2010-2019 - dix ans de hip-hop (par Rabbit)

Marquée par la retraite forcée des Beastie Boys aka le plus grand groupe de l’univers et au-delà, la trajectoire déconcertante de mon héros Sole et de son ancien label Anticon, la déchéance de Kanye West dont les derniers sursauts appréciés dans ces pages remontent à 2008, les espoirs déçus des ex Odd Future qui n’ont n’en ont pas moins généré leur quota de masturbation rédactionnelle chez nos confrères, le sacre d’un Kendrick Lamar qui ne casse pourtant pas trois pattes à un canard, un abêtissement du hip-hop mainstream d’outre-Atlantique inversement proportionnel à son succès critique et l’abâtardissement abyssal d’un rap français déjà moribond à coups d’autotune, de phagocytage par la variété et de grosses ficelles trap et pseudo cloud rap piquées aux ricains (cf. un certain groupe à initiales qu’on ne nommera pas... bouark), cette décennie écoulée aurait pu signer la fin d’une idylle.

Ce fut finalement tout le contraire, une passion ravivée par la vitalité d’un rap de niche(s) plus mélangeur et créatif que jamais, même dans notre underground hexagonal. On remerciera avant tout des labels : High Focus et feu Decorative Stamp en Angleterre, Hand’Solo Records au Canada, I Had An Accident, Stones Throw, Mello Music Group, Us Natives, Backwoodz Studioz et dans une moindre mesure Milled Pavement, Strange Famous Records et le toujours très actif Fake Four aux US, Dezordr Records, Soma Productions, Hello.L.A. et Your Master’s Voice chez nous, L’Axe du Mal en Suisse ou encore Marathon of Dope en Belgique. Pour le reste, je vous laisse découvrir ou redécouvrir mes coups de cœur selon la règle désormais coutumière des 1 album/EP/morceau par artiste/projet, et notamment une playlist de 100 titres à écumer sans modération !


Les 30 albums hip-hop qui ont marqué mes années 2010



1. Backburner - Eclipse (2015)

"Cet album condense à peu près tout ce que j’aime dans le hip-hop : à la fois épique et décontracté, rigolard et pourtant loin d’être aussi friendly qu’on pourrait le croire (Nothin’ Friendly, proclame meme le crew d’Halifax sur un final galvanisé par les cuivres en cinémascope du compositeur Alan Silvestri) voire même carrément dark et angoissé aux entournures sur un milieu de disque qui prend légèrement plus de temps à s’imposer que les tubes immédiats Death Defy, Bottle Caps ou Bad Lieutenants (cf. les décadents Creepy Crawly et Future Shock avant la triplette d’anthologie dont je parlais ici), sous tension constante en dépit d’un esprit nerdy multipliant les références SF, heroic fantasy, ciné, comics, gaming, mythologie, etc... On y entend du jazz et des scratches enflammés, des basses rondes ou rampantes et des flows singuliers (Timbuktu, Jesse Dangerously, Worburglar, More Or Les font partie des MCs les plus emballants du paysage alt-rap si ce n’est du hip-hop actuel tout entier), des riffs de guitare coolissimes et des collages de samples alambiqués, le Wu-Tang Clan, Björk et les Beastie Boys, de l’irrévérence enrobée de pop culture, du respect pour les pionniers d’un hip-hop ludique et intelligent que le mainstream a nivelé par le bas et du futurisme en veux-tu en-voilà dans la production des géniaux Fresh Kils, Mister E et Savilion. Bref, vive le Canada, goûtez-y vous aussi si ce n’est déjà fait, vous n’en reviendrez pas."


2. Vas x Ill Clinton - V for Vigoda (2017)

"Même un peu écrasé entre un morceau-titre insidieux aux tirades bestiales et un grandiose Blood For Issac final aux allures d’opéra du ghetto, où cuivres martiaux et flow compresseur servent une atmosphère d’apocalypse biblique et des rimes venimeuses dont la virtuosité tranchent avec la carrure d’ogre des bas-fonds de Philadelphie de celui qui les manie, V For Vigoda s’est imposé à coups de nerderies au groove assassin (And You Know It), de grandiloquence contrôlée (Flagrance) et d’onces de finesse dans un monde de brutes (Swordfish et sa flûte capiteuse, Gnothi Seauton et ses arrangements de western urbain). Il faut dire qu’entre le beatmaking au cordeau d’Ill Clinton, taulier du label Us Natives, et le débit carnassier au timbre massif de Vas, l’alchimie est parfaite et que des titres tels que le menaçant Dig Deep avec ses cuivres belliqueux, un Catpoo suintant la tension urbaine ou encore Gear in the Machine (dont le lyrisme crépusculaire et décadent est tempéré par une intervention coolissime du co-patron John E Cab) ne déméritent pas, et que même le plus léger Mr. Xxxcitement ou le bluesy More To Bury valent leur pesant de grâce pachydermique, une décontraction qui n’est pas de trop au regard de la férocité et de la glauquitude des missives hautement addictives que nous distribuent là les deux Pennsylvaniens."


