Ils ont fait l’actu l’an passé sur IRM, à leur tour de nous parler de leur cru 2013 ! Dans l’idéal sous forme d’un top 3 des albums, EPs, rééditions, concerts ou autres évènements qu’ils retiendront avant toute autre chose de l’année écoulée, les choix des artistes, patrons de labels et autres activistes des scènes indépendantes de tous horizons géographiques et musicaux nous mènent de découvertes en confrontations de points de vue, l’occasion également de revenir en quelques mots sur leurs propres sorties qui ont toutes marqué à divers degrés l’équipe d’IRM en 2013.

Mikolaj Szatko

(Swallows Fly Low - Pologne/Écosse)

... partageait un EP d’abstract hip-hop instrumental intitulé Only New destiné à "nous accompagner pendant les nuits d’hiver".

Son bilan 2013 :

 1. James Joys - Glyphic Bloom

C’est un album fantastique rempli de virages imprévisibles, de percussions complexes et de sons insaisissables. Je le recommande fortement, et un nouvel opus est prévu cette année.

 2. Sampha - Dual EP

Cet EP m’a permis de me familiariser avec le chant incroyable de Sampha. J’adore les compositions et l’atmosphère unique de cet album.

 3. Cosmic Compositions - Cosmic Compositions Avant-Garde Series Vol. 2 and 3

Deux volets de cette série sont sortis cette année. On y retrouve de nombreux artistes incroyables venant de tous les coins du globe qui font la part belle aux ambiances jazzy. J’ai eu la chance de participer à ces deux volumes.

Charles et Max Nilles

(Artaban - Luxembourg)

... nous régalaient en 2013 avec l’excellent Flow. Les plus gourmands pouvaient même retrouver l’électro-pop des Luxembourgeois sur le maxi Appaskop, huitième volet du catalogue Digital Kito Kat.

Leur bilan 2013 :

 1. Jon Hopkins - Immunity

Des sons puissants, efficaces et très travaillés. On sent que le bonhomme maîtrise sa production. Grosse claque.

 2. Moderat - II

Que ce soient Apparat ou Moderat, chacun a ses qualités mais quand les deux groupes se réunissent, l’alchimie est parfaite et il en ressort à chaque fois des perles.

 3. Bot’Ox - Sans Dormir

Un groupe français qui trouve le bon équilibre entre l’électro et les instruments analogiques pour nous pondre des sons et ambiances qui pourraient coller à de nombreuses BO de films.

Graham Latham

(Constellation)

... assure la promo du label canadien culte par excellence, qui fit notamment l’actu en 2013 avec les nouveaux albums d’Esmerine, Land Of Kush, Colin Stetson ou Jerusalem In My Heart et se place déjà à la corde en ce début d’année 2014 avec ceux de Carla Bozulich ou Thee Silver Mt Zion Memorial Orchestra.

Son bilan 2013 :

Top 3 bands of 2013 (not on Constellation) :

 1. The Knife - Shaking the Habitual

I’ve been a fan of The Knife for years, but Shaking the Habitual really blew my mind. From the album artwork (literally painful to look at), to the disturbingly beautiful atmospheres their songs conjure up, to the fearless integrity they bring to their work conceptually as much as musically, this is really the whole package for me. It’s pretty much the punkest thing I’ve gotten my hands on in years, including anything that falls within the traditional aesthetic bounds of "punk" proper.

Je suis un admirateur de The Knife depuis des années, mais Shaking the Habitual m’a vraiment soufflé. De la pochette du disque (littéralement douloureuse à regarder), aux atmosphères dérangeantes et belles que leurs chansons évoquent, jusqu’à la téméraire intégrité qu’ils apportent à leur travail aussi bien conceptuellement que musicalement, c’est vraiment tout ce que j’aime. Plus ou moins le truc le plus punk que j’ai eu en mains depuis des années, y compris tout ce qui tombe dans les limites esthétiques plus traditionnelles du "punk" à proprement parler.

 2. Tim Hecker - Virgins

Again, of course I’ve been a fan of Tim’s work since forever, but this year’s Virgins album is really on another level. I was really struck by how close everything feels, and his use of open/negative space. Usually his work is much more of a frontal assault of sound, but with this one he sort of lets it creep around until you feel totally surrounded. It’s glorious.

