Le streaming du jour #1631 : Aitänna77 - ’Música Ligera’
Aitänna77 s’invitait déjà dans nos colonnes il y a quelques mois avec Any Place But Here mais au regard de la qualité de sa nouvelle publication, il nous était impossible de la passer sous silence.
De par son titre, Música Ligera plante déjà le décor. Là où ses deux prédécesseurs adoptaient la langue de Shakespeare, l’artiste basé à Castellón De La Plana revient aux fondamentaux. L’espagnol. L’idiome sous lequel il avait publié Buenos Son Tortas en 2009 et El Drama Del Descenso trois ans plus tard.
Pour son sixième long-format, Aitänna77 radicalise son propos, et il ne reste plus rien des effluves folktronica qui demeuraient présents sous forme de réminiscences sur Any Place But Here. Clairement, l’Espagnol choisit de se tourner vers un abstract hip-hop que les puristes ne renieront pas.
Si ce mouvement a une vingtaine d’années au compteur et que, les pionniers ayant tellement d’avance, il est impossible de le renouveler totalement, Aitänna77 ne verse jamais dans un passéisme laborieux.
S’il lui est impossible de surclasser ses aînés, il leur tient néanmoins la dragée haute, particulièrement lorsqu’il mâtine son abstract de nappes lugubres et rythmiques affirmées à la RJD2 comme c’est le cas sur Amanecer ou plus sûrement encore Ausencia.
Essentiellement instrumental - une voix féminine s’invite bien sur le plus sensuel Contigo mais il s’agit là d’une exception - Música Ligera rappelle la seconde vague du trip-hop, celle du mitan des années 2000, lorsqu’il s’appuie sur des mélodies soufflées (Locuras) ou des circonvolutions glitch (Te Olvidé), mais il aborde également une dimension cinématographique tout à fait essentielle lorsque apparaissent ponctuellement des réminiscences de Michel Legrand (Qué Será De Mí), un piano navigant au milieu d’un souffle évanescent (Tres De Espadas) ou des cordes frottées interrompues par des percussions tranchantes générant un sentiment introspectif que ne renierait pas Craig Armstrong (Cuidado).
Synthétiques et ancrés dans un univers vaporeux, les dix-huit morceaux de Música Ligera sont extrêmement concis et ne s’étendent qu’exceptionnellement au-delà des deux minutes. Forcément, les possibilités de contre-pieds et de constructions à tiroirs sont limitées, mais Aitänna77 construit une œuvre profondément labyrinthique où les impasses ne sont bien souvent que des apparences qui trouvent leur écho dans la construction suivante. Aussi passionnant que son prédécesseur, ce long-format autoproduit fait partie de ces disques qui raviront autant les auditeurs distraits que les mélomanes qui sauront y revenir autant que nécessaire.
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