3. Beastie Boys - Hot Sauce Committee Part Two (2011)

Avec ce huitième opus aux allures d’album-somme, devenu chant du cygne suite au décès de MCA l’année suivante dont on ne s’est toujours pas remis, nos trois New-Yorkais à la quarantaine bien tassée faisaient preuve de la même spontanéité et du même plaisir communicatif qu’à leurs débuts tout en maîtrisant leur sujet mieux que jamais (notamment en terme de production, particulièrement dense et travaillée tout en demeurant brute de décoffrage), malgré quelques fautes de goûts assumées (le poussif et vaguement dub Don’t Play No Game That I Can’t Win avec Santigold au micro qui passe pourtant tout seul au milieu du reste). Rien que du neuf mais sans rien inventer, une bonne dose de groove saturé à la Check Your Head (ça commence fort d’entrée de jeu avec Make Some Noise), une poignée de collages post-modernes qui pourraient sortir tout droit du stock funky de Paul’s Boutique (à commencer par le génial Here’s A Little Something For Ya, l’un de mes singles de chevet des années 2010, que j’ai n’ai pas réussi à inclure aux playlists plus bas pour de stupides raisons de droits), une paire d’hymnes psyché-punk dans la droite ligne d’ Ill Communication (cf. l’électrisant Lee Majors Come Again) et même quelques échafaudages cosmiques dignes d’ Hello Nasty, comme quoi trois décennies de carrière dans les jambes, ça peut avoir du bon quand on a l’inspiration solide.


4. Insight & Damu The Fudgemunk - Ears Hear Spears (2017)

"Grand bonhomme méconnu du hip-hop ricain, Insight donnait de la voix sur deux albums cultes et indispensable des années 2000, le I Phantom de Mr. Lif et surtout Beauty and the Beat de son copain Edan. Cette fois c’est au côté d’un inconnu au savoir-faire insolent qu’il explose à nouveau, Damu The Fudgemunk, un peu le DJ Shadow underground de cette année 2017. La verve humaniste à l’ancienne du Bostonien concurrence celle d’un Blueprint et fait des merveilles sur le généreux Rather Unique autant que sur le fataliste All Human. Ensemble, les deux compères remettent le less is more au goût du jour, un boom bap classieux aux samples fabuleux tantôt dramatiques (les cordes d’All Human ou de Never Be The Same, classique instantané qui pourrait sortir tout droit dIllmatic avec son instru à la Large Professor) ou plus light (cf. la magie cristalline d’Aight If You Bite ou la classe soulful baroque de When Are We Gonna Get It Together) façonné par Damu via son talent inné pour la construction d’une ambiance et d’un beat avec un minimum de moyens pour un maximum d’effet."


5. Homeboy Sandman & Edan - Humble Pi (2018) - aka les deux nerds en photo de cet article !

"La tarte est fameuse, on l’aurait aimée plus copieuse, mais pour un retour aux fourneaux du génial Edan 13 ans après son chef-d’œuvre de hip-hop psychédélique aux effluves vintage Beauty and the Beat, que demander de plus ? Accoquiné avec Homeboy Sandman, cousin de flow capable du même genre de diatribes jouissives et décalées sur le tube #NeverUseTheInternetAgain, Edan produit l’ensemble et lâche quelques versets au détachement bienvenu. Les deux ricains se sont bien trouvés, en observateurs un peu branleurs de notre humanité déchue à travers le prisme aquatique et drogué d’une piscine remplie de LSD. Il y a ainsi les tranches de vie urbaines de Grim Seasons, le darwinisme à rebours du final Evolution of (sand)Man, nos ambitions tuées dans l’œuf par l’inertie du quotidien sur le folky That Moment When... et la vie par procuration des accrocs aux réseaux sociaux et aux achats en ligne donc, internet ce fléau que les compères tentent d’éliminer à la source dans le clip de #NeverUseTheInternetAgain, typique d’Edan."


6. Seez Mics - Cruel Fuel (2014)

"Cruel Fuel, c’est d’abord le flow charismatique de Seez Mics, son goût d’un hip-hop ultra-métissé qu’on croyait perdu depuis la grande époque d’Anticon et ses chansons introspectives réveillant les démons que d’aucuns auraient préféré laisser engraisser au placard, quitte à leur abandonner l’ascendant sur leur vie. Mais Cruel Fuel, c’est aussi et surtout le tour de force d’un certain Max Bent, producteur de l’ombre qui réalise l’intégralité des instrus de l’album avec pour principal instrument... sa voix ! Un travail de beatbox tellement porté sur l’abstraction qu’on ne le remarque pas immédiatement, si ce n’est pour ces nappes de chœurs hantés qui enveloppent le disque de leur aura mystique, à l’aune des mantras existentialistes du MC. Du grand art, boosté par un premier tiers de disque particulièrement fameux."


7. Moor Mother - Analog Fluids Of Sonic Black Holes (2019)

"Cinématographie hallucinée (Repeater, ou l’impressionnant Shadowgrams) et collages fantasmagoriques et abrasifs (Engineered Uncertainty, Sonic Black Holes) côtoient noise torturée (Don’t Die, LA92), ambient habitée (The Myth Hold Weight, Cold Case) et techno-ragga d’un infernal bayou d’esclavagistes (After Images) sur ce 4e opus de Moor Mother, tandis que même Black Flight avec Saul Williams en narrateur militant s’avère être un véritable ovni musicalement parlant. Hanté par les fantômes de l’histoire afro-américaine (Passing Of Time), brassant féminisme, black power et charges virulentes contre le consumérisme, Analog Fluids Of Sonic Black Holes est comme son nom l’indique un véritable trou noir philosophique où toutes les angoisses de son auteure se télescopent, créant au passage quelques monstres qui nous hanteront bien au-delà de cette année 2019."


