Rhesus, groupe positif ! Analyse par Indie Rock Mag
Juste avant leur concert à La Boule Noire le 16 novembre dernier, Rhesus s’est prêté au jeu de l’interview. Sans concession, ni langue de bois, voici un petit bilan de ce qui en est ressorti.
Tout d’abord, petite présentation, qui fait quoi dans Rhesus ?
Aurélien : honneur aux dames …
Laura : donc Laura, à la basse et aux chœurs.
Simon : Simon à la batterie.
Aurélien : et Aurélien, au chant, à la guitare, et au ukulélé.
Et au sein du groupe comment se passe la composition d’une chanson ? Vous avez composé un petit peu pendant votre tournée, y’a-t-il une grosse différence entre l’élaboration d’une chanson sur la route ou comme vous avez fait peut-être chez vous avant ?
Aurélien : sur la route ou pas sur la route, le truc c’est un peu toujours le même schéma, c’est-à-dire que je compose un peu la chanson sur une guitare acoustique en général, ou je fais une démo sur mon ordi, et puis ensuite on essaye de la faire fonctionner tous les trois ensemble. Donc on répète pour essayer de trouver un arrangement qui fait que ça fonctionne quand on joue tous les trois. Et puis des fois aussi on jamme ensemble tous les trois dans la salle de répète, c’est-à-dire qu’on arrive, on joue n’importe quoi, et il se trouve que ce n’importe quoi fait un truc bien, donc ça c’est le cas numéro 2. Et y’a pas de cas numéro 3. Voilà en gros comment ça se fait.
Simon : si y’a un cas numéro 3, quand il y a juste un bout qui a déjà été fait, et puis on trouve l’autre bout.
Concernant les albums, Sad Disco contient plus de chansons pop par rapport aux précédents EPs, est-ce que c’est venu tout seul ou est-ce que c’était une volonté de votre part de plus s’orienter là-dedans ?
Aurélien : nan, en fait c’est du à deux trucs à mon avis. Déjà d’une part, l’album on l’a composé en fait vraiment dans notre local, c’est-à-dire qu’on était au calme, etc, et ça a vachement joué je pense, parce que quand tu es toute la journée au calme, tu fais naturellement des trucs calmes. Et puis c’est aussi une période où on écoutait pas mal de trucs super pop, Kings Of Leon, Coldplay (désolé j’écoutais vachement Coldplay à l’époque), et voilà, je pense que ça représente vraiment une période comme ça, super posée.
Simon : on n’a pas eu l’occasion de trop les jouer en concert en fait, donc c’était vraiment à huis-clos, et oui effectivement du coup c’est plus pop. Mais ce n’est pas une volonté à la base, on ne s’est pas dit on va faire un album pop. De tout façon ça vient comme ça vient en général.
Aurélien : je ne pense pas qu’on soit un groupe avec un son particulier, on adore ce genre de groupes mais on n’est pas comme un Editors ou un groupe qui a un vraiment un son ciblé.
Laura : ça vient naturellement de toute façon.
Aurélien : si j’arrive avec une ballade acoustique, et bien on aura une ballade acoustique, et si on trouve un truc qui cartonne un peu power trio, et bien ça fera un truc power trio.
D’accord. La question suivante était un retour aux sources ’plus rock’ est-il prévu avec un deuxième album. Ca vous ne pouvez pas encore le dire alors ?
Aurélien : en fait nan, disons que dans la forme de l’album, c’est-à-dire que dans le son du prochain album, je pense que ça sera plus cohérent avec ce qu’on fait en concert, donc plus brut, mais je pense que les chansons ça sera la même chose globalement. Enfin on ne s’est pas mis à écouter du grindcore entre temps donc voilà.
Simon : en fait, c’est vraiment la couleur du son qui va changer. Il y aura beaucoup plus d’attitudes, de bruits de pièce, ça sera plus chaud aussi, plus chaleureux je pense. Sad Disco a été très produit, très lissé en fait.
Aurélien : là on ne va pas hésiter à laisser des trucs super bruts, une chanson avec guitare voix. En tout cas en ce qui me concerne c’était super arrangé en termes de guitares et d’arrangements de guitares sur Sad Disco , ce qui était très difficile d’ailleurs à retranscrire en concert parce que je suis tout seul. Et là je pense qu’on va vraiment à l’essentiel, on n’essaye pas de rajouter des couches et des couches et des couches à tout prix.