Encore une fois, bien sûr, je suis un fan du travail de Tim depuis toujours, mais son Virgins de cette année est vraiment à un autre niveau. J’ai été véritablement frappé par la sensation de proximité qui s’en dégage, et son utilisation de l’espace ouvert/négatif. Habituellement son travail relève davantage de l’assaut frontal du son, mais avec celui-ci il le laisse en quelque sorte ramper autour jusqu’à ce que vous vous sentiez totalement encerclé. C’est glorieux.

 3. Buke and Gase - General Dome

The whole "They make their own instruments, and they’re just a duo but their sound is so HUGE !!" thing is cool and all, but I feel like people often forget to mention how incredibly good their actual SONGS are. They write these totally intelligent, heady, rhythmically complicated pieces that are still somehow totally driving and actually fun to listen to. I saw them live just after General Dome came out and it was probably the most consistently engaged I’ve felt at a live show in 2013.

Tout le truc "Ils font leurs propres instruments, et ils sont juste deux mais leur son est tellement énorme !" c’est cool et tout ça, mais je pense que les gens oublient souvent de mentionner à quel point leurs chansons sont incroyables. Ils écrivent ces morceaux intelligents, entêtants et rythmiquement complexes qui n’en demeurent pas moins complètement accrocheurs et fun à écouter. Je les ai vus en concert juste après la sortie de General Dome et c’était probablement la performance la plus constamment intense que j’ai ressentie en 2013.

Jean-Charles Versari

(Versari - France)

... nous a offert en 2013 (et c’est encore le cas, en échange d’une simple adresse email) deux beaux inédits dont une reprise du regretté Bashung, dans la foulée de l’excellent Ostinato, chroniqué sur notre forum.

Son bilan 2013 :

 1. Candelilla - Heart Mutter

L’album n’est même pas distribué en France - album splendide, tout en tension. Vus sur scène (nous avons organisé une date à Paris avec elles), les morceaux prennent encore une autre dimension. Remarquable.

 2. Frustration - Uncivilized

Je reste dans le post-punk moderne, quoi que cet album de Frustration est finalement plus punk que les précédents. J’adore cet album.

 3. Crocodiles - Crimes Of Passion

Mélodies imparables et guitares tranchantes à souhait.

J’ai acheté le nouvel album de Mendelson récemment, mais je viens seulement de l’écouter, je n’avais pas eu le temps avant (3h de musique en tout). C’est magnifique. Je me le suis pris en
pleine face... donc voilà : Mendelson (album éponyme). Énorme.

Henri D’Armancourt

(Shoefiti - France)

... honnêtement, on ne saurait plus trop vous dire exactement pourquoi on l’a convié à l’aventure, Shoefiti n’ayant rien sorti en 2013... peut-être simplement parce que le très bon Only Mountains Never Meet a encore beaucoup tourné l’an passé, ou pour sa sélection par les Balades Sonores début 2013, petit coup de pouce bien mérité. Mais finalement ça tombe bien, puisque son successeur est en cours d’enregistrement, et qu’on reparlera sûrement de ce quatuor indie rock dans les mois à venir !

Son bilan 2013 :

 1. Petit Fantôme - Stave

C’est le projet perso de Pierre qui joue aussi dans Frànçois and The Atlas Mountains. Si avant c’était sympa-sans-plus, cette dernière "mixtape" qu’il a enregistrée "pour le fun parce que j’ai choppé le statut d’intermittent" est vraiment géniale. On oscille entre électro ambient à la Kid A et rock brouillon mais salvateur avec des pointes de Pavement. Les deux univers se marient à merveille et les mélodies sont à tomber par terre. Vraiment vraiment super. J’ai hâte de les voir en live en 2014.

Et c’est gratuit en téléchargement ici.