8. Monsieur Saï - La guerre ne fait que continuer (2015)

"Le rappeur et producteur manceau nous en met plein les nerfs, plein la conscience, plein les tympans surtout avec ce brûlot qui le voit déléguer une partie des instrus aux compères O.S. de La Mauvaise Humeur (l’ultra saturé et tous riffs dehors Qui nous protège de nos protecteurs ?), Le Crapaud & La Morue (le minimaliste Homme sandwich tout en tension larvée à l’image de son texte), Pierre The Motionless (le fiévreux La sagesse ne viendra jamais) et autre Rico des Cornershop Beatmakers (l’ethno-boom-bap des tout aussi martiaux Peu de gens le savent et Le pendu et l’esclave). Quant au fidèle Arth ?, il laisse traîner son saxo désabusé sur l’appel aux armes de Dernier verre avant la guerre pour mieux le torturer ensuite sur un 65 millions de grimaces acrimonieux à souhait puis nous en marteler les conduits auditifs en mode jazz-indus sur Caféine, triplette de prods rageuses en ouverture sur lesquelles Monsieur Saï laisse libre cours à son envie de passer la tiédeur ambiante au micro-ondes jusqu’à l’implosion."


9. Wolves - Wolves (2013)

Vous jugerez par la playlist qui vous attend plus bas et où l’on retrouve notamment Wordbuglar featuring More Or Les, Chokeules, Swamp Thing (aka ce dernier avec Timbuktu et le producteur Savilion), Ghettosocks ou encore The Library Steps, le projet de Jesse Dangerously : la galaxie Backburner rayonne sur ma décennie de hip-hop. Souvent laissée pour compte, cette unique sortie des loups de Toronto (soit Ghettosocks et Timbuktu au micro rejoints par D-Sisive et Muneshine, le tout produit par l’excellent Bix) en est peut-être l’astre noir, un attribut trop réducteur toutefois puisque comme souvent avec le collectif canadien et ses multiples ramifications, Wolves s’avère aussi truculent que tendu. Moins second degré dans l’épouvante que l’Halloweenesque Swamp Thing mais tout aussi cinématographique et décalé, (un peu) moins nerdy que Teenburger ou Twin Peaks (hommage à la série du même nom qui réunit Ghettosocks et Muneshine justement, avec les potes en guests), moins décontracté du spliff que Toolshed, le disque est un petit bijou d’équilibre à la façon des deux LPs de Backburner dont il perpétue le dynamisme irrésistible, avec ses productions à la croisée du boom bap et du post-modernisme émaillées de samples hommages au meilleur du cinéma bis et du hip-hop ricain qu’on aime (le Wu-Tang prenant cette fois le dessus sur les Beastie Boys), les flows complémentaires de la crème des MCs alt-rap de l’Ontario, un soupçon de soul et ces accents baroques un peu partout. A découvrir d’urgence !


10. ECID - HowToFakeYourOwnDeath (2017)

"Il manquait toujours à Jason Mckenzie un vrai magnum opus, un truc puissant et intelligent, épuré et percutant, cool et ténébreux, mélangeur et idiosyncratique à la fois qui laisserait une trace sur le hip-hop des années 2010. Bonne nouvelle, avec ses lignes hypnotiques de basses/beats ultra-deep et de guitares lo-fi, ses arrangements électro clairs-obscurs évoquant Restiform Bodies, ses mélodies rappées/chantées dignes du Why ? d’antan, ses samples vocaux baroques à souhait et un storytelling aussi jouissif de nonchalance affichée que touchant d’humanisme sous-jacent, HowToFakeYourOwnDeath, blindé de tubes underground en puissance (Placebo fx, Grieving Mantra, Breaking Up With Death et Guru en tête), parvient à sonner dans le même temps comme la quintessence de la disco du MC et producteur alt-rap ricain et l’héritage le plus crédible d’un label Anticon aujourd’hui moribond."


11. Beans - Ace Balthazar (2019)

"Il me faut remonter à End It All chez Anticon avec ses collaborations transgressives lorgnant sur la pop expérimentale et l’électronique pour trouver un album de Beans qui m’emballe à ce point. Ace Balthazar est parfaitement pensé, à la fois le plus accrocheur et le plus défricheur de ses quatre sorties pour Hello.L.A., du requiem d’ouverture Bigfoot In The Big City au nébuleux Sun James Ra Brown en passant par un Nkoloso radical et fantasmagorique digne de Thavius Beck, l’inquiétant Julian Lives On The Roof, le hit porno-friendly Midnight Caller et bien sûr le sublime Birds Born In A Cage View Flying As Illness évoquant les grandes heures d’UNKLE feat. DJ Shadow ou de Massive Attack."


