Le streaming du jour #904 : Hakobune - ’Tonight Is Why’
Hakobune est de ces stakhanovistes de l’ambient que l’on a tendance à zapper, faute d’avoir le courage de chercher la perle parmi des sorties qui se suivent et se ressemblent souvent très fortement.
Sa collaboration de l’an dernier avec l’excellent Pleq sur le toujours très pertinent Nomadic Kids Republic de Ian Hawgood était de celles-ci, on en a très certainement loupé bien d’autres, un peu comme dans le cas de son compère Celer (on les retrouvait tout deux il y a quelques mois sur la cassette Vain Shapes And Intricate Parapets du côté de Chemical Tapes) qui à la différence du Japonais a pour lui cette multiplication des projets permettant de varier les plaisirs entre kosmische music minimaliste (Rangefinder), ambient-pop impressionniste (Oh, Yoko) et drone pur et dur - ou plutôt épuré et doux.
Heureusement, et toujours au contraire de Celer avec qui le bonhomme a pourtant plus d’un atome crochu musicalement parlant, Takahiro Yorifuji ne fait pas souvent long. Heureusement, car lorsque c’est le cas l’ennui guette à tout coup à moins d’être porté sur l’onanisme audio-friendly et la contemplation des vertus des médiums et des graves de ses enceintes hi-fi. Autant dire que malgré l’attente, on a hésité avant de se plonger dans l’unique piste de quasiment 40 minutes qui constitue ce Tonight Is Why :
côté "plus", un label engageant puisque l’on doit déjà au dublinois Psychonavigation les superbes sorties de krill.minima, Sense ou Joel Fausto chroniquées cette année dans nos pages, et le minimum de curiosité qu’engendre cette première chez le musicien de se cantonner aux variations internes d’un seul et même morceaux ;
côté "moins", 39’08 d’ambient hiératique dont les harmonies évoluent au ralenti dans un cocon de nappes statiques, le tout enregistré qui plus est en une seule matinée de printemps avec une guitare et quelques pédales d’effets, il y a plus emballant sur le papier même pour le droneux le plus aguerri.
Qu’importe, les "plus" l’emportent et nous voici donc en apnée dans un océan de drones opalins, abandonné aux rêveries langoureuses et voilées du Tokyoïte. Première constatation, pour peu d’occuper raisonnablement son cerveau gauche pendant l’opération, la partie droite s’avère tout à fait réceptive à la mélancolie de cette ode au mystère de notre présence ici-bas, crescendo métaphysique qui n’a heureusement que peu de points communs avec la "soupe primitive" de la cover dans laquelle flottent nos consciences d’êtres de lumière en devenir. Seconde constatation, bien plus que dans une séquençage fort propice à la stagnation pour qui met une plombe à planter ses décors, c’est dans ce format tout en progression que s’épanouit le mieux la musique d’Hakobune, à condition bien sûr d’y abandonner toute volonté et de se laisser emporter par ces reflux d’éternité paradoxalement éphémères et changeants qui doivent autant à Brian Eno qu’à un certain état d’esprit typiquement japonais, réceptif à la beauté dans l’effacement.
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