Destroyer - Destroyer’s Rubies
Album glam-folk-rock métissé aussi rugueux que riche et raffiné, d’une grande modernité au-delà de ses évidentes influences 70’s, Destroyer’s Rubies porte bien son nom. Alors que ce septième opus déjà culte de "l’autre" groupe de Dan Bejar sort enfin en Europe et gagne encore en ampleur, agrémenté pour l’occasion d’une échappée électro finale de plus de 23 minutes, une petite plongée s’impose dans l’univers musical désabusé et néanmoins flamboyant du songwriter de Vancouver.
1. Rubies
2. Your Blood
3. European Oils
4. Painter In Your Pocket
5. Looters’ Follies
6. 3000 Flowers
7. A Dangerous Woman Up To A Point
8. Priest’s Knees
9. Watercolours Into The Ocean
10. Sick Priest Learns To Last Forever
11. Loscil’s Rubies (bonus track)
I. Corundums
II. Sapphire Dub
III. Carmine
Vous ne connaissez peut-être pas encore Destroyer, mais le nom de Dan Bejar vous dit quelque chose ? Vous devez donc être familier de la pop décadrée des New Pornographers, "supergroupe" fondé par A.C. Newman (Zumpano) et dont il partage le leadership depuis 97, avec notamment Neko Case en guest vocalist, excusez du peu. Le Canadien, qui venait lui-même de fonder Destroyer en solo deux ans auparavant, a livré depuis pas moins de 10 albums en 10 ans avec les deux formations (sans compter, donc, sa participation à Swan Lake, autre supergroupe dont le premier album vient tout juste de sortir), faisant preuve d’une prolificité proportionnelle à son talent.
Mais si le dernier en date, Destroyer’s Rubies, sorti en février de l’autre côté de l’Atlantique, a mis tellement de temps à traverser l’océan, c’est que malheureusement la musique instantanément accrocheuse des New Pornographers continue de masquer aux oreilles du "grand public" celle, plus longue en bouche, d’un groupe - car désormais, aux dires de Bejar, Destroyer est bel et bien un groupe au line-up arrêté, un quintette plus exactement) qui jouit pourtant d’une réputation flatteuse amplement méritée.
Destroyer’s Rubies, à la fois moins pop et, en apparence, moins aventureux que le splendide et rêveur Your Blues (à conseiller aux amateurs de Mercury Rev et des Flaming Lips), n’en contient pas moins, outre l’enchaînement de petites merveilles qu’il constitue, un tube indé en puissance : avec sa guitare crade et sa mélodie imparable, 3000 Flowers aurait de quoi contenter mille fois les nostalgiques de Pavement. Et que dire d’European Oils ! Tout bonnement le sommet pop-folk de Bejar. Alors, pourquoi tant d’injustice ? Peut-être parce que les albums de Destroyer ne se limitent jamais à ces seuls aspects.
Désabusé et flamboyant, donc, mais également tragique et humoristique, écorché vif et ironique, introspectif et déclamatoire, imagé et obscur, narratif et poétique, nonchalant et brillant, onirique et funky, rêche et luxuriant, autant d’adjectifs et de paradoxes pour tenter de caractériser l’univers très particulier de Destroyer’s Rubies, où dominent piano, guitare et batterie, le chant de Bejar quelque part entre Luke Haines et David Bowie, une tendance au rock littéraire héritée de Lou Reed et où l’ont peut entrevoir ici des cuivres (Priest’s Knees), là un clavier onirique tel une discrète réminiscence de Your Blues (le très beau Painter In Your Pocket) ou même de l’electronica sur le très ambient Loscil’s Rubies final, douce épopée instrumentale en trois parties qui doit sûrement beaucoup au batteur Scott Morgan (musicien ambient sous le pseudo Loscil), à rapprocher des derniers albums de Plaid, l’un des fers de lance du label Warp. Une maîtrise peu commune dans l’art du contre-pied que l’on retrouve jusque dans la composition et l’interprétation musicale et vocale.
Ainsi, sur tous ces plans, Destroyer’s Rubies marque de façon évidente un aboutissement des plus passionnants, relayé par un bouche-à-oreille de plus en plus passionné. Gageons que cette fois cela suffira à ouvrir au groupe un horizon plus large que celui du simple cercle d’initiés.
Pour découvrir Destroyer, rendez-vous sur myspace, des extraits de Destroyer’s Rubies vous y attendent.
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