Craig Armstrong - It’s Nearly Tomorrow
La flamme, certains semble l’avoir naturellement et d’un jour à l’autre elle s’éteint, comme un équilibre précaire qui se perd sans qu’on puisse vraiment s’expliquer le pourquoi du comment.
1. Outside
2. Dust (feat. Jerry Burns)
3. Sing
4. Strange Kind Of Love (feat. Katie O’Halloran)
5. Désolé
6. Crash (feat. Brett Anderson)
7. Violet
8. Powder (feat. James Grant & Jerry Burns)
9. Lontano
10. Inside (feat. Chris Botti)
11. All Around Love (feat. Paul Buchanan)
12. 15 Summers
13. It’s Nearly Tomorrow (feat. Vladislav Delay)
14. Tender
15. It’s Not Alright (feat. Paul Buchanan)
16. Early Sun
17. Endings
Serait-ce donc le cas de Craig Armstrong, arrangeur de Massive Attack du temps de Protection, et dont les deux premiers albums sortis sur le label Melankolic de ces derniers n’avaient rien à envier aux oeuvres séminales du combo bristolien ? A moins qu’un disque à peine mieux que moyen suffise à vérifier l’adage "qui aime bien châtie bien" ? Certes, compositeur de cinéma pour le moins inégal (de sa filmo fournie, hormis les tout premiers Orphans et Romeo + Juliet on retiendra surtout le score poignant de Ray) et décevant dans l’incursion électro-pop de son side-project Winona, l’Écossais n’a pas toujours brillé depuis. Mais il y avait suffisamment de belles choses en 2008 sur un Memory Takes My Hand à la croisée de l’opéra moderne et du classique contemporain pour que l’on se réjouisse de voir enfin débarquer un troisième véritable opus 12 ans après le parfait As If To Nothing.
Avec ses troublantes nappes harmoniques au lyrisme crépusculaire, Outside en prend d’ailleurs la suite d’emblée et on y croit. Malheureusement, Dust s’éternise et si Jerry Burns ne démérite pas (pas plus en tout cas que Katie O’Halloran sur le mielleux Strange Kind of Love qui lui fait suite), chantant avec une douceur blafarde aux accents douloureux les amours effrités par le temps, la composition pour cordes et piano s’avère terne et arrangée sans grande subtilité, au point que l’on a bientôt qu’une envie, ressortir The Space Between Us et réécouter le fabuleux This Love illuminé par Liz Fraser. Car en duo avec James Grant, le ténor romantique du groupe soul/pop Love & Money, la vocaliste de Glasgow flirtera plus loin avec la mièvrerie (Powder), faisant retomber la belle impression laissée par Brett Anderson sur un Crash qui en dépit de ses élans violoneux un peu trop cheap et débordants, nous aura fait rêver de ce qu’aurait pu donner la voix du frontman de Suede sur un morceau du calibre de Stay (Faraway, So Close !) offert à Bono sur As If To Nothing.
Côté instrumentaux, c’est pas non plus la panacée, et seuls les downtempo Sing, 15 Summers et dans une moindre mesure Lontano tirent leur épingle du jeu, les fourmillements géométriques des beats et blips électroniques soulignant la dramaturgie des orchestrations avec suffisamment de mesure pour nous rappeler les collaborations d’Armstrong avec l’Allemande Antye Greie-Fuchs (AGF), d’As If To Nothing encore et toujours au très bel Orlando d’il y a trois ans. La suite dégage au mieux un désespoir un peu forcé (le presque trip-hop Désolé, Inside avec le trompettiste Chris Botti, Early Sun) ou frôle carrément l’insipide (Violet, Tender et même le morceau-titre It’s Nearly Tomorrow malgré la présence de Vladislav Delay aux percussions décadrées). Or les ingrédients sont bien là, la recette elle-même n’a pas énormément changé, on ne pourra guère lui reprocher que d’être devenue une recette justement, comme quoi tout est affaire d’inspiration.
Il faudra donc attendre l’arrivée de Paul Buchanan pour frissonner un peu, celui-là même que Craig Armstrong avait tiré de l’oubli en lui offrant de reprendre au micro, sur The Space Between Us, le vibrant Let’s Go Out Tonight de son groupe The Blue Nile devenu culte dans la foulée. C’était il y a 17 ans et le bientôt sexagénaire, qui pour sa part a su garder le feu sacré, transcende les ficelles chamber pop convenues de la complainte All Around Love, et l’espoir un peu trop marqué d’It’s Not Alright, de son falsetto désarmant. Là où le bât blesse, c’est que son Mid Air s’avérait bien plus finement orchestré, triste constat au regard de ce dont fut capable Armstrong dans les années 90 lorsque tout le monde, de U2 à Madonna, se disputait ses arrangements...
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