Sigur Rós - Með suð í eyrum við spilum endalaust
Gobbledigook. Le jour où ce titre a débarqué venu de nulle part on ne se doutait pas encore de la détonation qu’il allait occasionner. Un Ovni dont on n’a aujourd’hui toujours du mal à croire qu’il est signé des féériques Sigur Rós, messagers sublimes venus du froid. Ajoutez à cela une pochette géniale et psychédélique, tirée d’un film du maître danois Lars Von Trier, d’un album qui est arrivé sans crier gare et vous vous retrouvez perdus. C’est bien pour cela que l’on a pris du temps avant de tirer des conclusions. Une période de réflexion nécessaire pour appréhender ce disque, cette forêt sublime et luxuriante qui se cachait derrière l’ouragan provoqué par ce premier single parfait.
1. Gobbledigook
2. Inní mér syngur vitleysingur
3. Góðan daginn
4. Við spilum endalaust
5. Festival
6. Suð í eyrum
7. Ára bátur
8. Illgresi
9. Fljótavík
10. Straumnes
11. All Alright
Que l’on soit clair, même si le reste du disque est bien moins étrange que ce joyau baroque qu’est Gobbledigook, Með suð í eyrum við spilum endalaust marque un vrai tournant dans la carrière de ces explorateurs polaires. Il a bien fallu une trentaine d’écoutes pour digérer puis disséquer l’ensemble de ce 5e disque. Entre-temps, on a appris que Gobbledigook est une expression anglaise (!) et non pas un obscur jeu de mot islandais et il ressort finalement que cette nouvelle livraison est très loin de la glaciale dépression d’un ( ) ou de l’angoisse pré-millénaire d’ Agaetis Byrjun malgré la conservation des principaux éléments, à savoir un timbre de voix inimitable et une exigence mélodique presque maniaque.
Car Sigur Rós est maintenant un groupe qui s’accepte. Un groupe heureux pourrait-on dire. Et très vite, l’enfant terrible Með suð í eyrum við spilum endalaust s’impose comme la suite logique de ce riche banquet sonore qu’était Takk, album enjoué qui marquait déjà les signes avant-coureurs de ce changement majeur. Hvarf/Heim et Heima sortis récemment étaient, quant à eux un moyen de mettre fin à ce premier cycle de leur carrière en rendant gentiment hommage à leur Islande avec un CD et des documentaires aux airs de Thalassa.
Cette nouvelle orientation est confirmée par Inní mér syngur vitleysingur, le deuxième titre et nouveau single du groupe qui confirme sa volonté de combattre une étiquette qui lui collait un peu trop à la peau. Celle d’un groupe au moins aussi froid que dépressif et il faut attendre Góðan daginn et plus tard Illgresi pour voir réapparaitre ce qui avait été amorcé lors de l’épisode Hvarf/Heim, des créations acoustiques et mélodieuses où simplicité et émotion occupent une place toute trouvée au sein de ce nouvel opus. Car Sigur Rós c’est aussi ça, une vraie capacité à agencer leurs albums, et c’est encore plus vrai cette fois-ci puisque si tout commence par des intonations ensoleillées, c’est bel et bien la nuit qu’on croit voir tomber au fil d’une heure d’écoute. On notera avant le coucher de soleil un curieux titre pop Við spilum endalaust aux faux accents de Coldplay.
Tout l’album est construit sur cette opposition entre plaines enneigées d’une matinée de printemps et grandes étendues gelées, hostiles et malgré tout bercées par une superbe nuit étoilée. C’est en fait le prodigieux Festival qui termine le premier cycle et annonce la rupture à venir. Un morceau dans la veine de Popplagið connu pour clôturer avec brio les prestations scéniques de la bande, une introduction pleine de douceur, de mélancolie qui débouche sur un « festival » -le nom était tout de suite trouvé- de batterie puis de chœurs le long de ces 9 minutes à couper le souffle. On retrouve ici un Sigur Rós fait de grands morceaux épiques. Mais jamais on n’avait vu autant de décontraction et de plaisir manifeste d’être arrivé tout en haut. Et ce n’est pas les quelques rares, mais formidables, performances scéniques données cet été du côté du Main Square Festival ou de la Route du Rock qui diront le contraire. Au fond, les membres de Sigur Rós doivent sûrement être de bons vivants...
Autre performance de choix, Ára bátur enregistrée aux studios d’Abbey Road et qui signe la collaboration de 70 musiciens et d’une chorale ni plus ni moins. Une pièce funèbre dotée d’une montée finale coutumière mais qui, sous cette configuration, nous submerge totalement. Finalement, Með suð í eyrum við spilum endalaust s’impose comme l’œuvre de musiciens aguerris prenant la pleine mesure de ce qu’ils accomplissent depuis maintenant plus de 10 ans. Jonglant entre toutes les subtilités de leur langage musical. Sigur Rós est maintenant encore plus grand une fois sorti de la banquise. Adieu donc le volenska, langue imaginaire inventée dans le but de cacher la dépression derrière ces murmures incompréhensibles. Pour se couper du monde. Maintenant, le groupe chante dans la langue de son Islande natale. Non pas que le propos soit plus compréhensible, pour nous, petits européens frustrés par ce titre d’album à dormir debout, mais c’est un signal fort. Le groupe s’assume et Jón Þór Birgisson ose même l’anglais sur un All Alright final.
Explorateurs sonores insatiables, les islandais viennent de réaliser un véritable tour de force en réussissant une fois encore à renouveler leur répertoire. Et même si la première approche peut s’avérer déroutante, le résultat n’en est que plus beau. Le groupe réussit à la fois à contenter ses fans de la première heure mais également à aller chatouiller de nouvelles oreilles. C’est une étape supplémentaire franchie dans la carrière de ce groupe aussi atypique que fascinant, qui lui ouvre maintenant des perspectives aussi grandes que les étendues désertes d’Islande.
Et vous pouvez vous énervez contre votre clavier, nous clouer au pilori mais nous l’affirmons sans peine et avec la pointe de recul nécessaire : Sigur Rós pourrait bien avoir signé là son meilleur album. Sans problème.
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