Live Report : Art Rock 2022 (The Limiñanas / Phoenix)
Pour son grand retour, trois ans après la dernière édition, la faute à deux annulations liées au contexte sanitaire, le Festival Art Rock a réussi son pari. Une programmation efficace (Kim Gordon, The Liminanas, Phoenix, The KVB, French 79, etc), un public au rendez-vous et... beaucoup de pluie le premier soir.
En effet, pour cette soirée d’ouverture du vendredi, après plusieurs semaines ensoleillées dans la préfecture des Côtes-d’Armor, l’orage s’est invité, drainant une quantité massive de pluie et conduisant les organisateurs à assouplir leur protocole en autorisant, par exemple, les spectateurs qui avaient pris la poudre d’escampette à revenir dans l’enceinte du festival. Il faut dire qu’Art Rock, festival de ville, n’offre que peu de possibilités de s’abriter lorsque, comme ce vendredi 3 juin 2022, la pluie s’abat et trempe les chaussettes des plus courageux festivaliers.
Dans ce contexte, l’impasse sur les premiers concerts se justifie et c’est avec The Limiñanas que le retour à Saint-Brieuc s’effectue. Lionel et Marie Limiñana, respectivement à la guitare et derrière la batterie, s’activent avec leurs musiciens pour réchauffer le public, et y parviennent habilement, saupoudrant de spontanéité une performance néanmoins plutôt en maîtrise. Les Pyrénéens maîtrisent leur sujet et s’appuient sur une qualité de son assez incroyable dans le cadre d’un festival en plein air pour happer le public composé de plusieurs aficionados arborant une longue barbe similaire à celle de Lionel Limiñana. Pas de description track-by-track pour ce concert tant l’ensemble s’est avéré cohérent, hypnotique et captivant, sans doute un cran au-dessus de ce que le duo peut proposer en studio, à l’exception de leur inoubliable album composé à huit mains avec Emmanuelle Seigner et Anton Newcombe du Brian Jonestown Massacre.
S’ensuit une longue pause, possiblement en raison d’une difficulté à régler le son - la faute à la pluie ? - pour Phoenix, dont le concert démarrera en retard. Il commence finalement avec un inoubliable Lisztomania, sans doute le titre de leur répertoire le plus percutant en live, bien que la voix de Thomas Mars doive être réajustée sans que cela ne vienne inquiéter un chanteur qui apparaît imperturbable, garde son sang-froid et ne perd pas son calme pour autant. Après plus de deux décennies de carrière, la maîtrise est au rendez-vous.
Si les heures de gloire du groupe semblent derrière lui, force est de le constater - Wolfgang Amadeus Phoenix restera leur sommet et c’est d’ailleurs de cet album que seront extraits une bonne partie des morceaux joués à Saint-Brieuc - les plus récents Entertainment, Ti Amo ou le tout nouveau single Alpha Zulu, étrenné quelques jours plus tôt à Nîmes, rappellent à l’assistance, avec leur efficacité et leur immédiateté, qu’il y a toujours quelques bonnes pioches sur les plus récents albums des Versaillais.
Lasso, Too Young ou Armistice viennent compléter la première partie de la setlist jusqu’à l’incroyable Love Like A Sunset, longue plage essentiellement instrumentale et à tiroirs que ne renieraient sans doute pas les membres de Mogwai, et qui constituera le véritable sommet de cette prestation, les visuels hypnotiques, partant d’un farniente au soleil pour explorer le macroscopique avant de faire marche arrière vers l’infiniment petit, renforçant l’impression d’être happé par la production des musiciens, alors chefs-d’orchestre des boîtes crâniennes des individus présents dans le public. Une expérience à vivre au moins une fois dans sa vie que la version studio, pourtant exceptionnelle, ne parvient pas tout à fait à égaler.
Après un tel K.O., le groupe s’enfonce dans un creux qui va s’étendre sur plusieurs morceaux, même If I Ever Feel Better semblant presque plat, à peine sauvés par des visuels impressionnants, les différents panneaux accentuant l’immersion dans des univers 3D nous amenant aussi bien dans la Rome Antique que vers des horizons quasi-psychédéliques.
Ce moment moins intense prend néanmoins fin avec des titres tels que Ti Amo, 1901 ou Rome. Thomas Mars finit ensuite dans la fosse, porté par la foule, et le momentum de la première moitié de concert se fait de nouveau éprouver par un public qui applaudit avec entrain le groupe qui quitte la scène et s’éclipse. Au final, chacun aura certainement le sentiment d’avoir vécu un agréable moment - et davantage sur certaines séquences - que les quelques problèmes de son n’auront pas suffi à contrarier. La pluie dans les chaussettes, la fatigue et le léger retard ne viendront toutefois pas soutenir l’envie d’assister au concert de French 79, à regret tant les compositions électroniques rêveuses de l’artiste auraient pu constituer une jolie conclusion pour cette belle soirée. Pari réussi pour Art Rock dont les trois soirées auront affiché complet pour ce retour, après deux éditions annulées en raison des contraintes sanitaires. Vivement l’année prochaine à Saint-Brieuc, au chaud cette fois-ci, espérons-le.
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