Matt Elliott - The Calm Before
Qu’ils sont agaçants les vieux fans, ceux de la première heure, qui aiment à rappeler qu’ils étaient les premiers à avoir flairé le bon filon et que leurs talents de défricheurs leur avaient permis de découvrir tel artiste « à l’époque où c’était bien ».
1. A Beginning
2. The Calm Before
3. The Feast of St. Stephen
4. I Only Wanted to Give You Everything
5. Wings & Crown
6. The Allegory of the Cave
Alors que le Semtex signé The Third Eye Foundation fêtait ses vingt printemps cette année, Matt Elliott n’échappe forcément pas à la règle et ses plus anciens suiveurs ont tendance à céder au rituel du « c’était mieux avant ».
Peut-être. Nous n’allons pas comparer The Calm Before à The Mess We Made ou Drinking Songs puisque cela n’aurait pas beaucoup de sens et que, effectivement, cette dernière livraison pourrait souffrir de la comparaison avec les chefs-d’œuvre mentionnés.
Mais il ne faut pas toujours voir le verre à moitié vide. Plutôt que de regretter une légère baisse de régime bien légitime à quarante-deux printemps – dont vingt passés à publier régulièrement ses disques – considérons The Calm Before pour ce qu’il est : un vrai beau disque poignant et inspiré.
Et surtout triste. Certes, depuis qu’il officie sous son véritable patronyme en 2003, Matt Elliott s’est éloigné de la drum’n’bass de Semtex et de The Third Eye Foundation d’une manière générale, mais il semble aller encore plus loin dans une veine minimaliste dépouillée.
En seulement six morceaux répartis sur quarante-trois minutes, le Bristolien s’est entouré du contrebassiste Jeff Hallam (également croisé sur certains disques de Dominique A) et du batteur Raphaël Séguinier (collaborateur d’Emilie Simon pour sa part). Et c’est tout. Pour le reste, Matt Elliott est seul avec sa voix mi-rauque, mi-enchanteresse, et sa guitare parfois appuyée par quelques accords au piano.
A l’instar de Failing Songs, la folk qu’il décline est ainsi inspirée par des sonorités balkaniques. La chose est prégnante sur un I Only Wanted To Give You Everything qui emprunte également dans sa progression au post-rock de GY !BE, ou sur un Wings & Crown qui évoque Hku.
Mais The Calm Before constituera également un régal pour ceux qui maîtrisent la langue de Shakespeare tant Matt Elliott a mis de sa personne dans les textes et thèmes abordés, qui questionnent ouvertement le sens de la vie (The Allegory of the Cave fait clairement référence à Platon, alors que The Calm Before s’intéresse aux ruptures dans un parcours de vie) et la condition humaine (The Feast of St. Stephen évoque sur un plan
presque sociologique les conséquences de l’éducation religieuse qu’il a reçue).
La limpidité et la richesse des textes ne sauraient pour autant pas effacer
l’efficacité des envolées purement musicales. Lorsque la contrebasse s’emballe et que la guitare hésite entre tristesse et luxuriance, la grâce n’est pas très loin.
Laissons donc aux fans de la première heure les œuvres initiales de Matt Elliott. Certes plus riches et aventureuses, elles ne suffisent pas à éclipser les indéniables qualités et le pouvoir de séduction de The Calm Before, disque dont on est loin, neuf mois après sa sortie, d’avoir fait le tour.
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