 2. Jojobeam - Zoo

Ce qui est chiant avec les projets des potes, c’est que quand c’est nul, il est difficile de leur dire. Après ce qui est chiant aussi avec les projets de potes qui défoncent en concert c’est que leurs albums, dénués de moyens, s’avèrent assez décevants et on ne ressent pas cette énergie live bordélique qui sue.
Là, musicalement, c’est comme une pochette surprise dans une pochette surprise dans autre pochette surprise qui à un moment va te péter à la gueule. Tu sais pas quelle pochette va exploser, mais tu as hâte d’ouvrir la suivante pour voir ce qu’il y a dedans.
Donc en gros, Jojobeam c’est le projet d’un pote qui s’appelle FX et deux de ses potes nordistes et consanguins. Lui, ça fait plus de deux ans qu’il organise des centaines de concerts sur la scène underground parisienne via l’asso/label En Veux-Tu En V’là et Zoo est leur premier album.
L’artwork est chan-mé, ça envoie, c’est super bien foutu et les morceaux partent dans tous les sens sans jamais que ce soit une débauche technique. C’est fun, second degré, puissant et DIY par des gens qui savent enregistrer de la musique. Entre At The Drive-In et Gâtechien. Faut écouter fort aussi. Toutes les chansons sont bien. Mais c’est trop court. T’as le droit d’écouter l’album deux fois d’affilée aussi. Même ma copine adore maintenant aussi pour vous dire.

Et c’est aussi gratuit (enfin le prix que tu veux) et c’est là.

Les amateurs se souviendront de leur concert en première partie du dernier live de Fordamage.

 3.  !!! - Tri !!!er

Depuis la fin de LCD Soundsystem, je cherchais ce groupe qui me ferait bouger le cul comme un fou tout en ayant envie de headbanger. Un truc un peu répétitif et dansant mais avec une énergie brute et rock’n’roll. Et bah merde. Nic Offer est un frontman de malade et le concert de la Maroquinerie était un de mes concerts préférés de 2013. Complètement taré. Ou l’impression d’être à un concert électro mais avec un chanteur qui gueule dans son micro comme s’il n’y avait pas de lendemain.
Pour l’album, c’est très simple. Vous appuyez sur Play et vous saurez tout de suite au fond de vous si ces basses rondes qui groovent, si ces guitares funkyment ibizaesques, si la rythmique à la Pat Mahoney (le batteur de LCD Soundsystem : ça tape droit, longtemps, sans perdre le rythme en ajoutant les couches petit à petit), si les claviers analos qui nappent en fond, si les chœurs femino-negroïdes vous touchent ou pas. Ici ça m’a fait shaker mon booty de blanc-bec un truc de ouf. Ma copine aussi. Et quand elle veut me sortir de ma torpeur le matin, elle met ça à fond et me fait des lapdances en pyjama.

Bonus pas tout à fait 2013 :

 Ty Segall - Twins et Sleeper

Ty Segall, ce petit con, a à peine 26 ans, vient d’Orange County (CA) et sort 3 albums par an (au moins). Je l’ai découvert il y a un peu plus d’un an via l’album Twins. C’est une sorte de garage psychédélique, dans les bons sens du terme, avec des sons fuzz a repeindre ton appart rien qu’avec le vinyle et des sons de reverb qui font rêver. Ça va vite, ça fait pas de chichi, le batteur fait boumboumboum, la guitare fait gligligligligligling-FUUUUZZZAAAAAAARRRRRZZZZZ et Ty Segall débite et crie comme s’il allait mourir d’une overdose le lendemain. Parfait pour se préparer une omelette le dimanche matin.

Son dernier album en date, Sleeper, est un "album acoustique". Une sorte de mélange de Bowie et de Bolan. D’une manière générale, ses albums peuvent être inégaux. Mais ils réservent toujours une moitié de perles.

Son concert m’a rappelé les concerts de grunge des années 90, sans être passéiste pour autant. Et j’ai rarement vu un stand de merch aussi bondé après le concert. Je prédis, très sérieusement, que si ce petit con se fait chopper par un label du genre Matador/Domino et qu’ils arrivent à le faire se concentrer un an ou deux sur UN album seulement, ca sera un putain de chef-d’œuvre du rock.

Et si je peux le mettre dans cette rétrospective de 2013, c’est grâce à son clip pour Thank God For Sinners sorti en janvier. Celui-ci est splendide, sexy et rock comme on aimerait que le rock soit aujourd’hui :

Photo : Jean-Charles Versari.
Propos recueillis par Elnorton, Rabbit et Le Crapaud.