Jean-Louis Murat - Grand Lièvre

1. Qu’est-ce que ça veut dire
2. Sans pitié pour le cheval
3. Rémi est mort ainsi
4. Alexandrie
5. Haut Arverne
6. Je voudrais me perdre de vue
7. Vendre les prés
8. Le champion espagnol
9. Les rouges souliers
10. La lettre de la pampa


Sortie le : 26 septembre 2011
Après une attente inhabituellement longue de deux ans, les choses ont repris leur cours ordinaire avec la sortie le mois dernier du nouvel album de Jean-Louis Murat. Un délai causé non pas par un manque d’inspiration de l’artiste mais plutôt par les préoccupations extra-musicales d’une industrie du disque en plein désarroi. Une industrie à propos de laquelle l’Auvergnat, interrogé par le journal Marianne, déclarait d’ailleurs récemment : "Dieu reconnaîtra les siens [...] Il ne restera que les bons, dont moi, car je peux enregistrer un disque en quatre heures". Si le propos ne surprendra personne, connaissant le franc-parler du bonhomme, on aura forcément à coeur d’en vérifier la justesse au moment d’écouter ce Grand Lièvre, justement enregistré en quelques jours et à peu de frais.
D’emblée, l’album se révèle bien différent de ce que pouvaient laisser présager son titre et le nom de certains de ses morceaux : Il faut vendre les prés, Haut Arverne, La lettre de la pampa, Sans pitié pour le cheval... Alors qu’on imaginait aisément un album rustique, les pieds dans la fange et l’odeur du lisier dans les narines, et bien que cette ruralité soit effectivement un des thèmes évoqués ici, Grand Lièvre est en premier lieu un disque très élégant, un disque qui respire la musique avec un son très agréable, chaud, ample, et une atmosphère soignée dans ses moindres détails.
C’est aussi un disque multi-facettes, sautant allègrement d’un style et d’une humeur à l’autre, entre un morceau d’ouverture aux choeurs débridés qui embrasse à pleine bouche une pop aux parfums rétro qui nous renvoie plusieurs décennies en arrière, le son un peu plus rock de Sans pitié pour le cheval et Le champion espagnol, les inclinaisons jazzy du single Il faut vendre les prés ou encore la nonchalance de Haut Arverne et d’Alexandrie... On aurait pu s’y perdre mais il n’en est rien, et la personnalité de chaque titre vient sans problème se fondre dans celle de l’album, à l’exception peut-être de ces Souliers rouges qui jurent un peu.
Des rivages d’Alexandrie aux paysages d’Auvergne, des pentes du Tourmalet à l’isolement de la pampa en passant par les champs de bataille de la première guerre mondiale et les arcanes d’une mémoire perdue, Grand Lièvre nous promène aussi dans ses textes. Murat parle un peu de lui, il parle avant tout des hommes. De leurs peines, leurs révoltes, leurs désirs, leurs combats, de leurs petites histoires et de la grande aussi. En plus de ses qualités musicales, l’album est profondément humain, ce qui ne le rend que plus attachant encore.
On ne sait si Dieu reconnaîtra Murat, mais en ce qui nous concerne l’affaire est entendue : il fait partie des bons et on a déjà hâte de le retrouver l’année prochaine si tout va bien pour une nouvelle démonstration.

Quelles sont les raisons qui nous font, chaque année, lire et relire les différents tops affolant webzines et presse spécialisée ? Si ces objectifs plus (la volonté de partager de nouveaux disques) ou moins (l’illusion d’être un défricheur) avouables rendent l’exercice de plus en plus raillé, j’y vois essentiellement l’occasion d’ordonner mes découvertes (...)

C’est qu’il est agaçant le Jean-Louis. Avec sa mine bourrue, sa tendance à ne sourire que lorsqu’il se pince et ses avis parfois (souvent trop) tranchés, il n’a pas tout à fait le profil du joyeux-drille.


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