L’Overd00’s : 2001
Un bilan de la décennie écoulée c’est bien, mais c’est quand il y en a plusieurs que l’overdose frappe rapidement à la porte de tous les internautes. Un peu d’astuce, d’espièglerie et c’est toute la rédaction associée aux membres du Forum Indie Rock qui vous présentent 11 articles, 200 albums et à n’en pas douter quelques découvertes pour redonner ses lettres de noblesse aux années 00’s.
Arthur C. Clarke l’avait prédit ou presque, cette entame du troisième millénaire restera au moins musicalement comme l’année-clé de cette décennie. En 2001, tandis que les guitares amplifiées ressortaient des garages, l’électro d’avant-garde révélait son influence primordiale sur les têtes chercheuses à succès, le métal de qualité s’échappait de son carcan et le hip-hop underground s’imposait, finalement, dans le cœur des gardiens du temple indé. Une année de transition en somme, où le rock français surmontait ses derniers complexes, où la pop retrouvait des envies de grandeur, autant de tournants empruntés par cette nouvelle sélection du Forum Indie Rock revue et complétée par la rédaction.
Air - 10.000 Hz Legend
Avalés Pink Floyd et le prog-rock, digéré Robert Wyatt, disséqué Morricone, épuisés les labels Warp et Mo’Wax... et voilà qu’en 2001, année supposée d’une odyssée de l’espace qui n’a pas manqué de marquer leurs esprits aventureux d’alors, les leaders de la french touch tuent la hype qui les entourait pour accoucher de la toute première épopée électro-pop hybride du 3ème millénaire : tout à la fois lyrique (Electronic Performers et son crescendo orchestral à coller le frisson) et intimiste (le troublant How Does It Make You Feel ?), candide (People In The City) et vénéneux (Sex Born Poison, où les voix des Japonaises de Buffalo Daughter font merveille) voire ironique (Radio #1), post-moderne (Wonder Milky Bitch), tragique (l’odyssée ambient Caramel Prisoner) ou bariolé (Lucky And Unhappy), ce grand prématuré biberonné par Beck au chant sur deux morceaux antinomiques (le nonchalant The Vagabond et l’emphatique Don’t Be Light) et Nigel Godrich à la production apparaît toujours en avance de 10 ans sur son temps.
(RabbitInYourHeadlights)
Aphex Twin - Drukqs
Recracher de mémoire et dans l’urgence des circonstances le contenu complet de son ordinateur portable sur 2 CD après l’avoir oublié dans un avion, voilà la gageure accomplie par Richard D. James qui signait logiquement avec ce Drukqs son album le plus gargantuesque et malade à défaut d’être le plus abouti et cohérent. Malgré quelques baisses de régime en terme d’inspiration, cette collection monumentale ravira donc les amateurs d’IDM (sous) acide et de breakbeat schizophrène mais aussi (et surtout ?) les amoureux d’ambient néoclassique à la Satie avec ces méditations rêveuses au piano préparé qui restent dans toutes les mémoires.
(RabbitInYourHeadlights)
The Avalanches - Since I Left You
De l’ivresse d’une liberté retrouvée après une rupture amoureuse à la prise de conscience de ce qu’on a perdu, voilà le cheminement que nous propose de suivre la troupe de DJ australiens avec ce gigantesque mash-up (initialement paru en 2000 mais en Australie seulement) en forme de voyage métaphorique aussi féerique qu’électrisant, véritable rêve éveillé construit sur d’innombrables samples et déjouant toute notion de frontière musicale pour un résultat souvent truculent (cf. le single Frontier Psychiatrist d’autant plus extravagant en vidéo ci-dessous), parfois touchant mais toujours catchy et dansant. Un premier album tout en contre-pieds équilibristes et collages virtuoses dont on attend toujours impatiemment la suite, espérée en 2011.
