El Hijo - Las otras vidas
Suite des aventures d’Abel Hernandez, ex-Migala, sur un album étonnament lumineux et grave à la fois...
1. Saturnalia
2. 1000 Cometas
3. Los reyes que traigo
4. Vals de los besos
5. Conmigo a tu vera
6. Bosques son
7. Mirando atràs
8. En medio del Llano
9. Cabalgar
Sous ses allures parfaitement austères (pochette noirissime) et totalement cryptique pour nous autres français (chant en espagnol, références médiévalo-mystiques), l’ex-leader de Migala fait donc son retour pour le grand plaisir de nos oreilles.
Abel Hernandez et sa voix veloutée revient donc sous le pseudonyme El Hijo, accompagné par un strict minimum (trois musiciens, une orchestration limitée aux guitares, basses, piano et batterie avec une touche de banjo et de mellotron pour la bonne mesure) pour un album d’une sobriété qui est presque exemplaire.
Exit donc les grands espaces américains et les simili-bandes originales de road-movies explorés avec Migala. On aura ici un album apaisé et champêtre, à l’image des petits lapins et du faon qui en ornent la pochette. Mais la couleur de celle-ci aurait dû nous mettre la puce à l’oreille, on est loin, mais alors très loin de toute idée de musique festive.
Si Abel puise ses nouvelles influences au coeur du Moyen-Âge (au vu des templiers partageant un cheval qui ornent le dos du disque et des illustrations d’intérieur, reproduisant des images médiévales du temps de la Reconquista en émeraude sur fond noir), c’est plutôt dans les mystères profonds de cette époque trouble. On prend donc aux sources du folklore, ajoutant au passage toute la maîtrise du folk américain qu’on sait avec Migala, et on écrira des chansons simples sur un tapis de pianos, de guitares acoustiques et du zeste de distorsion et de batterie nécessaires pour rendre le tout entraînant.
Photo (c) Isla de Encanta
On maîtrisera les changements de rythmes subtils et les deux trois notes de solo de blues qui vont bien pour terminer le morceau (1000 Cometas), les belles et tranquilles montées en puissance apaisées (Saturnalia), les claviers lounge et le final au rythme enlevé et beau comme une montée de Pink Floyd période "More" (Conmigo a tu vera), les arpèges savants et la voix grave aux accents de Leonard Cohen ibère (Vals de los Besos et Bosques Son), la pop lumineuse (Mirando Atras, point d’orgue du disque, d’une beauté à couper le souffle), les percussions martiales et la trompette arrivant juste à point (En medio del Llano), l’intro piquée aux Beatles pour demarrer le morceau puis le pont en fanfare, sans la fanfare justement, avant de reprendre de plus belle (Los reyes que traigo)... Tout semble maîtrisé, minutieusement mis en place, pour produire des chansons proches de la perfection. On arrive au superbe final Cabalgar sans avoir vu passer le temps. Et surtout, on découvre de nouvelles subtilités à chaque écoute. Signe d’un grand disque.
Mais ce qui touche le plus au coeur, c’est la voix chaleureuse d’Abel, qui, chantant en espagnol, apporte un lyrisme certain et inattendu aux morceaux. Exit le vilain accent "spanglish" et l’anglais de cuisine, ici il peut s’exprimer librement et aborder des thèmes plus vastes en faisant la part belle aux textes. Difficile pour moi, non hispanophone que je suis, de comprendre tout ce que le monsieur nous raconte, malheureusement... mais l’effet est fort joli, l’espagnol et ses sonorités seyant parfaitement aux belles chansons. Le ton, en tous les cas, est grave. On n’a pas l’impression qu’on est là pour rigoler (même si sur la photo illustrant cette chronique, Abel tente de nous faire croire le contraire avec son air rigolard)...
On est donc là devant un bel objet, bien arrangé, bien joué, juste, poignant, original et classique à la fois, et complètement intemporel. Rien à voir donc avec les précédents albums du monsieur, mais ce virage ne peut que réjouir tout amateur de belle musique.
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