Troisième long-format de A Taut Line après Nitriding Portrait en 2013 et Mutual Prints deux ans plus tard, Distraction Provisions permet à Matt Lyne de poursuivre l’exploration de sphères synthétiques oppressantes.

Un an après l’EP 34 aux détours plus psychédéliques, ce recueil de douze compositions électroniques permet au natif de Cambridge d’évoquer tout l’amour qu’il porte à son pays d’adoption : "Les villes japonaises peuvent être des lieux de vie intenses, mais c’est surtout la beauté naturelle du Japon qui est sublime".

Les décors dressés vont d’une electronica minimaliste élégiaque (A Perpetual Medium) à la jungle (Intertransmission) en passant par une ambient rêveuse rappelant les travaux instrumentaux de Moby et une IDM ambivalente hésitant entre plages oniriques et lourdeur sous-jacente (Hatsudai). Un large panel, donc.

S’il a souhaité faire de cet album une trêve plus légère au milieu d’une actualité politique pesante, le naturel de Matt Lyne revient rapidement, et ses tourments ne tardent pas à hanter ces field recordings et nappes synthétiques qu’il voulait légères. Comme souvent, l’artiste se réfère à la beauté immatérielle des éléments, précisant que "ici, il y a si souvent des tremblements de terre et c’est alors que l’on comprend à quel point la nature est puissante. Le Japon est donc une constante cacophonie de sons, et cela se reflète sur cet album".

Les percussions tribales occupant l’ensemble de l’espace sur un Purest Health2 en sont un aperçu efficace en en ce sens qu’elles procurent un véritable sentiment d’étouffement, les quelques plaintes vocales en arrière-plan captées dans la rue accentuant cette impression. Ne choisissant pas entre la mouvance et l’onirisme, Distraction Provisions ne s’inscrit ni dans l’ambient, ni dans la braindance et creuse donc une troisième voie dans un univers électronique stimulant et cotonneux.