(RabbitInYourHeadlights)
Björk - Vespertine
Difficile de rendre justice à ce chef-d’œuvre de l’Islandaise tant la magie intimiste de Vespertine opère plus que jamais au niveau du vécu et du ressenti personnel. Entourée de la crème des chercheurs en électronique, des Allemands Thomas Knak (Opiate, Wareika) et Martin Gretschmann (Console, The Notwist) à son producteur d’ Homogenic, l’Anglais Mark Bell aka LFO en passant par Valgeir Sigurðsson, Damian Taylor, le duo Matmos maître du micro-scalpel qui l’accompagnait sur scène à l’époque, Matthew Herbert ou encore Olivier Alary (Ensemble) pour une paire de remixes entre autres fidèles adjoints à la programmation Guy Sigsworth et Marius de Vries, Björk livre avec ce quatrième opus un vrai listener’s digest de l’avant-garde glitch sans avoir l’air d’y toucher, samplant Oval le plus naturellement du monde sur le désarmant Unison entre deux références à Pole ou Aphex Twin :
Le véritable exploit étant que l’émotion et le lyrisme de ces chansons aussi solitaires que généreuses ne sont jamais sacrifiés à telle exigence, l’électronique - si ce n’est peut-être sur le fiévreux Pagan Poetry ou le pétulant Heirloom aux accents IDM - se faisant le plus souvent caressante au diapason de la harpe solaire de Zeena Parkins ou des chœurs célestes qui émaillent l’album de son manifeste d’ouverture Hidden Place au bouleversant Harm Of Will écrit par le cinéaste Harmony Korine en guise d’hommage quelque peu impénétrable à Will Oldham, que Björk inviterait bientôt à prendre le micro via l’intro superbement sereine de la BO de Drawing Restraint 9.
(RabbitInYourHeadlights)
Cannibal Ox - The Cold Vein
Distorsions multiples, nappes incisives et froides distillant un malaise bien réel, échos saturés, guitares patraques, samples torturés, triturés et débités au scalpel, beats malsains et disloqués sur lesquels s’enchevêtrent les flows complexes et presque métalliques de deux MCs détaillant de sordides histoires – où se mêlent Science-Fiction, Heroic Fantasy et passages ultra-réalistes – qui ne semblent pas être autre chose que la description tour à tour crue et métaphorique de leur vie.
« It’s a cold world out there, sometimes i think i’m getting a little frosty myself », cette phrase qui introduit The Cold Vein résume parfaitement l’univers labyrinthique et flippant dans lequel se meut Cannibal Ox. Une fresque urbaine et glaçante qui voit les constats plus qu’amers de Vast Aire et Vordul Mega être formidablement mis en sons par la production géniale et désespérée d’El-P (tête pensante de feu Company Flow et big boss d’un label qui signait là, et d’une manière magistrale, sa première sortie : Def Jux). Un disque futuriste et sans issue, un vortex sonore inextricable à la noirceur sans fond qui, même dix ans après, garde un pouvoir de fascination intact.
(leoluce)
Eels - Souljacker
Plus rêche peut-être que ses prédécesseurs à l’image d’un Mark Oliver Everett posant hirsute sur la pochette, ce quatrième album de Eels, co-produit par John Parish, est sans nul doute le disque le plus inventif signé par E cette décennie… juste après le génial I Am The Messiah sous l’identité de MC Honky dont l’utilisation systématisée du sampling trouve véritablement sa source ici, en témoignent entre deux gerbes d’électricité rageuses des instrus souvent basés sur des boucles électro-acoustiques d’une grande richesse d’inspiration.
Le touchant Daisies Of The Galaxy et surtout Shootenanny ! qui compte certaines des plus belles chansons du groupe n’étaient certes pas bien loin d’obtenir nos faveurs, mais on avouera un faible pour l’esthétique musicale de ce disque à part, de la violence contenue de That’s Not Really Funny au déchirant World Of Shit en passant par les collages pop post-modernes de Teenage Witch ou Jungle Telegraph ou l’autocitation sans une once d’ironie d’un Fresh Feeling aux cordes directement reprises sur Selective Memory, extrait de Daisies Of The Galaxy.
(RabbitInYourHeadlights)
Expérience - Aujourd’hui, Maintenant.