Simon : et puis on a la chance, comme on fait une grosse tournée, de pouvoir les essayer en fait. Si tu joues un morceau en concert tu vois tout de suite ce qui va, ce qui ne va pas, ce que tu pourrais améliorer et tout. C’est cool.
Sad Disco a été enregistré en Belgique où les groupes nationaux ont peut-être moins de difficulté à sortir un album chanté en anglais. Est-ce que vous pensez qu’en France le parti pris d’écrire des textes dans une langue étrangère pose des difficultés supplémentaires pour être signé ou pas ?
Aurélien : oui ça pose un problème, mais quand je me suis mis à écrire des chansons, quand je me suis mis à chanter, je me suis absolument pas mis dans l’objectif ’alors en terme de marketing qu’est-ce qu’il faut que je fasse si je veux passer sur Europe 2, alors il vaudrait mieux que je chante en français comme ça en roulant le ’r’ ...’, nan, c’est venu super naturellement, et désolé là j’ai vexé 50 groupes français (rires). Après oui, ça pose grave un problème, parce qu’en France il y a cette loi de merde qui fait que les radios sont obligées de passer 40 % de groupes français qui chantent en français …
Simon : ou de groupes chinois qui chantent en français …
Aurélien : et nous on passe après ces groupes là, et après les groupes anglais et américains, donc on passe, mais on est un peu en cinquième division donc c’est un peu merdique. Mais l’avantage c’est qu’on peut s’exporter, on a commencé un peu, on essaie un peu d’aller jouer en Allemagne, c’est cool, et ça on ne pourrait pas se le permettre si on chantait en français.
Simon : en fait y’a deux trucs, c’est peut-être un peu plus dur en France au début, mais en même temps il faut le prendre comme une chance parce que justement on peut aller jouer en Suisse, en Belgique, en Allemagne, dans tous les autres pays autour de nous, et c’est ce qu’on essaye de faire. Là on a fait une grosse tournée en Allemagne, donc on aimerait bien que le prochain disque sorte vraiment là-bas comme on a fait en France.
Aurélien : je sais que c’est super cliché, on le dit à chaque fois et je pense que tous les groupes qui chantent en anglais le disent, mais on aimerait bien un peu suivre le parcours de groupes comme Phoenix, Tahiti 80, M83, etc, même si c’est pas vraiment le même créneau. C’est des groupes qui sont quand même assez confidentiels en France alors qu’ils cartonnent en Allemagne, en Angleterre et tout ça.
Simon : disons que c’est un peu l’exception qui confirme la règle.
Mon autre question était justement que chanter en anglais aidait plus à s’exporter, vous êtes déjà un peu implantés en Belgique, en Suisse, en Allemagne, l’Angleterre c’est la prochaine étape ?
Laura : l’Angleterre je ne sais pas, c’est vraiment un monde à part.
Aurélien : si tu veux là-bas c’est vraiment tellement ancré dans la culture cette musique et tout ça. Et en plus ils sont super chauvins au niveau de la musique, je le prends un peu comme s’il y avait un groupe anglais qui se mettait à chanter en français et qui arriverait sur le terrain de Noir Désir, Déportivo, Luke, et on leur dirait : ’ben non quoi enfin’. Y’a un peu de ce truc là, et en plus là-bas la culture rock est 50 fois plus développée que chez nous, donc du coup au mètre carré des groupes comme Rhesus y’en a plein plein plein, et c’est très dur. Mais on va essayer.
Simon : en fait quand tu rayonnes en Angleterre après tu rayonnes partout. Un groupe qui marche en Angleterre, après il va en Allemagne, en France, il va partout.
Aurélien : on ne s’est pas avoué vaincu pour l’instant, il ne faut pas y aller n’importe comment en fait. Si on y va, il faut avoir un mec qui te buzze, qui te fait avoir des articles dans la presse là-bas, tu vas une semaine à Londres et tu joues tous les soirs dans un bar différent pour faire buzzer le truc, c’est complètement différent de chez nous en fait.
La question qui fâche, des mauvaises langues vous ont accusés d’avoir vendu votre âme au diable en acceptant de prêter votre musique et surtout votre image pour une pub Nivea. Qu’avez-vous à leur répondre, et est-ce que cette décision a été facile à prendre pour vous ?
