Maeki Maii & Ljazz - Art Feeling EP
1. Intro
2. La Nuit
3. Thelonious Monk
4. Dandy
5. Sublime Errance
6. La Chatte sur un Toit Brûlant
7. Sous la Neige dort un Cadavre
8. Dolce Vita
9. Outro
Sortie le : 25 janvier 2023
En dépit d’une belle impression sur son flow atypique et chantant comme sur ses références cinématographiques classieuses de storyteller évocateur, j’étais passé en coup de vent sur deux albums de Maeki Maii l’an dernier : Bienveillance, aux instrus parfois élégants mais pas toujours raccord avec mes préférences en la matière troussés par une demi-douzaine de beatmakers différents, et Au Temps pour Moi, où se télescopaient en vrac Kurosawa, Pasolini, l’imagerie du western ou encore le road-movie psyché Point Limite Zéro, symbole d’une contre-culture sans grand espoir pour le futur. Aux productions rampantes et crépusculaires cette fois, l’excellent R$KP, mais des connotations trap un peu trop marquées à mon goût en comparaison de l’électro-hip-hop rétro-futuriste de son passionnant Mandrax & Captagon.
Ainsi, lorsque sort quelques mois tard un certain Sonoran, collaboration avec Wolf City (moitié de Wintermute et patron du label La Voix dans le Désert diffusant l’album) que j’ai pourtant toutes les raisons de me glisser dans les écoutilles sans délai, je le mets de côté et puis j’oublie... Monumentale erreur me dis-je en l’écoutant finalement début 2023, tant ce disque condense tout ce que l’on aimerait entendre plus souvent dans le rap de chez nous : instrus mélangeurs et clairs-obscurs (avec ici un goût marqué pour les sonorités tantôt asiatiques ou futuristes), atmosphères envoûtantes et immersives, écriture narrative et hallucinée, fluidité des rimes qui collent à la musique comme une seconde peau et toujours ces citations bien senties d’un cinéma aux larges horizons, d’Antonioni à Louis Malle en passant par Jodorowsky, de Douglas Sirk au western italien et au polar urbain japonais. Un régal !
Mieux vaut tard que jamais, me voici donc finalement branché sur la bonne longueur d’onde pour pouvoir apprécier à sa juste valeur le MC occitan au blase qui monte au nez... une (re)découverte entérinée dans la foulée par le très chouette mini-album Art Feeling qui nous occupe ici, lâché fin janvier en autoproduction avec un certain Ljazz aux manettes. On y croise une contrebasse feutrée (Intro) et le piano libertaire de Thelonious Monk, des cuivres langoureux assortis d’arrangements capiteux (Dandy) et les flâneries nocturnes du couple glamour de la Dolce Vita, Humphrey Bogart la clope au bec sur une Sublime Errance aux discrets accents G-Funk et Liz Taylor en filigrane des rimes forcément félines du cristallin La Chatte sur un Toit Brûlant, petit bijou aux accents trip-hop qui évoque finalement autant le spleen du lèche-vitrines de Diamants sur canapé que les zones d’ombre du film de Richard Brooks adapté de Tennessee Williams.
Étrange ode à la putréfaction des corps dans une nature immaculée et sommet de contraste d’un disque dont la sensualité et la décontraction cachent une bonne dose de névroses, Sous la Neige dort un Cadavre convoque quant à lui la dépouille de John McCabe au son pourtant tout sauf macabre d’un jazz mélancolique et chaleureux à la Stan Getz, et vient faire écho au champ lexical de la décomposition déjà à l’oeuvre sur Dandy, allégorie d’une communication en déréliction dans nos sociétés tournées vers l’isolation des contacts virtuels. La plume est-elle plus forte que le silence et le repli sur soi ? On veut bien le croire, lorsque le rap parle ainsi à nos maux les plus intimes, instaurant une connexion sans avoir l’air d’y toucher par-delà la virtuosité du verbe, qualité dont bénéficie sans le moindre doute cet artiste que l’on suivra désormais de près !
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