Sur les cendres de Diabologum, groupe splittant juste après la sortie de #3, assurément l’un des disques français les plus importants de la décennie 90, Michel Cloup a construit Experience. Aujourd’hui, Maintenant. est le premier album de cette nouvelle formation. Fidèle à ce qui a fait Diabologum, c’est à dire un rock français froid et sans concession, Cloup rajoute une dimension noisy organique bien plus marquée. Aujourd’hui, Maintenant. est en fait un subtil et singulier mélange de brûlots radicaux remplis d’énormes guitares (Deux), mais aussi de titres plus intimistes (Entre voisins) voire complètement expérimentaux (Fin 82 - Début 83). Car il y a du génie chez Michel Cloup, d’abord son phrasé parlé bien plus proche du hip-hop que de la chanson française (à l’image de l’immense et très générationnel Aujourd’hui, maintenant), ensuite son talent d’écriture (le fleuve et jouissif Pour ceux qui aiment le jazz). Grâce à sa voix et à ses textes, Cloup arrive à créer une sensation de fragilité derrière les murs de larsen et les samples, une envie de vivre malgré tout (comme sur le sublime Essayer).
Aujourd’hui, Maintenant. est un album indispensable, hybride, calé au milieu d’une multitude d’influences, presque entre deux mondes et ça n’est peut-être pas un hasard s’il est sorti en 2001, année de transition entre deux époques...
(Spoutnik)
Fantômas - The Director’s Cut
Quoi ? Fantômas dans le classement du Forum Indie Rock ? Comment le trio "expérimétal" de Mike Patton et ses miniatures pour larynx et distortion ont-ils pu se retrouver entre Archive et Sparklehorse ? Avec un album de reprises, voilà comment.
Hommage à quelques grands noms de la bande originale de film, The Director’s Cut est le moins Fantômas des albums de Fantômas. C’est aussi (ceci explique cela) le plus accessible, si tant est que l’on puisse utiliser cet adjectif à propos d’un album de Fantômas.
Reste que l’on tient là un album hautement jouissif qui entend Nino Rota, Ennio Morricone, John Barry, Jerry Goldsmith, Henry Mancini et Angelo Badalementi passer à la moulinette pattonienne. Le choix se portant de préférence vers des thèmes flippants, on retrouvera les musiques de Rosemary’s Baby et de La Nuit du chasseur (Patton se fait plaisir avec ces comptines schizo) ou encore l’invocation satanique de The Omen (La Malédiction).
Pour autant, ce n’est pas un album "Halloween" de A à Z (Carpenter n’y figure d’ailleurs pas ! Trop minimaliste pour un extraverti notoire comme Patton ?). Certains titres comme Experiment in Terror (Mancini pour Blake Edwards) ou Investigation of a Citizen Above Suspicion (Morricone pour Elio Petri) penchent vers une veine mélodique déchirée d’éclairs de violence qui rappelle le Mr. Bungle de California.
Parfois franchement métal (le traitement infligé au Golem de Karl-Ernst Sasse évoquerait presque un vieux Marilyn Manson), toujours excessif et malade, The Director’s Cut est indéniablement l’album par lequel on peut le plus facilement aborder la discographie de Fantômas. Mais attention, apprécier celui-là ne signifie pas que l’on sera capable de digérer le reste.
(jediroller)
Fugazi - The Argument
C’est bien simple, il n’y a rien, absolument rien à jeter dans la discographie intransigeante de Fugazi. Depuis leur 7-song EP inaugural en 1988 jusqu’à cet Argument de 2001, dernière trace discographique du groupe en studio, leur musique a beaucoup évolué tout en restant fondamentalement la même : la basse dub et élastique de Joe Lally tisse sa toile sur les tempi tout en finesse, qu’ils soient calmes ou véloces, de Brendan Canty, le tout construit sur une ossature tout terrain propice à un dialogue entre les guitares acérées ainsi que les voix écorchées de Ian MacKaye et Guy Picciotto.