Simon : on a vraiment réfléchi parce qu’on n’a pas dit oui tout de suite comme ça, et si ça avait été pour Tampax on ne l’aurait peut-être pas fait par exemple (rires). Et après en fait, je pense que pour réussir, entre guillemets, dans la musique, ce qu’on veut tous faire parce que c’est notre passion on a envie d’en vivre et tout, il faut être malin aussi. Malheureusement le business de la musique c’est vraiment impitoyable, comme tous les business, comme toutes les industries, et faire cette pub, ça a été malin, parce que grâce à ça on a pu sortir le disque en Allemagne, si on n’avait pas fait cette pub on n’aurait pas fait les dates en Allemagne, et peut-être que le prochain disque ne serait pas sorti en Allemagne …
Aurélien : et en termes d’image je trouve que ce n’est pas non plus complètement déconnant tu vois. On nous voit en train de jouer en concert. Après tu peux trouver 10.000 autres exemples, comme David Bowie, mais c’est David Bowie donc on ne lui dit rien mais bon, il vend de l’Evian …
Simon : y’a les Strokes aussi pour EDF. Et puis il ne faut pas oublier qu’en Angleterre la plupart des gros festivals sont sponsorisés par des marques de bière, le plus gros festival itinérant de rock aux Etats-Unis s’appelle le Vans Warped Tour, qui est quand même une marque de chaussures. Enfin je ne sais pas, mais je pense que quelqu’un qui dit ’voilà Rhesus Nivea’, c’est parce qu’il ne nous aime pas tout court, s’il n’y avait pas eu ça, ça aurait été autre chose.
Aurélien : enfin je ne sais pas, par exemple je vais voir We Are Scientists en concert et j’apprends qu’ils ont fait je ne sais pas moi, une pub pour Orangina, j’en ai rien à foutre, je vais voir et je kiffe le concert et voilà.
Simon : nous les gens qui ne nous aiment pas, ils ne nous intéressent pas de toute façon. On ne peut pas s’attarder sur des gens qui ne nous aiment pas, on n’est pas SM, on s’en fout et voilà.
Laura : et aussi le truc, c’est que cette pub elle n’a pas non plus eu un effet répercutant incroyable, c’est pas la pub d’Ipod par exemple.
Simon : nous cette pub, ça nous a permis d’aller visiter Kiev, d’aller en Ukraine, et voilà, c’était juste ça, ça ne va pas changer la donne. Et c’était une expérience, et je pense aussi que quand tu fais de la musique t’es aussi là pour vivre des expériences. Et tu vois c’est génial, je pense qu’on ne serait jamais allé en Ukraine de notre vie si on n’avait pas fait ça. Et rien que pour ça il fallait le faire.
Vous allez partager une série de concerts avec Kaolin et Maczde Carpate partout en France, est-ce qu’il y a une différence entre une tournée à plusieurs et une tournée plus individuelle ?
Aurélien : on n’a jamais eu l’occasion de faire une tournée où il y a une cohésion entre les trois groupes. Enfin, on a déjà fait plusieurs premières parties à la suite des groupes comme Ben Kweller ou Syd Matters, mais là ça va être spécial, on sera dans un gros bus, on n’aura pas d’hôtel, on va tous dormir dans des couchettes, enfin je ne sais pas, c’est des trucs qu’on a jamais faits.
Simon : et puis c’est des groupes qu’humainement on apprécie beaucoup, c’est des gens très gentils et tout, les styles c’est pas les mêmes, c’est une affiche hyper éclectique, mais ça va être génial. Là on est en train de bosser pour essayer de faire un morceau en commun, on est super excité. Et puis on a déjà joué avec eux mais séparément en fait.
Sinon est-ce que vous êtes attentifs à ce qui se passe actuellement au niveau de la scène rock française ou pas plus que ça ?
Simon : oui, parce que c’est notre passion la musique, alors on est attentif à tout ça, mais y’a pas de groupes qui nous …
Aurélien : moi y’a un truc que j’aime beaucoup, que je me suis remis à écouter récemment, c’est Florent Marchet. Y’a deux trois chansons qui sont vraiment magnifiques. Après on aime bien les trucs genre Miossec. Mais on n’est pas spécialement, enfin non je ne citerai pas de noms, mais euh … (rires)
Simon : mais par exemple les groupes euh …
Aurélien : on déteste Naast et Rock & Roll (rires).
Ouais mais ça c’est normal ...
Simon : nan mais voilà tu vois, c’est pas très original, qui les aime ? Personne à part Rock & Folk, donc voilà.
