Dans un monde où tout va très vite et où le domaine culturel n’échappe pas, loin s’en faut, à la règle, l’idée de découvrir un disque sorti il y a six mois (une éternité en somme) n’est pas nécessairement la plus géniale si l’on souhaite briller en société...

Heureusement, ce n’est pas pour cette raison que l’on découvre, écoute et tombe sous le charme des artistes que nous défendons dans ces colonnes. Le fait d’être en retard peut d’ailleurs constituer un avantage puisqu’il permet alors de prendre ses distances avec une société suivant de plus en plus promptement le rythme d’une cavalcade permanente.

S’arrêter et profiter du temps qui s’écoule comme s’il était suspendu, c’est précisément la démarche que nous propose Nick Ward avec Surges, le troisième album d’une discographie qu’il enrichit chaque année d’un nouvel opus.

Le Londonien, tranquillement caché derrière un pseudonyme dont les points de suspension finaux pourraient être considérés comme un clin d’œil au style de Louis-Ferdinand Céline, ajoute aux traditionnels synthétiseurs, guitares et percussions, des éléments de field recordings totalement déformés par ses soins de telle manière qu’ils deviennent presque inaudibles en tant que tels.

Si aucun morceau ne ressemble véritablement à l’autre, Surges est de ces disques dont le fil conducteur se déroule avec simplicité. Drone rythmique ou ambient sombre, difficile d’appliquer une seule étiquette à ces compositions électroniques d’autant plus que leur auteur s’autorise à explorer d’autres horizons tels qu’une forme d’IDM à tendance dark sur From The Grown Down, l’ambient dénudé façon Library Tapes sur Thick Swarm ou, sur le titre éponyme, une électronique dont la puissance mélodique se dégageant de l’alliance entre nappes oniriques, rythmique martiale synthétique et détails sonores en arrière-plan n’est pas sans évoquer le Moby de Play ou 18. Pour peu que l’auditeur prenne le temps de s’arrêter sur ce disque, il trouvera probablement son bonheur au regard des nombreuses richesses plus ou moins profondément enfouies ici.