Le streaming du jour #1320 : Greenfield - ’s/t’
A une époque pas si lointaine, les artistes isolés utilisaient volontiers les tableaux d’affichages des maisons de quartier et autres salles de concert, espérant ainsi rencontrer un acolyte capable de sublimer leurs compositions. Depuis, internet s’est installé dans notre quotidien et ces démarches se font le plus souvent via des serveurs spécialisés.
Il serait tentant de clamer que c’était mieux avant en jouant la carte de la nostalgie. Certes, il était alors question de rencontre quand, aujourd’hui, il est possible de sortir conjointement un disque sans ne jamais s’être serrés la main. Peut-on pour autant dire qu’il n’y a plus de rencontre ? Le débat est ouvert.
Alors certes, ce préambule enfonce une porte ouverte puisque les collaborations à distance existent depuis des années. Toutefois, ce premier éponyme de Greenfield a un écho particulier pour notre webzine. C’est en effet sur notre forum que se sont rencontrés Bernard Gomez et Cyrod Iceberg, les deux auteurs.
Si la trame structurelle des compositions est bâtie par le premier nommé, le second l’étoffe en y ajoutant guitare, synthé et voix. Le résultat sonne comme le barycentre des influences des deux artistes.
En effet, Greenfield semble être l’un des projets les plus pop du stakhanoviste Cyrod Iceberg qui, en plus d’œuvrer sous son propre pseudonyme, officie également au sein de Red Space Cyrod, Tadash ou Oizak, expérimentant aussi habilement post-punk, ambient, noise et drone.
Cependant, Cyrod Iceberg ne s’est pas contenté d’endosser la tenue d’un caméléon qui s’intégrerait à l’univers de son acolyte sans même l’influencer. Ainsi, si l’on peut penser à The Feelies, groupe de chevet d’un Bernard Gomez qui dit apprécier "la pop ligne claire et les guitares arpégées", le savoir-faire de Cyrod tend à donner au propos de Greenfield une dimension plus sombre.
De manière assez juste, le duo précise que son univers se situe "entre british pop 80’s et post-punk". Aboutie d’un bout à l’autre d’un disque qui ensorcèle immédiatement l’auditeur, cette synthèse n’est sans doute jamais aussi efficace que lorsqu’elle se rapproche de sonorités coldwave, voire cold-gaze façon Jessica93, à l’instar des grands moments que constituent Mine et Shadow.
Blâmer internet est une besogne à la portée du premier venu, mais quand ce que certains réduisent encore au virtuel permet d’accoucher de galettes aussi succulentes, on s’en contentera volontiers. Sans même chercher à vérifier si l’herbe du terrain est plus verte ailleurs.
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