Particulièrement actifs sur les scènes de la capitale qu’ils fouleront à plusieurs reprises ces prochains mois, de la release party de leur album The Dawn au Bus Palladium le 19 mars, jour de sa sortie officielle, à leur venue au Pop In le 2 juin en passant par le club Les Disquaires le 5 avril ou l’OPA le 28, les parisiens Enemies pourraient bien vite se tailler la part du lion dans notre morne paysage rock d’inspiration anglo-saxonne. Comme souvent, ça a commencé l’an dernier par la Blogothèque et ses fameux concerts à emporter que le public d’outre-Manche nous envie :
Mélancolie de no man’s land pour un Losses proche de Syd Matters et en parfaite adéquation avec le cadre du tournage (le chantier abandonné dans les années 70 d’un aérotrain qui devait relier Paris à Orléans), mélodie fébrile et troublante pour Solid Bones quelque part entre le dEUS d’ In A Bar, Under The Sea et le Radiohead de The Bends, complainte élégiaque et fragile rappelant Low pour Treat Me Wrong, les influences sont pesantes mais loin d’être galvaudées comme c’est trop souvent le cas avec le quintette d’Oxford notamment, duquel tout le monde ou presque dans le petit monde de la pop moderne voudrait se réclamer.
C’est d’ailleurs en quintette qu’Enemies officie également, emmené par Antoine Aubry à la guitare et au chant, et un certain J-B à l’enregistrement autour desquels un line-up s’est solidifié depuis 2008 (Jean Grandperret à la guitare, Julien Rochard à la basse et Thomas Pain à la batterie) pour accoucher deux ans plus tard de The Dawn, premier album autoproduit que le groupe nous propose d’écouter en avant-première via Soundcloud :
Mêlant arrangements feutrés (cf. les cordes lancinantes du superbe Coincidence), harmonies crépusculaires, sursauts d’électricité plus fiévreux, ballades dépouillées (Elephants) et compositions plus abstraites et spectrales (Abysses, Ipro, Blip 101) voire carrément instrumentales (The Dawn, Oblique), l’album développe un univers ambitieux, fourmillant de détails et de recoins à explorer, de discrètes prises de risques et de déséquilibres savamment mesurés. Et s’il manque parfois d’assurance, c’est justement par cette constante fragilité qu’il finit par faire mouche et parvient à se démarquer de ses influences à l’inverse d’un Syd Matters dont l’application de plus en plus grande à singer la perfection (f)rigide d’ In Rainbows en est arrivée à tuer toute spontanéité dans la musique du groupe. Un passage de flambeau réussi en quelque sorte, plus qu’à espérer que le public français sache réserver à l’album l’accueil qu’il mérite.
Photo : Chloé Nicosia.