Entretiens à Twin Peaks : #51 - Leonis
Retrouvez chaque semaine dans nos pages les interviews de quelques-uns des contributeurs à la future compil’ Twin Peaks d’IRM. En 2012, avec Toboggan, Leonis avait intégré nos radars pour ne plus jamais les quitter depuis. Odyssée... l’année suivante, et surtout l’EP La Banquise en 2016 ont confirmé tout le potentiel de cet artiste habitué à faire cohabiter trip-hop et musique concrète.
Si ce mariage s’avère aussi abouti que jouissif, les esprits les plus étriqués pourraient le qualifier, de prime abord, d’étrange. Un adjectif justement utilisé par Leonis pour qualifier l’univers de David Lynch dont il est fan depuis bien longtemps et qu’il décrit avec une passion parfaitement palpable.
Le co-fondateur du label Leo & Pipo a de nombreux projets en attente, et en attendant que ceux-ci aboutissent, il a su retranscrire avec brio ce mysticisme profondément Lynchien sur l’intriguant On Reinig Road qu’il nous tarde déjà de dévoiler dans le cadre de notre compilation, ainsi que l’artwork réalisé par le Parisien pour notre premier volume I Had the Strangest Dream Last Night (The Howls Were Silent), à paraître le 21 mai.
L’interview
IRM : Comment résumerais-tu ton rapport à Twin Peaks ? A l’univers de Lynch en général ?
Leonis : Ancien ! Le travail de Lynch compte parmi mes premiers amours cinématographiques. J’ai découvert Blue Velvet à l’âge de 10, 11 ans (trop jeune !) un soir où mes parents étaient couchés et où mon grand frère m’avait certifié que ce film était incroyable. Je m’en souviens comme si c’était hier… Le film me fascinait autant qu’il m’angoissait. Il m’a laissé un souvenir à vie !
Vers mes 16 ans, Eraserhead m’a également fasciné. A un âge où l’on essaie de se différencier, je ne pouvais pas trouver mieux ! Encore aujourd’hui, ce film reste complètement libre et unique, ne ressemblant à aucun autre. Pour l’anecdote, j’ai eu longtemps son affiche dans ma chambre.
Ton personnage préféré dans la série ?
Spontanément, j’irais vers le couple « burlesque » Lucy Moran / Andy Brennan. J’adore le contre-point comique qu’amènent ces personnages car cela a finalement tendance à amplifier l’étrangeté du récit.
On retrouve un peu le même effet dans le film Twin Peaks lorsque Laura Palmer et ses parents ont un fou rire nerveux au moment du dîner : à l’image, on ne voit qu’une famille en train de rire et pourtant, cela nous plonge dans un sentiment de grande angoisse.
Une scène qui t’a particulièrement touché... ou fait flipper ?
Clairement la scène du fameux monologue « It is happening again » (d’ailleurs samplé par DJ Shadow sur Endtroducing) où le géant s’adresse à l’agent Cooper. On a tout d’un coup la sensation que le temps est arrêté. Encore une scène lynchienne qui entre en vous et y reste pour longtemps !
Tu as enregistré un morceau pour notre future compilation Twin Peaks, quel aspect de la série t’a inspiré ? Toute anecdote est bienvenue !
L’aspect pour moi le plus évident de la série et de l’œuvre de Lynch en général : l’étrangeté. Le point de départ pour la composition de mon morceau a été la découverte d’un sample pouvant évoquer l’ambiance des vieux cirques anglais.
Tu as eu vent de quelques-uns des musiciens impliqués dans ce projet. Duquel es-tu le plus curieux d’entendre la contribution ?
J’avoue humblement ne pas connaître tous les artistes présents sur ce projet. Instinctivement, ma curiosité se porte vers Melodium, un artiste que j’ai toujours suivi avec beaucoup d’intérêt… et un très bon mélodiste comme son nom l’indique !
Un album vers lequel tu reviens quand il te faut ta dose de Garmonbozia ?
Pour l’aspect peine, tristesse… je choisirais le premier album de Son Lux, At War With Walls And Mazes.
Pour l’aspect répugnant, j’irais vers le Tobacco, Fucked Up Friends.
