Sans doute le plus punk et je-m’en-foutiste des projets d’Aaron Turner plutôt connu pour les qualités atmosphériques de ses divers alias et groupes louvoyant entre metal, noise et dark ambient, Split Cranium - qui l’associe tout comme Mamiffer à sa "moitié" Faith Coloccia aux claviers mais aussi à son compère d’Old Man Gloom, Nate Newton (de Converge), à la basse et aux deux Finlandais de Circle et Pharaoh Overlord, le batteur Tomi Leppänen (K-X-P) et le guitariste Jussi Lehtisalo - migre chez Ipecac avec ce deuxième opus aussi nihiliste et branleur que sa pochette l’indique.

Pour autant, dans son monde de brutes à la croisée du crust et d’un hardcore punk canal historique que démontent un growl bien vénère et des riffs déglingués à souhait, I’m The Devil and I’m OK ne manque pas de finesse, des chœurs synthétiques crépusculaires d’Evil Hands ou Blood Boiler au monologue final pianoté tel une ode à la paternité en passant par l’interlude mystico-harsh Pain of Innocence ou les envolées de lyrisme presque naïves de Heavy Daughter sur les refrains, et ne donne jamais l’impression du plaisir coupable un peu bas du front que l’on peut parfois craindre avec ce genre de brûlots véloces aux rythmiques matraquées. Il n’y qu’à écouter les circonvolutions mélodiques très 90s et d’une classe inouïe de la guitare de Wet Shadow, sorte de fuite en avant aux vociférations suintant le désespoir, ou les vagues larsenisantes de l’ultra-efficace Ingurgitated Liquids au break ésotérique estampillé Faith Coloccia pour s’en convaincre et goûter son plaisir sans arrière-pensée :

Quant à l’intensité presque post-metal du morceau-titre, elle enfonce le clou et renoue avec ce que Turner sait faire de mieux, au moment même où son écurie Hydra Head un temps désactivée semble reprendre du poil de la bête :