Tricky - Adrian Thaws
En cette année 2014, à l’instar de Mark Oliver Everett, autre figure indispensable des années 90, Tricky se met à nu sur son dernier opus en lui donnant pour titre le patronyme qui est le sien à l’état-civil.
1. Sun Down
2. Lonnie Listen
3. Something In The Way
4. Keep Me In Your Shake
5. The Unloved (Skit)
6. Nicotine Love
7. Gangster Chronicles
8. I Had A Dream
9. My Palestine Girl
10. Why Don’t You
11. Silly Games
12. Right Here
13. Silver Tongue - When You Go
Aussi fan peut-on être du Kid de Bristol, il faut bien reconnaître que sa carrière a globalement suivi une pente descendante. Débutée par deux chefs-d’œuvre consécutifs (Maxinquaye et Nearly God), la discographie de Tricky a ensuite alterné le bon (Pre-Millenium Tension, Vulnerable et même le récent False Idols sorti l’an passé), l’inégal (Blowback ou Juxtapose) et l’indigeste (Mixed Race).
Un nouveau disque de Tricky n’est donc plus l’objet d’une véritable excitation comme ce pouvait encore être le cas il y a dix ans. Aujourd’hui, le fan du Kid est animé d’un mélange de curiosité et de crainte à l’idée d’être de nouveau déçu.
Pourtant, lorsque le disque débute, un nouveau sentiment apparaît : l’espoir. Et si on retrouvait enfin notre Tricky ? Cela s’avère tout à fait envisageable à l’écoute d’un Sun Down initial efficace, l’ex-collaborateur de Massive Attack et Tirzah se partageant alternativement la partie vocale de ce titre sombre, presque aussi crade qu’à la belle époque, sur lequel un rythme répétitif mais néanmoins envoûtant et puissant est pour beaucoup dans l’efficacité.
Loin de s’estomper, l’espoir d’être confronté à un grand disque grandit avec Lonnie Listen où le riff principal mêlé à une rythmique donwtempo presque aérienne plonge rapidement notre esprit dans les limbes.
Ce qu’on perd ensuite en énergie est compensé par la tension présente sur Something In The Way (rien à voir avec celui de Nirvana déjà revisité sur Blowback), sorte de ballade désarticulée où l’on retrouve la nouvelle muse de l’Anglais, Francesca Belmonte, qui officiait déjà avec brio sur False Idols.
Le reste du disque n’est malheureusement pas à la hauteur de cette triplette initiale. Rien d’affreux, cela dit, Tricky ayant donné tout ce qu’il avait à donner (du moins, espérons-le) en terme de mauvais goût il y a quatre ans sur Mixed Race. On navigue ici entre de vrais bons morceaux, de l’anecdotique et de l’insipide. En somme, comme souvent depuis dix ans, celui qui s’est désormais établi à Paris assume toutes ses sensibilités (même les plus dispensables) et crée un melting-pot inégal.
On attend ici mieux du Kid qu’un Keep Me In Your Shake peu surprenant et sonnant clairement comme une redite au sein de sa discographie ou encore la ritournelle au piano I Had A Dream sympathique au demeurant mais trop gentillette pour transcender quoi que ce soit. On aimerait par ailleurs qu’il s’abstienne de nous gratifier de reprises à côté de la plaque, à l’instar du Silly Games de Janet Kay où sont amplifiés certains des codes propres aux mélodies appuyant les films à l’eau de rose des années 80. Les quelques discrets contre-pieds disséminés ici ou là sur cette reprise ne suffiront pas à en relever le niveau. On ne peut que regretter l’échec de cette tentative tant Tricky a démontré une capacité à réadapter et sublimer certains morceaux de formations mainstream (à l’instar du Something In The Way de Nirvana précédemment cité ou plus encore The Love Cats des Cure).
Il serait néanmoins dommage de passer sous silence les réussites distillées sur la deuxième partie du disque, à commencer par My Palestine Girl, où l’on retrouve - et ce sera la seule fois sur ce disque - le flow du Bristolien aussi puissant et inspiré qu’à la fin du millénaire précédent. La dimension à la fois engagée du propos - où il s’imagine l’émergence d’une histoire d’amour dans la bande de Gaza - et la tension présente dans l’instrumentation constituent un formidable terrain de jeu pour que vienne s’exprimer ce flow imparable et inimitable.
On n’oubliera pas non plus d’évoquer un Right Here downtempo et sur le fil, joliment interprété par la Danoise Nanna Øland Fabricius aka Oh Land, ou Why Don’t You, exercice de style sur lequel il convient d’imaginer un son big beat produit par Prodigy et sur lequel Bella Gotti, qui officie également avec brio sur Gangster Chronicles et s’avère être l’invitée la plus efficace sur cet Adrian Thaws, nous propose un flow imparable qui n’est pas sans rappeler celui de Tor Cesay, croisée notamment sur le Better Than Heavy de Mongrel.
Plutôt que d’émettre un avis sur Adrian Thaws, nous évoquerons le morceau Nicotine Love qui résume parfaitement ce disque tant il en compile les principaux défauts et qualités. Composé de deux parties se succédant alternativement, la première partie clairement taillée pour les clubs, évoque la facette la moins intéressante de Röyksopp tandis que l’autre, déroutante et plus expérimentale, nous ramène vers les sombres horizons développés avec maestria sur Pre-Millenium Tension, ce titre manque de cohérence, se casse les dents sur ses appels du pied parfois trop évidents aux clubs (la démarche est cela dit assumée), brille par son inégalité et l’absence du flow de Tricky est à déplorer (rares sont les albums du bougre où l’on entend si peu sa voix, espèce de toute façon en voie de disparition depuis Mixed Race). Pour autant, il contient suffisamment de belles idées, une inspiration indéniable et des guests de qualité pour que l’on y revienne probablement sans trop de déplaisir. Et en passant quelques morceaux. On ne risquera pas de mettre à mal une cohérence narrative qui, de toute façon, n’est ici que peu évidente.
Écouter Adrian Thaws via The Guardian :
Tricky - Silly Games (feat. Tirzah)
24 EPs commentés et mis en avant mais un total de 50 mentionnés et classés (dont une trentaine déjà chroniqués dans l’année), il n’en fallait pas moins pour rendre justice au format court, qui décidément ne reçoit pas assez d’amour de la part de nos confrères.
La sortie d’un nouvel album de Tricky n’est plus un événement. Actif depuis plus de deux décennies, le Kid de Bristol n’est, il faut bien l’avouer, plus aussi percutant qu’à l’époque des débuts, quand Maxinquaye, Nearly God ou Angels With Dirty Faces brillaient par leurs productions (...)
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