Mais sur cet opus, la colère des débuts, encore bien présente, est plus en dedans, intériorisée. Elle prend corps dans des constructions alambiquées, complexes, à la sophistication indéniable. Un album qui représente la synthèse de tout ce que le groupe a fait jusque-là et fera peut-être (on l’espère encore !) après, un équilibre précaire mais parfait et bien posé entre bruit et mélodie, entre déflagration frontale et subtilité. Fugazi ralentit légèrement la mesure, enrichit sa palette instrumentale (piano, violoncelle, backing vocals féminins et percussions sont conviés à la fête) et il en découle une fureur moins brute de décoffrage, plus larvée, aux contours presque... pop mais attention, une pop loin d’être bubble-gum, plutôt barbelée, altérée, sèche et furibarde, qui va tout droit à l’essentiel. Fugazi ne ressemble à personne et ne laisse, avec ce dernier opus en date, que des orphelins. Le dernier disque essentiel d’un groupe qui l’est tout autant.
(leoluce)
Hood - Cold House
A l’aide de pinceaux fins et soyeux ou plutôt d’arpèges précis et épurés, Hood est indéniablement au sommet de son art dans l’élaboration de toiles musicales impressionnistes aux couleurs automnales et hivernales comme sur leur œuvre précédente, The Cycle Of Days And Seasons, qui dévoilait les charmes d’une folk à la mélancolie nonchalante et neurasthénique. Mais au-delà de ce que l’on pouvait connaître du travail des frères Adams, Cold House s’ouvre cette fois-ci à de nouvelles textures qui développent un univers évanescent et élégiaque à base de nappes brumeuses ou de rythmiques hachurées d’électronica. Pour obtenir des paysages d’une telle beauté glaciale et émouvante, la musique de Hood s’éloigne de l’impressionnisme pour aller vers un art plus abstrait lorsque l’on découvre le phrasé singulier du collectif hip-hop cLOUDDEAD. Finalement, cet album est une œuvre à la fois originale et aventureuse que l’on aurait pu prétendre inégalée s’il n’y avait eu ensuite Outside Closer, lumineux et minutieux travail d’artisanat effectué par de simples et talentueux passionnés qui n’ont pas fait profession de leur musique.
(darko)
Labradford - Fixed::Context
2001, odyssée de l’espace ? Le temps quoi qu’il en soit devient espace et vice-versa sur cet ultime chef-d’œuvre des pionniers du post-rock et du drone ambient, qui signaient là leur disque le plus ample et abouti depuis l’éponyme de 96, mais plus aérien et cosmique que souterrain cette fois, préfigurant les aurores éthérées de Pan-American et les méditations stratosphériques d’Aix Em Klemm.
Pourtant, ni Robert Donne ni Mark Nelson n’ont su atteindre jusqu’ici avec leurs projets respectifs les mêmes sommets d’épure qu’avec ces guitares en apesanteur et autres nappes cotonneuses parfois sous-tendues de pulsations ouatées et saupoudrées de glitchs impressionnistes, qui donneraient bientôt naissance à toute une esthétique moderne de l’ambient.
(RabbitInYourHeadlights)
Lift To Experience - The Texas Jerusalem Crossroads
Jeff Buckley ressuscité d’entre les morts par les musiciens du label Constellation, vous en rêviez ? Eh bien c’est justement le petit miracle accompli par l’ange déchu Josh T. Pearson avec l’unique (double) album de son groupe Lift To Experience. La progression narrative, symbolisée par l’enchaînement des titres formant pour chaque CD une sentence mystique annonciatrice d’apocalypse puis de renaissance, se fait en compagnie d’une voix d’exception en quête de rédemption et au fil des circonvolutions orageuses contenues par le mix parfait des ex-Cocteau Twins Robin Guthrie et Simon Raymonde. Une véritable expérience faite disque, à vivre au moins une fois dans sa vie.
(RabbitInYourHeadlights)
Mogwai - Rock Action
Avec Rock Action, qui allait bientôt donner son nom au label du combo post-rock, nappes éthérées, vocoders et grésillements électroniques faisaient leur apparition chez Mogwai qui remettrait ça deux ans plus tard avec un Happy Songs For Happy People nettement moins inspiré avant de finalement laisser tomber cette direction inhabituellement mélancolique et aventureuse pour renouer avec les codes d’un post-rock plus classique.
