Loney Dear - s/t
Certaines pauses interviennent sans prévenir. En 2011, alors qu’il venait de signer un Hall Music moins indispensable que les chefs-d’oeuvre Loney, Noir et Dear John, nous n’imaginions pas devoir attendre six ans avant de découvrir un nouveau disque du Suédois. Il faut dire que, de 2004 à 2011, Emil Svanängen s’était montré particulièrement prolifique en dévoilant six longs-formats.
1. Pun
2. Humbug
3. Hulls
4. Sum
5. Lilies
6. Little Jacket
7. Isn’t It You
8. Dark Light
9. Harbours / Harbors
10. There Are Several Alberts Here
Qui dit nouveau départ ne dit pas nécessairement rupture. Et le Suédois repart sur les mêmes bases à l’occasion de ce nouveau LP. La meilleure preuve de cette continuité revendiquée par l’artiste réside dans le titre homonyme de l’album.
Sur Loney Dear, quelques oiseaux s’agitent, et c’est immédiatement la voix du Suédois, accompagnée de quelques accords binaires au piano, qui s’offre à l’auditeur dès le Pun initial. Loney Dear n’a rien perdu de son lyrisme et de sa capacité à se répondre à lui-même, faisant varier les plaisirs autant que les intonations vocales. Au bord de l’explosion, la progression du titre est impeccable, et tout finit par s’agiter à l’exception d’une rythmique qui maintient son débit downtempo et sa mesure bienvenue.
Le déluge de cordes d’Humbug constitue un écrin sur lequel le lyrisme du Suédois peut évoluer avec une facilité déconcertante, mais cette grâce ne fait que préparer le terrain pour le sommet Hulls, dont les cordes frappées et même tirées voire étranglées soutiennent une voix qui semble errer dans un labyrinthe sans issue, rappelant l’univers d’Owen Pallett sur ses travaux en solo.
Plus aérien, Sum est néanmoins nuancé par des percussions à la résonance contrastée et laisse place à un Lilies que des cuivres aux accents jazzy viennent aérer. Vient ensuite la pop entraînante de My Little Jacket et sa montée en puissance emphatique. Loney Dear souffle le chaud et le froid, mais maintient une cohérence d’ensemble. Le lyrisme et l’empathie constituent les fils conducteurs de cette sortie qui exclut les excès d’épure de Hall Music.
Jusqu’alors débridé et moins timide, Loney Dear entre néanmoins dans une phase moins rythmée, et si la mélancolie minérale de Isn’t It You ? est impeccable, la première partie de Dark Light fait craindre un ronronnement, avant qu’une urgence ne mette en éveil les différents éléments, tous atteints d’une folie passagère, qu’il s’agisse de la batterie ou des synthétiseurs, mais également un piano furtivement malade et un spoken word abrasif.
Sans atteindre une telle explosion, Harbours / Harbors est fait du même bois, ou tout du moins suit une progression similaire. Comme souvent avec Loney Dear, la voix et quelques synthétiseurs constituent les points de départ, avant d’être rejoints par des éléments qui dynamitent le tout sans grandiloquence. Le Suédois conclut ce disque avec une ballade organique intitulée There Are Several Alberts Here. Avec un album homonyme attendu, Loney Dear efface en tout cas la déception du disque précédent et renoue avec l’aspect gracile et les harmonies inspirées de ses deux chefs-d’oeuvre, Loney, Noir et Dear John. La patience a parfois du bon.
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