Ton actu 2016, c’est l’EP La Banquise. Quelques mots à ce propos ? D’autres projets sur les rails ?
L’EP La Banquise est un hommage rendu à François de Roubaix et plus précisément à sa passion pour la mer et l’antarctique. J’ai toujours été fan de ses compositions pour les films du commandant Cousteau. J’ai essayé sur ce projet de retranscrire, d’une part, des impressions de froid et d’autre part les sensations très introspectives liées à l’apnée. Début 2017, sur notre structure Leo & Pipo Music, nous allons lancer un nouvel artiste, Ol.Pone, avec l’album Fragmented Memories : un abstract hip-hop d’un nouveau genre ! Je finalise pour ma part un album très onirique intitulé Europa.
Leonis sur Bandcamp / Facebook / Tumblr
English translation
IRM : How would you describe your relationship with Twin Peaks ? With the work/world of David Lynch in general ?
Leonis : We go way back ! Lynch’s work can be counted among my first love stories with cinema. I discovered Blue Velvet at the (too young !) age of 10 or 11, one night when my parents were asleep and my big brother had assured me the movie was incredible. I can remember it as if it had happened yesterday... The movie fascinated me, and made me anxious as well. It has left its mark on me for life !
When I was about 16 years-old, I became fascinated by Eraserhead as well. At an age when one tries to stand out from the crowd, this was the perfect find for me ! Today, this movie still is utterly free and unique, and doesn’t look like any other. Little bit of trivia : I had the movie poster pinned up in my bedroom for a long time.
Your favorite character in the series ?
I’d spontaneously lean towards the oddball Lucy Moran / Andy Brennan couple. I love the comedy counterpoint these characters add ; eventually it amplifies the strangeness in the plot.
You sort of have the same feeling with Twin Peaks : Fire Walk With Me when Laura Palmer and her parents break into that nervous uncontrollable laughter at the dinner table : what you can see onscreen is just a family unit laughing, but it actually fills you with great anxiety.
A scene that particularly moved - or scared - you ?
Easily the famed ’It is happening again’ monologue sequence (which by the way was sampled by DJ Shadow on Endtroducing), when the Giant adresses Agent Cooper. All of a sudden, you get the feeling time has stopped. Another one of those Lynchian sequences that make their ways into you and stay there for a long time !
You recorded a track for our forthcoming Twin Peaks compilation, what aspect of the series inspired you ? Any anecdote about that ?
The most obvious aspect of the series, and of Lynch’s work in general, is this : strangeness. The starting point to composing the track was the discovery of a sample conveying the atmosphere of old English circuses.
You heard about some of the musicians involved in this project. Which one are you the most curious to hear the contribution from ?
I will humbly admit I don’t know about every single artist contributing to the compilation. Instinctively, I’ll be curious about what Melodium has done, he’s an artist I’ve been following with the utmost interest forever... and he’s a very good melody maker, as his name suggests !
An album you often listen to when you need all your Garmonbozia ?
Because of its sad, grieving atmosphere... I’d pick Son Lux’s first LP, At War With Walls and Mazes.
Because of the repulsion it can inspire, I’d lean towards Tobacco’s Fucked Up Friends.
A few words on your 2016 EP La Banquise ? Any new project on the way ?
La Banquise EP is a homage to François de Roubaix, more specifically centered on his love for the sea and the Antarctic Ocean. I’ve always been a fan of his soundtracks to Cousteau’s movies. In this project, I’ve tried to convey both his impressions of the cold and the very introspective sensations born from apnea. In the early months of 2017, on Leo & Pipo Music, our label, we’re going to release a debut album by a newcomer, Ol.Pone. It’s called Fragmented Memories, and it’s a new style of abstract hip-hop ! As for me, I’m putting the last touch to a very dreamy LP called Europa.
Un grand merci à Leonis. Son morceau intitulé On Reinig Road paraîtra sur notre compilation Twin Peaks au printemps.
Interviews - 15.04.2017 par
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"A la recherche du sample perdu ! Europa est un voyage sur une longue route dont le terminus est en nous-même". Et si la chronique s’arrêtait ici ?
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