On aurait pu commencer chacun des paragraphes qui suivent par "on n’a malheureusement pas eu le temps de vous en toucher un mot, mais"... tant la plupart de ces vidéos illustrent des morceaux d’albums qui auraient mérité la faveur d’une chronique. Faute de grives on mange des merles et faute de pouvoir nous pencher sur les disques en question on laisse parler les images, en espérant qu’elles vous donneront envie d’aller plus loin !
Si ce bien-nommé All Forms Are Instable n’atteint pas les sommets d’électronica orchestrale du pastoral Glow digne de John Barry ou du foisonnant Cousteau avec Julien Marchal en guest au piano, il donne le ton, lyrique et mouvant, du superbe The Next Billion Years qui fait aujourd’hui du Californien Robot Koch l’égal des plus vibrants pensionnaires d’Erased Tapes :
Grosse actu pour Tokee que l’on retrouve ces semaines-ci avec Dust Forbids the Bird to Sing, superbe successeur, avec Mark Spybey toujours, de l’évocateur 123 m, et un nouvel opus de l’expérimental et fantasmagorique projet Massaith. Cerise sur le gâteau, avec ses fascinants morphings texturés rappelant Francis Bacon et frémissant d’un intrigant souffle de vie digital, le clip de Repentant (Melted) combinant la peinture de Lin Fei Fei et l’art numérique de Vadim Epshtein illustre magnifiquement la tectonique métamorphe de cet inédit de haute volée et ses fulgurances harsh, à la croisée d’une electronica versant ténébreux et lancinant, et d’un dark ambient aussi morbide que lyrique :
Abstract hip-hop démonique et giallo photoshopé au programme de ce clip du beatmaker canadien The Dirty Sample (aka Apeface), extrait de l’album instrumental NO ! sorti le mois dernier chez Hand’Solo. Tout est dans l’atmosphère morriconienne circa L’oiseau au plumage de cristal, le petit groove irrésistible de la basse et le rouge sang qui badigeonne les images passées d’un film d’horreur non identifié :
En parlant d’Hand’Solo, une bonne partie du crew Backburner (dont le prochain album est en approche... alerte rouge !) fait une apparition sur ce clip extrait de l’album de Timbuktu produit par Ollie Teeba de The Herbaliser. Fidèle à son univers, le MC en casquette et hoodie de Wolves, Teenburger, Swamp Thing et Toolshed y déroule un groove décalé et d’une redoutable efficacité, émaillé de références à la SF, aux comics, au gaming etc :
C’est pas bien de jouer avec la nourriture... à part quand c’est pour les besoins d’un clip esthétisant bien sûr ! Ça tombe bien, les Manceaux de Quadrupède, qui sortaient l’automne dernier le mini-album Interiors, déconstruisent leur petit-déj avec la même folie douce qu’ils le font de leur math-synth-pop aux effets reverse, synthés épileptiques et pulsations extra-terrestres :
Derrière le faux duo Un Amour Suprême se cache, dédoublé, l’excellent Sameer Ahmad, rappeur montpelliérain "loin des icônes de music-hall" comme il le dit lui-même et dont on apprécie tout particulièrement le refus des chapelles ("j’ai fait du rap car chez moi y a pas d’guitare"), références aux Pixies et à Leone/Morricone à l’appui sur ce morceau introductif de l’EP Ezekiel sorti en mai :
Ben Lukas Boysen a pour certains mis de l’eau dans son vin en débarquant chez Erased Tapes il y a 4 ans, et en y restant cette année avec son nouvel opus Mirage. Sachant toutefois qu’il continue de sortir des albums de drone austères et déconstruits avec son projet Hecq venu de l’IDM, on lui reconnaît plutôt à la rédaction d’IRM le talent d’avoir su faire évoluer sa musique vers une mixture d’electronica sismique, de néoclassique délicat et de jazz moderne qui trouve un parfait contrepoint dans cette impressionnante vidéo de micro-mutations numériques :
Épure mystique de formes, d’ombre et de lumière, ce morceau d’ouverture fleuve du nouvel album de P. Maze aux textures et Otto Lindholm à la contrebasse parvient encore à retenir les ténèbres qui engloutissent peu à peu la suite du disque, un spoken word en Chinois participant de ce bel équilibre clair-obscur :
Gros casting de flows sur cet extrait de Whenever sorti en décembre dernier par les décidément très actifs Atmosphere. Les plus connus des ex Anticon (aux US du moins) sont toujours aussi efficaces et si ce morceau du même nom ne sera ni le premier ni le dernier à envoyer Trump se faire voir ailleurs, l’entendre du porte-voix d’un Murs hirsute en costard et dreadlocks dans une limo présidentielle au détour d’une référence à Seinfeld vaut son pesant de cacahuètes :
Magicienne des ondes Martenot, Christine Ott publiait le mois dernier chez Nahal Recordings l’un des plus beaux albums électro/ambient de cette première moitié d’année. Pulsar en incarne jusque dans ses images géométriques et hypnotiques au grain analogique le versant le plus radical et abstrait, mais avec l’appui des tauliers Paul Régimbeau (Mondkopf) et Frédéric D. Oberland (Oiseaux-Tempête, Le Réveil des Tropiques) à la production, la compositrice a réussi avec le cosmique Chimères le tour de force d’un disque tout aussi abouti dans la mélodie et la contemplation que dans la dissonance et les pulsations en liberté :
Avec ses accents world et jazzy et son chant féminin aux connotations r’n’b, Charms et sans nul doute l’un des morceaux les plus accessibles de Shrines, nouvel opus d’Armand Hammer. Mais ne vous y trompez pas, entre la verve hallucinée et résolument politique de Billy Woods et d’E L U C I D, une philosophie très présente et ces visions de civilisation rendue à la nature, on est là tout à fait dans l’esprit du LP, la fréquente déstructuration en moins :
On finit sur un titre extrait non pas d’un long format mais de ce 7" sorti par Gontard pour le Disquaire Day. En face A du truculent et désespéré Noyé aux cuivres bien free, on y retrouve donc ce duo avec La Féline, chanson de solitude et de regret, introspective et crue, du pur Gontard sans fard et sans le garde-fou de l’humour même noir :