Le streaming du jour #1915 : IRM presents - ’IRMxTP Part XIV - Red Room (The Evil in These Woods)’

Radiations ténébreuses et digressions surréalistes émaillent ce 14e volet - l’avant-dernier à voir le jour - de notre hommage lynchien. Et pour cause, après en avoir chassé l’entrée au gré d’une échappée nocturne dans les méandres inquiétants de la forêt de Ghostwood (sur le volume 13, à télécharger ), c’est dans la fameuse Loge Noire habitée par les étranges entités démiurges présidant aux destinées des habitants de Twin Peaks que l’on atterrit enfin.

"Where we’re from, the birds sing a pretty song and there’s always music in the air" déclarait Mike le Petit Homme Venu d’Ailleurs à l’agent Cooper lors de sa première visite, en rêve, de cette intrigante dimension parallèle, avec cette drôle de diction déformée par effet d’inversion. Fidèle à cet espace mythique au parquet zébré de noir et de blanc et aux épais rideaux de velours rouge que berce une lumière tamisée, Red Room (The Evil in These Woods) agrège ainsi dans un flot d’atmosphère parfaitement homogène certaines des contributions les plus oniriques et déconcertantes, bouillonnantes et mutantes, reçues dans le cadre de notre projet. Une cohérence qui doit beaucoup au mastering d’Anatoly Grinberg aka Tokee, merci à lui (ou plutôt merci encore), ainsi qu’à Philippe Neau - croisé en tant que nobodisoundz sur le volet précédent - pour son artwork rougeoyant et vertigineux.

On y passe en effet du coq à l’âne ou plutôt du cheval pâle au hibou Grand-duc, de la pureté du rêve au cauchemar le plus macabre, parfois au sein d’un même morceau, comme sur The Man From Another Place du Britannique Chris Weeks où un orgue éthéré côtoie bourdonnements ténébreux et interférences aux grouillements angoissants. Ces derniers font écho au bouillonnement lovecraftien des Ricains Caulbearer (Sometimes My Arms Bend Back), monstrueux linceul drone dont tente de s’extirper la voix torturée de Laura, tandis que les beats martiaux de Terminal 11, pervertis par les harmonies irréelles de Lana Del Rabies, semblent répondre à la progression post-rock tout aussi fantasmagorique qui ouvrait cette Part XIV dans la tension des drums métronomiques et saillies électriques du duo parisien 2kilos &More - un morceau dévoilé il y a pas mal de temps déjà et clippé à l’époque par l’inimitable Nicotine :

Back to Twin Peaks | Is it future ? Or... Is it past ? from Nicotine on Vimeo.


Cette construction en miroir, illustration du vertige provoqué par les lieux, est une constante sur ce volet, de l’électro gothique aux réminiscences de musique sacrée du Roumain LeVant (My Dwarf Stole Your Silence) au downtempo clair-obscur tout aussi spirituel et cinématographique du Lyonnais Grosso Gadgetto (Meanwhile, morceau à tiroirs par excellence), de l’ascension dronesque abrasive et mystique du Brésilien Gimu (The Vertical Plane) à l’incandescence souterraine de son antithèse et néanmoins cousin #0490 (Deceptive Promptings) signé par le Polonais Cezary Gapik, du lascif Dance Of The Dream Man (Audrey’s Dance Variations) des Chevrons de Matt Christensen enfin (dernier des quatre interludes que nous a offert le quatuor tout au long du projet) à l’également jazzy, faussement easy-listening et vraiment narcotique A Damn Fine Cup of Coffee de l’Autrichien Richard Kapp (rappelez-vous... le final de la saison 2) :


Même la bizarrerie de notre invité de dernière minute Peter Because, véritable musique de foire à la gloire de la folie des esprits de la Loge, n’est pas sans évoquer pour ses blips cristallins les fréquences cliniques et insidieuses du bien-nommé Cristal des Portugais Sturqen. Quant à la conclusion, reprise électrique du thème de la fameuse Pink Room du film Fire Walk With Me par le duo belge Mars In Hell (un passage qui avait déjà inspiré Mei sur notre volume VII), on ne pouvait rêver mieux que son ambient-rock oppressant et drogué pour étirer sur plus de 10 minutes cette sensation de purgatoire sans fin qui tourmente l’agent Cooper lorsqu’il s’enfuit de pièce en pièce, dans une boucle cauchemardesque, jusqu’à se poursuivre lui-même.

A télécharger librement ici, et en écoute ci-dessous :