12. Ghostpoet - Peanut Butter Blues & Melancholy Jam (2011)

"L’hypnotisme syncopé du dubstep, les synthés ténébreux du grime, des programmations électroniques nébuleuses, un soupçon de guitares new wave, quelques emprunts rythmiques à l’eskibeat de Wiley dans ses passages les plus impétueux, un flow aux rondeurs nonchalantes proche de celui de Roots Manuva... Ghostpoet aurait pu n’être qu’une sensation de plus dans le petit monde de l’électro/hip-hop d’outre-Manche, s’engouffrant dans les sillons tracés par d’autres à la manière de Dizzee Rascal ou plus récemment de Dels dont la dimension pop n’aura pas transcendé grand chose sur la durée. Et pourtant c’est à une véritable refonte du UK Garage et même du trip-hop de Tricky ou Massive Attack que s’est attelé le Londonien avec ce premier opus, replaçant le spleen et l’atmosphère au centre des débats sans rien sacrifier à la flamboyance d’un songwriting à la fois épique et moelleux qui a su se fondre à la perfection dans ces productions sombres et néanmoins accueillantes."


13. Dälek - Asphalt For Eden (2016)

"En dépit du remplacement d’Oktopus, Asphalt for Eden poursuit sur la lancée du relatif adoucissement entamé sur Gutter Tactics avec des productions toujours hypnotiques et anxieuses mais bien plus vaporeuses que du temps des larsenisants From Filthy Tongue of Gods and Griots ou surtout Absence. Un comble pour le groupe de hip-hop le plus harsh de l’histoire de sortir chez Profound Lore, label metal extrême, son disque le plus downtempo et planant, car si les bourdonnements sont encore bien présents, ensevelissant le flow de Will Brooks sur l’ultra-dense Masked Laughter (Nothing’s Left), ils se font ici presque propices au rêve (jusqu’à la prévalence de l’instru sur le flow incarnée par un 6dB purement musical), une réinvention qui parvient ainsi à surclasser la redite en léger déclin de l’opus précédent. Il faut dire que Brooks aka MC Dälek ne s’était jamais vraiment contenté de tenir le micro (ce qu’il fait toujours avec une belle opiniâtreté sur le militant Control ou en particulier sur Critical, dernier vestige martial et corrosif de l’album) et que ses tentatives solo sous le pseudo iconAclass semblaient déjà vouloir renverser la vapeur d’une trajectoire d’oppression sonique poussée dans ses derniers retranchements du temps du génial Abandoned Language."


14. Thavius Beck - Technol O.G. (2017)

"Renaissance pour le beatmaker de Los Angeles, Technol O.G. monte encore d’un degré dans ce futurisme que Dialogue continue d’incarner pour tout un versant électronique et abstrait du hip-hop d’aujourd’hui, sûrement inspiré par la vitalité de Brooklyn, New-York où il s’est récemment installé. Les deux gros morceaux que sont Spectacular Vernacular et Further From The Truth donnent le ton : hypnotisme techno-dub-hop deep et dark quelque part entre Massive Attack et Captain Murphy pour le premier, rouleau-compresseur glitch maximaliste et dystopique pour le second, difficile de se remettre de ces claques initiales et de toute façon Thavius Beck ne nous en laissera pas le temps. De missives ultra-condensées en uppercuts rappés à toute allure sur fond de polyrythmies déchaînées, Technol O.G. symbolise la déshumanisation paradoxalement grisante des mégapoles modernes et des sociétés virtuelles où tout va trop vite pour vraiment accrocher la rétine et encore moins les neurones."


15. Ed Scissor + Lamplighter - Tell Them It’s Winter (2016)

Meilleure sortie du label anglais High Focus qui allait s’imposer comme la référence absolue du hip-hop anglais des années 2010 (entre Strange U, Ocean Wisdom, Jam Baxter, The Four Owls, Onoe Caponoe ou Mr. Key & Greenwood Sharps, il y a du beau monde au bataillon), Tell Them It’s Winter c’est l’accord parfait entre le spleen hivernal, parfois japonisant, des instrus épurées à haute teneur acoustique (piano, cordes, vents et même guitare folk sur le fleuve Detours) d’un Lamplighter qui pourrait sortir tout droit de feu l’écurie Decorative Stamp, et du spoken word méditatif, affligé mais jamais plombé d’Ed Scissor aka Edward Scissortongue. Le génial Light Round Here, écrit dans le Jardin du Luxembourg, a fini très haut dans le top des morceaux à retrouver plus bas avec ses faux-airs de Christ. ou Boards of Canada.


16. Cult Of The Damned - Part Deux : Brick Pelican Posse Crew Gang Syndicate (2018)

"Le collectif anglais du label Blah Records, emmené par le truculent Lee Scott, regroupe une quinzaine de MCs et de producteurs dont l’excellent Bisk qui tient un peu des deux casquettes. Irrésistible, ce premier long-format du crew, successeur d’un EP sorti en 2015, a tout de la brillance des débuts d’Anticon : un univers sombre et ludique à la fois, des personnalités complémentaires et bien affirmées au micro, la contrebasse malaisante de Part II avec son atmosphère à la Sixtoo, les manipulations électro-acoustiques d’un From The Depths évoquant Alias du temps des So-Called Artists, les arrangements et bourdons insidieux du single Civilized, la glauquitude éthérée et lo-fi du final Bad Card... et surtout une identité à part, anti-conformiste sans être élitiste, désabusée sans jamais tomber dans le plombant, mélangeuse et minimaliste. Pour autant, Cult Of The Damned n’en reste pas moins profondément ancré dans son Angleterre de prolos gouailleurs et nerdy en proie à un quotidien aliénant, une bande de potes unis pour affronter l’absurdité de leur environnement."


