Clark - E.C.S.T. T.R.A.X. EP
Une chronique en bonne et due forme pour un EP 2-titres de 11 minutes à tout casser ? C’est dire si la nouvelle direction empruntée par Clark sur cet E.C.S.T. T.R.A.X. nous a bluffés, alors que l’on n’espérait plus grand chose de neuf de l’Anglais.
A dire vrai, on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre de la part Christopher Stephen Clark, la preuve avec la trajectoire récente du pensionnaire de Warp, de la folktronica psyché mâtinée de piano et rêveries texturées de l’atypique Iradelphic à la post-techno massive et hypnotique de l’EP Superscope (et de l’album Clark qu’il préfigurait la même année, en 2014) à la jolie BO ambient tous claviers et synthés dehors de la série The Last Panthers au retour de flamme IDM inégal de Death Peak. Un dernier long format en date sur lequel quelques incursions baroques, acoustiques ou chorales (notamment sur les chouettes Aftermath, Living Fantasy et Catastrophe Anthem) annonçaient tout de même sans avoir l’air d’y toucher la petit résurrection de l’EP qui nous occupe ici.
En effet, rien de véritablement emballant dans la disco du Britannique depuis Body Riddle il y a 12 ans déjà, mais pour la toute première sortie de son label Throttle (pour mémoire, il y a une douzaine d’années également, trois EPs du bonhomme comportaient ce mot qui signifie "accélérateur" en anglais), c’est justement au contact de vrais faux instruments acoustiques (en réalité des samples de la librairie musicale Spitfire Audio), clavecin et piano respectivement, que l’auteur du superbe Clarence Park retrouve l’inspiration sur ces deux titres frénétiquement déstructurés et pourtant sous-tendus par un sentiment d’extase quasi religieuse, à la croisée de l’électro de rave party, de la musique concrète et de la liturgie synthético-orchestrale.
Le résultat, qui met effectivement les gaz, pourrait être indigeste mais s’avère finalement digne cousin maximaliste des crossovers arpégés des dernières sorties d’Oval en plus épileptique et emphatique, évoquant de loin la dramaturgie des soundtracks dont l’Anglais est friand, surtout sur l’impressionnant Harpsichord E.C.S.T. où d’imposants renflements texturées, d’étranges onomatopées et autres beats rebondissants jouent au chat et à la sourie près de 7 minutes durant avec les fiévreuses cascades mélodiques du clavecin synthétique. "Les clavecins sont les synthés de rave originels" plaisante d’ailleurs Chris Clarke, "ils n’ont aucune dynamique et sont primitifs, abrasifs. Parfaits pour des accords syncopés agités du bocal".
Quant à Piano E.C.S.T., plus atmosphérique mais tout aussi sauvagement déconstruit et surtout complètement fou avec ses riffs de synthé et ses loops de glitchs cybernétiques, il sonne autant comme un Amon Tobin circa Foley Room joué par des aliens sous LSD qu’un Aufgang schizo au bord de la crise de foi, et multiplie en fin de morceau les explosions d’infrabasses dronesques dans un crescendo de tension découpée au scalpel digital.
"Ce sera peut-être un essai sans suite et je ne sais même pas vraiment ce que c’est, mais j’aime sa frénésie" avoue le musicien à propos de cet E.C.S.T. T.R.A.X. EP. "J’ai beaucoup écouté Popul Vuh, et bien que leur musique soit beaucoup plus ambient et subtile, elle m’a influencé. Ils savaient capturer des pics d’extase extrêmes." Une extase qui chez Clark mériterait souvent la camisole mais que l’on rêve déjà d’entendre déclinée, dans toute sa démesure lyrico-expérimentale, sur un prochain long-format.
100 albums, en attendant les concerts et EPs, avec pour seule règle de n’en retenir qu’un par artiste ou projet, hors collaborations. Un lien sur le titre du disque en question pour lire la suite lorsqu’il s’agit d’une chronique publiée dans l’année, et pour aller plus loin, un laissé pour compte du classement à écouter si vous avez aimé le choix auquel (...)
Après un virage lorgnant presque vers l’indie sur Iradelphic en 2012, où la guitare acoustique prenait une place prépondérante, nous étions bien curieux de découvrir les prochaines orientations musicales de Clark.
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