The Notwist - The Devil, You + Me
A l’heure des dépôts de bilan, on se rend compte que l’on n’a pas assez parlé de The Notwist. Attendu par tous, enflammant toutes les lèvres depuis le début de l’année et déchainant les passions, vous l’aurez compris, The Devil, You + Me n’est pourtant pas passé exactement inaperçu. Honorable retour anecdotique ou authentique grand disque ?
1. Good Lies
2. Where In This World
3. Gloomy Planets
4. Alphabet
5. The Devil, You + Me
6. Gravity
7. Sleep
8. On Planet Off
9. Boneless
10. Hands On Us
11. Gone Gone Gone
Quitte à ternir une réputation pas franchement folichonne, à nous faire taxer d’élitistes et de vieux cons on l’avouera sans mal : on a d’autant plus aimé ce The Devil, You + Me qu’il a été décrié, le plus souvent à tort. Car à tous les malentendants qui attendaient vainement un nouveau Neon Golden, on répliquera que ce nouveau disque des bavarois a le mérite d’être, si ce n’est meilleur, différent dans son approche et bien plus aventureux dans sa construction que son magnifique prédécesseur.
Après une victoire aussi unanime, The Notwist a choisi un autre chemin que celui de la célébration et la reproduction. A la manière de Radiohead après OK Computer, la voie choisie par les allemands est tortueuse et complexe, sans toutefois tourner au grand écart comme pour les anglais. C’est sûrement pour cela que The Devil, You + Me a mis six ans à parvenir jusqu’à nos oreilles enchantées. Six longues années de maturation, de doutes, de réflexions et de remises en question. Plus malin et honnête que la moyenne, The Notwist a compris que le seul moyen de survivre à un tel chef-d’œuvre était d’avancer. Seule possibilité, risquée, de ne pas périr. Un saut à l’élastique sans seconde chance au-dessus du vide. Au bout, l’espoir mais sans aucune certitude de réussite.
The Devil, You + Me n’est pas un disque que se laisse facilement apprivoiser. Non pas que le changement opéré depuis Neon Golden soit radical. Il est même tout ce qu’il y a de plus discret, tant et si bien qu’on ne comprend la nouvelle ligne directrice qu’après une longue série d’écoutes passionnées. Tout est ici question d’oppositions, d’un jeu de polarités opposées qui s’assemblent sans trop que l’on comprenne comment. L’orchestration riche n’est jamais oppressante, juste merveilleusement dosée. Les violons de Where in This World, sommet absolu d’un disque qui n’en manque pas, restent habillement en retrait, au service d’un ensemble homogène où toutes les pièces sont composées en fonction des autres.
L’alchimie est parfaite et après avoir renoncé à l’apprivoiser on se laisse envoûter par les lignes mélodiques planantes d’un album au charme suranné qui ne se veut jamais parfait. Quand on en tourne les pages jaunies on se rend compte que The Devil, You + Me est au contraire un disque où règne une atmosphère de résignation et de défaite pesante sans jamais que rien ne paraisse désespéré. Un disque poétique, hors du temps, qui s’affranchit de toutes les contraintes imposées par le monde extérieur. C’est, au choix, un doigt d’honneur élégant ou une habile manière de s’échapper sans se retourner.
Bien sûr, une telle liberté ne peut faire l’unanimité et certains choisiront de tourner le dos à tant d’humilité et de talent. The Notwist composera sans eux, prendra le seul chemin qui lui parait juste. Cette pochette énigmatique, inquiétante et toute en métaphores expliquait en fait déjà tout sans même que l’on en comprenne toutes les subtilités. The Notwist signe là un disque adulte et mature qui s’autorise même une escapade enfantine tout en spontanéité avec le touchant Boneless.
On ne comprendra de toute façon jamais The Devil, You + Me, pas même après des centaines d’écoutes répétées. The Notwist s’est simplement apaisé, a trouvé un idéal moyen d’avancer sans se soucier de l’avenir ou du passé, mais n’en a pas pour autant terminé avec ses névroses, ses déséquilibres et ses dissensions internes. Un mal pour un bien, seules les eaux troubles étant capables de faire resplendir la musique délicate des allemands.
Tout en mélancolie résignée et mélodies équilibristes, quelque part entre atmosphères lourdes et voix cristallines, on ne pourra que laisser ce disque infuser, puis reposer, afin de mieux y goûter la fois suivante. Et nul doute que sur notre étagère poussiéreuse on le contemplera tendrement avec la même fascination que nos autres confidents intimes, Moon Pix ou Good Morning Spider. Et le même sourire béat des premières fois.
Un bilan avec plein d’inconnus au bataillon pour les gens normaux qui ne passent pas 12h par jour à ingurgiter de la musique au boulot, dans le métro, à la maison, en dormant, par perfusion, en comprimés effervescents dissous dans l’eau, en gouttes pour les oreilles, etc., forcément comme d’hab ça va plaire à certains (des bilans où l’on a pas déjà (...)
Très attendu à la rédaction d’IRM, ce deuxième opus de 13 & God sera indéniablement celui de la reconnaissance à défaut de nous faire oublier le spleen gracile de son illustre prédécesseur.
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