17. Ichiban Hashface - Wolf Vs Snake (2017)

"La pochette crépusculaire annonce la couleur, sang (mêlé de larmes en l’occurrence) et patine du passé, allégorie d’un conflit intérieur "à une époque critique de ma vie" nous dit Ichiban Hashface. Comme à l’accoutumée, ces réminiscences prendront la forme d’une épopée dans le Japon des samouraïs et encore plus que d’habitude les cendres du temps et la rigueur d’un hiver sans fin s’enlacent pour engourdir le cœur de l’auditeur, entre froideur d’un beatmaking aussi désincarné que le flow exsangue du MC et tristesse lancinante des boucles souffreteuses et déliquescentes, samples de synthés vintage (Universal Law), de violons crève-cœur (le sommet Isolation ou encore Pack of Wolf), de piano tragique (War Inside the Mental, Snake Jump) ou même de bossa cafardeuse (Guard Ya Meal et surtout The Food Got Poison In It !, entre fatalité et tendresse pour les âmes brisées) vous tirant un peu plus le moral vers le bas à chaque instant sans jamais vraiment donner le coup de grâce, jusqu’à la rédemption finale et inattendue d’un Heavy Rain liquide et onirique où le flow d’Ichiban semble progressivement reprendre vie."


18. Genghis Khan - Her Absence Is My AntiChrist (2016)

"Rappeur et producteur (ici en tant que moitié du duo The Gemini Lounge), Genghis Khan nous sert un troisième opus en 8 ans qui donne dans le minimalisme urbain des bas-fonds, cinématographique, oppressant, angoissant voire carrément horrifique en vidéo, du genre qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus, un peu comme ce malaise qui vous étreint lorsque vos certitudes les plus vertueuses vous trahissent pour laisser place au ressentiment, à la dépression voire à la haine, de l’Autre d’abord, puis de soi. Cette crasse de l’âme post-rupture, l’Américain l’embrasse, de méditations sur les abîmes de la nature humaine - tirées du noir profond par un halo de voix féminine forcément plus spectral que salvateur (le bien-nommé Human Nature) - en ruminations rampantes comme un bon vieux Tricky malaisant des 90s (Larva) en passant par des clins d’œil au sadique du ciné nippon Takashi Miike (bourrasques abrasives façon Dälek à l’appui) ou au trip-hop ténébreux des Sneaker Pimps (Maybe There’s Hope Afterall). Et de son flow ou des beats boom-bap qui claquent et résonnent sur les os comme un tabassage à coups de batte au fond d’une ruelle sombre, on ne saurait dire ce qui fait le plus de dégâts sur les denses et impitoyables Hard Boiled et Hellbound or Heavensent."


19. John E Cab - Do What They Say (2014)

"Rappeur, producteur et instrumentiste accompli (notamment au violon) qui côtoie au sein du collectif philadelphien US Natives l’excellent Ill Clinton, John E Cab aura mis 7 années à se livrer ainsi, à mettre en son les petites joies et surtout les grandes douleurs qui parsèment son parcours d’artiste et sa trajectoire d’être humain, à faire le deuil de son frère décédé en couchant sur sillons les émotions contradictoires et les sautes d’humeur, parfois avec l’aide de mots, parfois dans un maelström de sentiments changeants auxquels seule la musique pouvait rendre justice. Ainsi, bien que le flow résolument alt-rap de l’intéressé finisse par s’imposer sur les morceaux les plus faussement décontractés du disque, de l’anxieux The Night Shift au désespéré As Separate Worlds Collide dont le titre pourrait faire figure de manifeste pour ces télescopages musicaux à nul autre pareil, l’aventure est ailleurs et il nous faudra bien quelques dizaines d’écoutes pour explorer toutes les facettes de ce chef-d’œuvre étonnamment facile d’accès au regard du foisonnement d’idées dont il fait preuve."


20. 7’Rinth - The Shinjukan Spiral (2019)

"On se languissait d’une suite au superbe Multiple Armz, le 7rinth ne s’est pas moqué de nous avec un condensé du genre de productions cafardeuses et gondolées dont il a le secret, sous forte influence nippone cette fois-ci, des voix d’animés du candide Confessionz ou du baroque Hyper Fox Attack en mode Non Phixion de la crypte, aux références SF de Lord in a Mech où il est question de robots de combat (les fameux mechas des mangas) et du Neo Tokyo dAkira. C’est toujours aussi tranchant et tire-larmes à la fois grâce à un sens du sample triste inégalé (Blindfolded City), le flow du New-Yorkais contrastant avec ses instrus de carrousel affligé (Naginata Dreamz, Shinjukan Spiral) entre deux morceaux plus tendus."


21. jamesreindeer - مدينة الياسمين - The City Of Jasmine (2014)

"Dans la continuité de son album Six Six Seven de l’année précédente dont il décline la pochette noire de suie en un gris anthracite parfaitement raccord avec la tonalité générale de ces chroniques du front partagées entre mélancolie, désolation et mystique malaisante, The City Of Jasmine ça n’est plus complètement du hip-hop, encore moins que son prédécesseur sans doute tant ce disque enregistré durant les sessions de répétition du rappeur et musicien anglais pour un festoche allemand laisse les sombres instrus arabisants aux incursions jazz névrotiques, les field recordings lancinants façon Iron Filings And Sellotape et autres samples hypnotiques de chansons moyen-orientales amener à leur climax les charges martiales de son flow habité."


