Depuis trois ans, le label Cheap Satanism nous abreuve de sorties délicieusement gothiques en libre écoute, tel un drive-in à l’ancienne qui ne rechignerait pas à vendre du pop-corn en cornets king size sans pour autant sacrifier quoi que ce soit à son amour pour l’artisanat et les univers bis. Pas de blockbusters donc du côté de l’écurie bruxelloise d’abord lancée par Vincent Satan pour promouvoir la pop satanique de Keiki, formation de la chanteuse Dominique Van Cappellen-Waldock, avant de s’ouvrir peu à peu à d’autres projets et activités, organisant notamment des concerts en adéquation avec sa passion pour l’épouvante (cf. dernièrement Chelsea Wolfe ou la ZomBIFFF Night au Magasin4 de Bruxelles) et accueillant en son sein diverses formations pas toujours aussi cheap ou satanistes qu’on pourrait l’imaginer.

Ainsi en est-il de Bee And Flower, combo partagé entre New York et Berlin qui avait séduit le label avec une reprise de la chanson I Hear Voices de Screamin’ Jay Hawkins et dont la pop aux légers accents cabaret, électrique et feutrée, dévoile sur ce troisième opus de charmants faux-airs d’Aimee Mann du côté obscur. Difficile en effet de ne pas faire le rapprochement en découvrant le timbre suave aux intonations confiantes de Dana Schechter, bassiste à ses heures pour American Music Club, Tarnation, Bertrand Burgalat ou Keren Ann que les fans de Swans n’auront pas manqué de remarquer à la quatre-cordes au côté de Michael Gira du temps des premiers albums de son side project Angels Of Light. Autant de formations rencontrées par l’intermédiaire du producteur Toby Dammit, émigré tout comme Dana à Berlin où il a supervisé ce Suspension dont les ambitions cinématiques en clair-obscur, soulignées par la dramaturgie subtile des arrangements, éclatent sur la vidéo du single Waiting Room, exploration expressionniste des mystères de la nature humaine :

Quant à l’album, auxquels ont notamment participé J.G. Thirlwell (figure australienne de la no wave et de l’indus avec Foetus, Manorexia ou Steroid Maximus), Martin Wenk (Calexico) et Paul Watson (Sparklehorse), il est en écoute ci-dessous en attendant sa disponibilité en CD le 30 avril :

Enfin, pour ce qui est de la facette plus horrifique et délirante mais tout aussi attachante du label, on vous conseillera le deuxième opus du trio belge Joy As A Toy à paraître le 7 mai, un peu comme si Mr. Bungle rendait hommage aux films de zombies, aux giallos d’Argento et à leurs BO psychédéliques un peu datées mais débridées de l’époque Goblin (avec l’excellente Stefania Pedretti d’OvO au micro pour un final halluciné), ou encore la garage-pop glam et endiablée de l’Américain Swilson.