Aurélien : il faudrait les mettre dans un caisson et les pousser dans l’espace.
Simon : nan mais même pas, enfin on s’en fout tu vois. Mais y’a tellement de groupes géniaux que les appartements ne sont plus assez grands pour mettre tous les cds.
Aurélien : en fait du moment que les groupes font de la musique avec leurs tripes, tant que ce n’est pas pour porter la bonne veste, ça me va.
Vous apparaissez en featuring sur un titre de Pull (Crystal Palace) comment est née cette collaboration ?
Simon : en fait il faut savoir que dans Pull il y a les mêmes membres que dans Calc, et il y a très longtemps on avait fait une date avec eux, on les avait rencontrés. Et moi quand j’étais petit, j’étais fan du premier groupe du gars qui joue dans Pull, et voilà, par internet on a communiqué. On a joué à Berlin, il habite à Berlin, donc on l’a rencontré deux fois et tout, et puis ça c’est fait comme ça, une après-midi il nous a envoyé un morceau, et il nous a demandé si ça ne nous intéresserait pas de faire un truc avec eux, on a répondu dans la minute, et ça s’est fait comme ça et voilà. C’est quelqu’un de très gentil et ils font de la très bonne musique.
Y’a-t-il d’autres artistes avec qui vous souhaiteriez collaborer ?
Aurélien : moi j’aimerais bien faire un truc avec Sharko.
Laura : ouais c’est ce que j’allais dire.
Aurélien : peut-être, on verra. On verra s’il y a un titre qui s’y prête sur le nouvel album. Mais moi je suis vraiment super fan de ce type, je ne sais pas, ce gars il a une sensibilité qui me touche vraiment et j’adore. J’aimerais vraiment faire un truc avec lui.
Laura : il faut qu’il y ait l’occasion en fait.
Vous qui pouvez être considéres comme un groupe de scène, Rhesus ça dépote bien en live, quelle est votre dernière claque en concert ?
Aurélien : le truc c’est que nous on est à Grenoble et y’a pas trop de salle de concerts en fait, donc on voit que des trucs nuls (rires) … Humm … ah oui, y’a un groupe qui s’appelle Shout Out Louds, on les a vu deux fois en concert quand on était en Allemagne, et ils sont adorables et j’adore vraiment leur musique, y’a je ne sais pas …
Laura : un petit côté naïf …
Aurélien : je ne sais pas, ce petit côté folk, enfin je ne sais pas mais j’aime vraiment beaucoup, ça m’avait bien marqué en concert.
Et vous, comme vous avez tourné dans différents pays, est-ce que vous avez senti une différence entre le public français ou le public allemand par exemple ?
Aurélien : je dirais que quand on était en Allemagne, on a senti que clairement les gens étaient vachement plus curieux et allaient vachement plus découvrir des groupes en concert qu’ils ne connaissaient pas forcément.
Laura : et puis ils avaient moins d’idées préconçues peut-être aussi à la base.
Aurélien : certains soirs où c’était blindé alors que personne ne nous connaissait, on se disait ’tiens si ce soir on fait le même concert à Toulouse y’aura que deux personnes’. Et ça ouais, c’est vraiment cool.
Et dernière question, concernant les albums récemment sortis, votre dernier coup de cœur ? Ou même en général ce que vous kiffez vraiment, un truc qui vous accompagnera toujours ?
Simon : et bien le nouvel album de Pull par exemple qui va sortir et qui est super bien. Sinon j’aime bien le dernier Phoenix aussi.
Laura : y’a aussi le remastering des Cure.
Aurélien : euh Death Cab For Cutie, le dernier était bien.
Laura : moi j’ai rien à dire à part The Queen Is Dead des Smiths en 86.
Simon : le monde s’est arrêté de tourner en 86 (rires).
Aurélien : j’aime bien l’album de Albert Hammond Jr, je trouve qu’il a de très bons singles vraiment, et puis euh, sinon j’ai écouté le nouveau Bloc Party et je trouve qu’il est pourri, voilà j’l’ai dit (rires).
Et voilà, c’est ainsi que s’achève cette interview, encore un grand merci au groupe pour sa disponibilité et sa gentillesse.
Quelques liens :
Site officiel de Rhesus : www.rhesus-web.com
Page Myspace www.myspace.com/rhesusmusic
Prochaines dates de concerts : indierockmag.com/rhesus
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