22. Jel - Late Pass (2013)

"Un peu à la façon de son compère Alias avec l’excellent Fever Dreams, Jel dynamite son background abstract en furetant du côté de la beat scene californienne (fabuleux Look Up), juste retour des choses lorsque l’on sait tout ce que l’électronique et le hip-hop de la Bay Area et des voisins de LA doivent aux transgressions d’Anticon et de ses deux beatmakers phares en particulier. Des accents bass music aux contours psyché donc, mais aussi des gimmicks mélodiques et une patte saturée reconnaissables entre mille (le dub narcotique du parfait Late Pass en ouverture flirtant presque avec Odd Nosdam), un retour au micro mode spoken word classieux pour notre as de la MPC et pas mal d’influences old school, ce premier LP depuis Soft Money en 2006 étant fort justement envisagé par l’homme de l’ombre de Subtle, Themselves et 13&God comme une rencontre anachronique entre l’hypnotisme mystique de Can, le post-modernisme de Beck et les fulgurances noisy du Bomb Squad de Public Enemy sur fond de boom bap sinueux."


23. Ill Clinton - The Illvolution (2014)

"Atmosphères entêtantes et flows acérés, The Illvolution ne révolutionne pas le hip-hop mais lui rend un peu de la coolitude malade et de la flamboyance plombée des regrettées années 90. Boom bap qui sonne et gimmicks à la Morricone se côtoient dans les prods d’Ill Clinton, le maître de cérémonie qui pour le coup est aux manettes à la tête d’une quinzaine de MCs plus ou moins méconnus de son entourage de Philly, sur fond de cuivres vénéneux, d’échappées oniriques et autres bandes-sons de B-movies stylés."


24. La Mauvaise Humeur - La Mauvaise Humeur (2012)

"Si on m’avait dit que le meilleur album hip-hop de 2012 serait français, j’aurais d’emblée misé une pièce sur Monsieur Saï, associé ici à son compère le producteur OS pour un précis de storytelling désenchanté aux atmosphères sombres et cinématiques nourries au jazz ou au post-rock... voire au metal sur Le canapé. La Mauvaise Humeur impose sa différence à défaut d’une rupture franche : toujours pessimiste mais plus introspectif, toujours sombre mais plus posé, marqué par les ambiances de films noirs dans la continuité de certains morceaux de Soigne Tes Blessures mais avec une ambition accrue en terme de cohérence musicale et thématique, ce qui n’empêche pas le duo manceau de faire le grand écart entre métaphores d’un quotidien grisâtre, chroniques schizophrènes (Mademoiselle La Mouche) et fables SF épiques (La main de Joe, formidable épopée futuriste à la Blade Runner) avec une classe inégalée."


25. Blueprint - Respect The Architect (2014)

Le parfait exemple du classique en devenir qui s’impose au fil des ans par son évidence, son ambition et sa parfaite concision, entre déconstruction du sampling soulful à mi-chemin de DJ Premier et de J Dilla (Oh Word, Overdosin’, Once Again), petites épopées néo-blaxploitation (Respect the Architect, Bulletproof Resume) et pure grâce mélodique (Silver Lining, The Climb). Passé par Rhymesayers avec plus ou moins de succès (Adventures In Counter Culture fut même une franche déception me concernant), l’ex-affilié Def Jux et compère de RJD2 (remember Soul Position) s’est désormais réfugié sur son propre label Weightless Recordings où traîne également l’excellent Illogic, et continue d’y délivrer des sorties de qualité, même si rien jusqu’ici n’est venu tutoyer les sommets d’écriture du fabuleux Perspective, ode gospel à la tolérance, à l’empathie et au respect d’autrui dont les lyrics et leur exécution m’ont régulièrement collé des frissons comme peu de morceaux ces 10 dernières années.


26. Open Mike Eagle - Brick Body Kids Still Daydream (2017)

"Les HLM qui ont vu grandir le natif de Chicago retrouvent visage humain sous la plume intello cool du Californien d’adoption, des trombines d’enfants aux yeux pleins de rêves et de geeks de l’alt-rap aux visions bien trop larges pour rester enfermées longtemps entre quatre murs de béton, super-héros ordinaires du tubesque Brick Body Complex animé par un bestiaire qui brandit sa différence telle un étendard. En surplomb des beats trap dégraissés et des basses massives, la douce vélocité du flow smooth et les synthés pastel aux distos oniriques équilibrent les forces, une balance qui penche davantage sur l’ensemble du disque vers la bienveillance des syncopations éthérées ou jazzy, à l’image du tout aussi magique Daydreaming In The Projects, cuivres affables en avant sur le refrain, ou du merveilleusement réconfortant et cristallin 95 Radios, "entre P.M. Dawn et Sun Ra" ponctue l’intéressé."


27. Loop Minded Individuals - A Hitchhiker’s Guide To A Verse (2014)

Le label I Had An Accident était décidément très inspiré côté hip-hop en cette année 2014 puisque après John E Cab ou encore Ill Clinton dont on retrouve ici l’excellent complice Andrew Milicia et ce goût marqué pour les atmosphères à la fois sombres et décontractées du hip-hop new-yorkais de la seconde moitié des 90s, c’est le collectif du Connecticut Loop Minded Individuals qui multiplie les classiques instantanés sur cette sortie rendant hommage en VO à l’humour métaphysique du fameux Guide du voyageur galactique, un crew qui n’est pas sans rappeler la nébuleuse Backburner pour cette capacité à insuffler truculence et virtuosité à leurs petits hymnes mystico-urbains aux versets hypnotiques, entre deux refrains au groove addictif (A Hitchhiker’s Guide To A Verse, Best In Show, Loop Minded).


