On n’avait pas vraiment l’habitude jusqu’ici d’entendre de la pop, sous-entendu plus ou moins limpide et immédiate, chez Anticon. Mis à part peut-être quelques morceaux du deuxième album de cLOUDDEAD, qui avait permis de faire connaître le label à la fourmi d’un plus large public en 2004, et quelques autres sur le récent Small Vessel de SJ Esau, il n’y aura guère eu que Why ? avec notamment son superbe Elephant Eyelash en 2005 ou Alias à l’occasion de ses collaborations aériennes avec la chanteuse Tarsier pour déroger quelque peu à la règle, sans pour autant faire une croix sur les velléités défricheuses que semblent avoir en commun tous les artistes du label.
Anathallo ("coeur" en grec), la toute dernière signature de la structure californienne, ne fait pas exception. Car si c’est bien dans la droite ligne de la pop fervente et orchestrée de Sufjan Stevens, avec lequel la petite troupe a des origines communes du côté du Michigan, que semble d’abord évoluer cette musique luxuriante et baroque rodée dans une église de Chicago, ville d’adoption du groupe, c’est pour mieux se retrouver ballotée par les constructions rythmiques alambiquées de The Books ou celles, tribales et hypnotiques, d’Animal Collective.
Pas étonnant qu’Anticon soit le seul label sur lequel soient tombés d’accord les sept membres de la formation emmenée par un certain Matthew Joynt, multi-instrumentistes et vocalistes accomplis dont on imagine à entendre les extraits en écoute sur myspace qu’aucun n’est de trop pour donner corps à ce maelström instrumental qui voit s’entremêler avec intensité piano, guitares, glockenspiel, cordes, cuivres et coeurs célestes.
Ainsi, ils sont même rejoints par Dosh à la batterie sur Cafetorium, mais pour se faire une idée du résultat de cette collaboration il faudra attendre le 20 novembre, date de sortie du nouvel album Canopy Glow (voir le tracklisting) dont seuls deux extraits sont pour le moment disponibles, mais quels extraits : The River sur le site d’Anticon et Noni’s Field sur myspace ou en live ci-dessous (les amateurs des Beach Boys reconnaîtront certainement le clin d’oeil à Surf’s Up dans la mélodie de violon à la fin), deux morceaux qui devraient suffire à imposer chez nous la réputation du groupe déjà confortablement installée de l’autre côté de l’Atlantique, où leur premier album Floating World (du japonais "ukiyo"), basé sur un conte de fées nippon, les avait révélés il y a deux ans après une série d’EPs plus confidentiels.