble se dérouler plus rapidement que l’aller, non qu’il soit dénué d’intérêt, mais parce qu’une fois le Graal atteint, une forme de nostalgie s’immisce nécessairement.
Il en va de même avec les sonorités des derniers titres d’Imaginary Seas, dont les dimensions cristallines et organiques prennent toujours appui sur un piano ouaté, mais avec des effets de réverbération qui lui confèrent un caractère plus triste, à l’instar de l’introduction d’un Pyramids final qui n’est pas sans rappeler, dans l’esprit, le Piano Echoes figurant sur le End Titles… Stories For A Film de Unkle. Les influences de Fragments sont donc larges, allant d’une électro granuleuse au post-rock, sans occulter quelques détours vers le néo-classique d’un Ólafur Arnalds (Island Adrift).
La capacité à faire le tri entre les outils les plus sophistiqués n’est-elle pas la gageure d’un certain talent ? Aussi, en s’affranchissant de la voix de Sylvain Texier, Imaginary Seas parvient néanmoins à apporter son lot d’émotions et l’évidence de la pureté des compositions de Fragments fait que l’on ne regrette à aucun moment ce parti-pris artistique dont on aurait pourtant pu douter au premier abord.
Par ailleurs, les adeptes de beaux objets seront gâtés avec la sortie d’une édition vinyle du plus bel effet dont la pochette est imprimée sur un papier canson dont les sillons donnent l’impression de posséder l’œuvre graphique originale.
Ce week-end, à Rennes, se tiennent les 37èmes rencontres des Transmusicales. A l’affiche l’année dernière, les locaux de Fragments ont cette fois profité de l’événement et de l’afflux de curieux qu’il draine pour donner un concert privé.
Souvent classé comme formation à tendance post-rock, Fragments se moque bien des étiquettes. Après une démo, un mini-album de remixes et un single, le trio nous livre enfin un premier EP déjà abouti.
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