28. Tha Connection feat. Roc Marciano - Strive : The Album (2013)

À la lumière d’une superbe reprise de Shook Ones (Part II), claire-obscure, lo-fi et tristounette à souhait, du parfait Warm Hennessy ou encore du ténébreux et gritty God’s Grain avec son sample idéal du génial A Divine Image de David Axelrod, on découvrait à l’orée des années 2010 les potentiels héritiers de Mobb Deep, la finesse de samples pianistiques au spleen jazzy en sus (Funktions, The Recipe). Malheureusement, la collaboration du New-Yorkais Hus Kingpin, qui semble avoir réveillé son label Digi Crates en 2019 après 5 années de hiatus (on lui doit également l’an dernier le très chouette Slim Wave), et de son compère SmooVth ne s’était renouvelée depuis que par intermittence par singles et mixtapes interposés et c’est finalement Roc Marciano, discret ici, qui avait le mieux su tirer son épingle du jeu suite à la sortie de ce Strive... mais qui sait, les années 2020 pourraient bien renverser la donne, ça vient de commencer en tout cas avec The Connect Tape où l’on retrouve les deux lascars sous leurs blazes respectifs et bien que plus produit ça reste urbain à souhait et surtout très très bon, presque stellaire à la Cannibal Ox dans la lignée d’un morceau comme Realness ici.


29. Glass Cutters - Glass Cutters (2019)

"Joji Kojima, Martin Carlos Ward et Jel en personne se partagent le micro sur cette collection de brûlots rap lo-fi produits par ce dernier et son compère des grandes heures d’Anticon, Odd Nosdam. Syncopés, lourds et saturés, parfois hantés de flows pitchés comme un Captain Murphy du ghetto (A Warm Welcome) ou délicieusement ascentionnels et mystiques dans la lignée de ce que fait justement Odd Nosdam en solo, ces instrus multiplient également les clins d’oeil aux 90s qu’on aimait (les groovesque This God et Mama Said) mais ne sont finalement jamais meilleurs que dans le sismique et le narcotique, flirtant avec le Deadverse Massive de Dälek et compagnie sur l’opaque Supanova pour en terminer sur un No Metal aux accents soul malmenés par un beat grondant et sans concession."


30. The Doppelgangaz - Hark (2013)

"Duo désormais incontournable de la scène new-yorkaise, Matter Ov Fact et EP ont fait court et concis mais surtout furieusement ludique et classieux avec ce Hark qui fait rimer cool et rugueux, sinistre et lumineux, et dont les humeurs nous prennent sans cesse à contrepied. Un peu comme si les Gravediggaz avaient eu l’idée saugrenue de croiser le fer avec Atmosphere, et si Barbiturates ou Smang Life cèdent de trop à l’appel du smooth, des titres tels que Skin Yarmulke, Hark Back, Oh Well ou encore Sun Shine se joueront à n’en pas douter des ravages du temps."


11 EPs à ne pas laisser passer



1. Genghis Khan (Red Lotus Klan) - Friday Night Fright (2016)
2. Monsieur Saï - Première Volte Digitale (2014)
3. Sole - Mansbestfriend Vol. 5 (2011)
4. Cryptic One - The World According To
5. Mr Key & Greenwood Sharps - Green & Gold (2019)
6. Blu & Fa†e - Open Your Optics To Optimism (2016)
7. Strangelove - EP 2 (2018)
8. Mestizo and The Heavy Twelves - Big Bad Death (2018)
9. Crimeapple - Viridi Panem (2019)
10. Devenny X ฬเןl - Arc II : The Remains (2014)
11. Pruven & Vast Aire - 777 Volume 1 (2018)



Mes 101 morceaux hip-hop 2010-2019







Bonus aux airs de number one, impossible à playlister pour cause de contenu copyrighté (merci Univers Sale et You Teubé) :


Le récap des titres des 5 playlists ci-dessus :

- #1-20 + 1 :

(Beastie Boys - Here’s A Little Something For Ya)

The Doppelgangaz - Oh Well
Dabrye - Pretty (feat. Jonwayne)
Ultra Magnus & DJ SLAM ! - Criddown (feat. Dan-e-o)
Herma Puma - Beneath The Sea (feat. Elemental)
Cashus King - You Are What...
Insight & Damu The Fudgemunk - All Human
Czarface & Ghostface Killah - Powers and Stuff
Backburner - In The Place (feat. Rift & The Mighty Rhino)
Vas x Ill Clinton - Blood of Issac
Open Mike Eagle - Brick Body Complex
Beans - Birds Born In A Cage View Flying As Illness
Ecid - Placebo FX
Blueprint - Perspective
Seez Mics - Become A Ghost
The Library Steps - Nothin Fri3ndly (feat. More Or Les, Wordburglar, Swamp Thing, The Mighty Rhino & Ghettosocks)
Monsieur Saï - La Loge Blanche
AbSUrd. - Thin Air (feat. Bleubird)
Loop Minded Individuals - A Hitchhiker’s Guide (feat. ESH The Monolith, Intrikit & Zac Galen)
Arms and Sleepers - Hollow Body Hold (feat. Serengeti)
7’Rinth - Dnt Od Nera

