Un regard à la pochette de ce nouvel opus et à son titre à rallonge parsemé d’emojis aurait amplement suffi : ça n’est pas avec I’m totally fine with it, don’t give a fuck anymore que l’on risque de retrouver les Arab Strap que l’on aimait. Les Écossais post-reformation, depuis le vertigineusement surcoté As Days Get Dark de 2021 donc, c’est un peu le maniérisme de leur presque-compatriote Luke Haines mais sans l’ironie, ou un équivalent british à ce qu’est devenu l’Américain Mark Kozelek au tournant des années 2010, une caricature poseuse de lui-même où tout sonne faux, arty(ficiel) et forcé, en parfaite adéquation avec notre époque de poudre aux yeux.

Boîtes à rythme poussives, guitares en pilotage automatique et chant dévitalisé servent une nouvelle fois un électro-rock recyclant les années 80 en mode lo-fi pour dancefloor de zombies, loin du naturel d’un Monday At The Hug & Pint qui usait par ailleurs de ce genre de rythmiques avec davantage de parcimonie. Alors certes, rien d’aussi mauvais cette fois qu’un Here Comes Comus ! sur l’album précédent (même pas les ballades You’re Not There et Haven’t You Heard, pourtant pas folichonnes), le titre introductif bien que dénué de finesse canalisant même suffisamment de sève électrique pour nous encourager à poursuivre l’écoute au-delà des pénibles Bliss et Summer Season... mais franchement, entre nous... fallait-il vraiment mettre en parenthèse deux belles carrières solo (en particulier cette d’Aidan Moffat, que ce soit en mode spoken word désespéré et nettement plus habité sous son patronyme, ou électro/ambient/modern classical avec l’alias Lucky Pierre puis L. Pierre) pour relancer un projet qui avait déjà fait le tour de son indie rock intense et rugueux à la sortie de The Last Romance il y a presque 20 ans ?

Ne parlons même pas de ces morceaux télescopant guitares saturées, synthés datés, pop écossaise et beat façon hip-hop old school, aussi naturels qu’un Sleaford Mods sans alcool (Sociometer Blues, Strawberry Moon). À vrai dire, hormis le susnommé Allatonceness, seuls Molehills avec ses accents néo-post-rock mi-acoustiques mi-synthétiques à la Mogwai de Rock Action (album dont leur label, sur lequel Arab Strap a justement élu domicile, porte le nom), toutes proportions gardées évidemment, et Safe & Well, incursion folk traditionnelle et débranchée qui retrouve un peu d’intensité dans l’épure guitare/chant, tirent véritablement leur épingle du jeu... c’est peu au regard de la discographie du groupe et de ses membres mais on me glisse dans l’oreillette qu’en concert c’est toujours très bien : l’espoir est sauf.