Le streaming du jour #1112 : lufdbf - ’Drei’ & ’Pélieu’
Après deux années sabbatiques (ou presque !) qui auront permis au premier de sortir plus d’une quinzaine d’EPs sous l’alias Brou de Noix puis dans la foulée un album aux allures de best of, Fred Debief et Thierry Lorée n’ont pas fait leur retour à moitié, bien décidés à ne laisser inexplorée aucune des pistes ouvertes en 2011 par les excellents One et Deux, prémices d’un univers où rêveries volatiles, groove minimaliste, saillies électriques et prose tortueuse aux allitérations voraces font décidément bon ménage.
Sortis avec les honneurs de nos confrontations de points de vue autour de l’album 4 (cf. le dernier Comité d’Écoute), suite électrique et truculente de One, les Bisontins avaient en effet commencé par creuser le dédale introspectif et onirique du fascinant Deux sur un Drei plus concis mais tout aussi enivrant, dont les guitares limpides contrastent avec une écriture plus intrigante et tortueuse que jamais. De l’atmosphère jazzy de Bras ballants aux hallucinations métronomiques du Banquet en passant par les méditations synthétiques de Nomades, l’hommage à Satie du vaporeux Tout nous compose ou la section rythmique presque afrobeat du fantasmagorique Le bruit, cet élégant troisième opus offre bien des moments de grâce, à l’aune de cet Instant où la voix légère de Thierry Lorée vient délicatement soutenir le timbre plus grave et profond de son compère Debief, ou de l’émergence d’une complainte arabe qui vient apporter une dimension mystique aux errements lancinants de Papillons de nuit :
Quant à Pélieu, sa mise en musique de six textes parmi les plus récents du poète beat français au cut-up sans concession (les accents morbides de misère urbaine sur Soupe de lézard) constellé d’éclats métaphysiques et philosophes (Le temps déborde, transmuté ici en fulgurance électro-punk) révèle l’une des influences majeures de l’écriture de Fred Debief. Entre spiritualité contestataire et regard acéré sur la décadence de nos palliatifs virtuels au vécu du moment présent (Poèmes éparpillés), ce troisième long format de l’année (en attendant le prochain Brou de Noix ?) met cette même mixture d’électronica nébuleuse, d’âpreté électrique et de clarté mélancolique entendue sur Drei au service d’un surréalisme désabusé culminant sur le chamanique Requiem pour 7 astronautes et la crudité transfigurée du génial Indigo Express, épopée à tiroirs d’un junkie du réel :
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