- #21-40 :

Ocean Wisdom - Don
Shirt - Take Off
Ghostpoet - Run Run Run
Whitefield Brothers - The Gift (feat. Edan & Mr. Lif)
Tachichi - Light Skin (for the Win) Remix
Rocé - Mon crâne sur le paillasson (feat. Sparo)
Jam Baxter - For a Limited Time Only
Pruven & Vast Aire - Cold Current
Homeboy Sandman & Edan - #NeverUseTheInternetAgain
Necro - Howard Stern
Ed Scissor + Lamplighter - Light Round Here
Scvtterbrvin - Luxury Ambulance (prod. Aki Kharmicel)
Kaigen x Shing02 - Jikaku (Odd Nosdam version)
Cryptic One - Get Off My Lawn
Unsung - Bowl of Honeydew
Touch - Great Sage Equalling Heaven
Ichiban Hashface - Isolation
Lucha Lonely - Gold Bangles
Melodica Deathship - 1803
La Mauvaise Humeur - La Main de Joe

- #41-60 :

Why ? - Jonathan’s Hope
Run The Jewels - Stay Gold
La Main Gauche - Ni le même, Ni un autre
Public Enemy - Get Up Stand Up (feat. Brother Ali)
Thavius Beck - Further From The Truth
Illogic & Blockhead - Capture the Sun (feat. Slug of Atmosphere)
Epic Beard Men - You Can’t Win (2013)
Zone Libre Vs Casey & B.James - Aiguise-moi ça
Dope KNife - Basic Instinct (feat. Bero Bero)
Janelle Monáe - Tightrope (feat. Big Boi)
Dels - Trumpalump (feat. Joe Goddard)
Andrew Milicia - Back In The Day (prod. Ill Clinton)
Dr. Octagon - Operation Zero
YN - Nègre
Genghis Khan - Hellbound or Heavensent
Boxguts & Jakprogresso - Brazilian H (feat. Scvtterbrvin)
DJ Shadow - Nobody Speak (feat. Run The Jewels)
Skid Row - You Soooo Much
Le Parasite - Chaos Technique (feat. Le Sept)
Genghis Khan (Red Lotus Klan) - Chad

- #61-80 :

Chokeules - Welcome
Raashan Ahmad - The Remedy (feat. Chris Karns aka DJ Vajra)
Birdapres - Show No Flair (feat. John Smith)
Jungle Brown - Wicked (feat. Fliptrix)
Wiley - Wise Man and His Words
Gang Starr - Family and Loyalty (feat. J. Cole)
Baralarm - Baralarm Back Now
L’Orange & Kool Keith - The Wanderer
Wolves - Shum Shum
Swamp Thing & Ghettosocks - Ayahuasca
Tha Connection - God’s Grain (feat. Rozewood)
Darc Mind - Don’t Stop
Wordburglar - Rhyme O’Clock (feat. More Or Les)
Mr Key & Greenwood Sharps - Chapada Diamantina
Zippo - i-monde
Zonal - System Error (feat. Moor Mother)
Cult of The Damned - Part Deux
Open Mike Eagle & Paul White - Protectors of the Heat (feat. Hemlock Ernst)
Sole, Jared Paul, Kaigen, Greencarpetedstairs & Leif Kolt - The Great Deluge
Sage Francis - The Best of Times (feat. Yann Tiersen)

- #81-100 :

Azeem - The Comet
Mestizo and The Heavy Twelves - Hell Therapy
Crimeapple - Dead Gringos
Triune Gods - Stacks on Stacks on Stacks on Stacks
Low Pass Filter - Adèle
Angerville - Ain’t No Thang
REiNDEER667 - Bava Argento Deodato / About to SPRAY you OUT
Mr. Muthafuckin eXquire - The Last Huzzah ! (feat. Despot, Das Racist, Danny Brown & El-P)
Billy Woods - Fool’s Gold (feat. Open Mike Eagle, Moka Only & Elucid)
Bleubird - Giehe 1977
Swordplay & Pierre the Motionless - 64 Bit Remix
The Streets - Soldiers (feat. Robert Harvey)
Curtis Plum - Indie Rocker
Strange U - Bullet Proof Mustache (feat. Lee Scott)
Captain Murphy - Mighty Morphin Foreskin
Hardcore des Alpes - Polarisé
Ghostface Killah - Homicide (feat. Nems & Shawn Wigs)
Strangelove - Joni (feat. Bellatrix)
Aesop Rock - Zero Dark Thirty
Hus Kingpin & Rozewood - Tokyo Dreamin’


Mes crews/rappeurs/producteurs de la décennie


... ou tout simplement ceux que j’ai eu le plus de plaisir et de passion à suivre sur l’ensemble de leurs sorties ces dix dernières années :


- le crew Backburner
- Beans
- Ill Clinton
- jamesreindeer
- les vétérans d’Anticon Jel & Odd Nosdam
- L’Axe du Mal
- Moodie Black
- Monsieur Saï
- Open Mike Eagle
- Scvtterbrvin & Red Lotus Klan
- 7’Rinth
- Strangelove
- Unsung
- Billy Woods & Elucid (Armand Hammer)
- Adrian Younge