Le streaming du jour #248 : Doomtree - ’No Kings’
A l’heure de boucler non sans mal le bilan hip-hop d’une année plutôt avare en sorties de qualité une fois évacué tout ce bling-bling vaguement arty plébiscité par la presse rock indé, il semblait inévitable de se pencher sur le nouvel opus du crew toujours emmené par le rappeur P.O.S et plus que jamais décidé à en découdre avec le côté obscur de la culture pop.
Non pas que No Kings fasse partie de ces rattrapages auxquels la période est propice, mais malgré les écoutes répétées que l’album supporte particulièrement bien, il fait toujours partie de ces disques qui louvoient aux abords du classement, la faute à quelques titres légèrement en-deçà de ce que l’on pouvait légitimement attendre du retour de ce collectif culte de Minneapolis, qui nous avait par ailleurs gratifiés cette année d’une chouette mixtape confrontant le hip-hop urbain du Wu-Tang Clan au post-hardcore mélodique de Fugazi (le fameux Wugazi, toujours en écoute ici).
Car s’ils n’en sont qu’à leur deuxième véritable album en commun, les artilleurs de Doomtree se traînent déjà la réputation d’être l’un des derniers bastions imprenables de l’underground des "villes-jumelles" du Minnesota, à l’heure où le label Rhymesayers se perd peu à peu à lorgner vers la pop quand ça n’est pas carrément vers une électro racoleuse à l’image du décevant dernier opus de Blueprint. Ainsi, dans la foulée des albums solo de P.O.S qui avaient largement contribué à assoir ce crédit, No Kings s’avère être du genre effréné et féroce, résolument irréductible, sombre sans jamais tomber dans le glauque, épique même, dans ses meilleurs moments, lorsque chacun amène sa petite pierre à l’édifice comme avec l’ultra-dense Own Yours mâtiné d’électro nébuleuse ou la batucada anxiogène de l’impressionnant Bolt Cutter en vidéo-ci-dessous :
C’est donc d’autant plus dommage de voir le groupe tenté sous couvert d’ironie, sur Bangarang ou Gimme The Go, par des mélodies à la limite de cet aguichage mainstream qu’il aime à maltraiter dans ses jouissifs élans d’anarchie, laissant en outre ses arrangements synthétiques parfois envahissants prendre le dessus sur les influences plus organiques du punk, du surf rock ou du blues. Pourtant, la pop vue par Doomtree peut aussi donner de bien belles choses, cf. Fresh New Trash qui vient clore l’album sur une touche de soul gothique aux allures d’hymne perverti, tout à fait le genre de subversion électrisante que l’on attend du collectif et que ce No Kings cultive heureusement sur une majeure partie d’album de haute volée.
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