Pas étonnant de retrouver David Pajo et Gruff Rhys au chant ou encore Dave Fridmann déjà présent à la production du précédent Come On Die Young dont Rock Action prolongeait alors la belle parenthèse discographique avec ses arrangements acoustiques et ses textures particulièrement travaillées, de quoi redonner en plein revival garage rock un peu d’espoir en l’avenir des guitares. L’année suivante, on croiserait les Écossais, décidément au faîte de leur carrière, en featuring sur un autre sommet d’ampleur musicale et de modernité sonique, le fabuleux As If To Nothing de Craig Armstrong.
(RabbitInYourHeadlights)
Noir Désir - Des Visages, des Figures
Cinq ans après un 666.667 Club qui sonnait encore très rock, comme dans la plus pure tradition du groupe, Noir Désir s’offrait avec Des Visages, des Figures une véritable révolution. On retrouvait ainsi Bertrand Cantat et ses acolytes plus détendus que jamais (le calme avant la tempête diront les mauvaises langues), et leur musique, toute en maîtrise, s’en ressentait. Les guitares rageuses laissaient leur place à un son plus acoustique (la guitare de Manu Chao sur Le vent nous portera) voire ou à des bruits plus surprenants (ce cheval qui cavale sur L’enfant roi par exemple).
En bref, le léger tournant entrepris sur 666.667 Club devenait même un réel virage. Désormais, le groupe était capable de composer des morceaux plus mélodiques, tout en expérimentant davantage (l’expérience de One Trip/One Noise, album de remixes du groupe effectués par des tiers mais sélectionnés par les Bordelais, a certainement accéléré ce processus). Et si le naturel de Noir Désir peut très vite revenir au galop (Le grand incendie), le groupe nous touche davantage encore lorsqu’il mise sur l’émotion suggérée (Des armes, où Bertrand Cantat s’époumone quasi a capella sur un texte de Léo Ferré, Bouquets de nerfs, À l’envers à l’endroit). Sûr de son talent, le groupe s’offre même une ballade dérangeante de près de 24 minutes aux côtés de Brigitte Fontaine sur le thème de L’Europe où divers bruits assurent là encore une ambiance menaçante. Un groupe de rock qui signe l’un des albums les plus subtils de la décennie, c’est l’exploit que réalisait Noir Désir il y a de cela neuf ans. Déjà.
(Elnorton)
Pinback - Blue Screen Life
C’est cet album qui m’a fait plonger. 2001 : Concrete Seconds est téléchargeable sur Epitonic.com. Entêtant comme peut l’être un refrain de Pinback. Accro en 4 minutes et 8 secondes, record à battre.
Pinback, c’est l’alliance du feu et de la glace, l’alchimie parfaite de composants qui pourtant n’avaient a priori pas vocation à se mélanger : un délicieux cocktail à base d’eau et d’huile.
À ma droite : Armistead Burwell Smith IV, alias Absiv, alias Zach Smith, bassiste atypique, pilier de Three Mile Pilot, quelques aventures solo sous le nom de Systems Officer. Aime les Beatles, joue de sa basse comme d’une guitare, compose des mélodies pop imparables.
À ma gauche : Rob Crow, guitariste, trublion néo-punk, songwriter à l’inspiration inépuisable, créateur ou membre épisodique d’un milliard de groupes (dont Thingy, Heavy Vegetable, Optiganally Yours). Déteste la pop music et particulièrement les Beatles. Professe à chaque occasion son amour pour Mayhem, Venom, les Shaggs, Zappa, Beefheart et Shooby Taylor "the human horn".
Étrangement, enfermer ces deux gars-là dans un studio produira quelques inoubliables perles de pop ciselée et complexe. La musique de Pinback dans ces années-là (Blue Screen Life est leur deuxième album) est un pur produit de studio : entrelacements de lignes de basse et d’arpèges de guitares, harmonies vocales et canons, boîte à rythmes, samples de voix (parfois extraits de Dark Star, le film culte de Dan O’Bannon et John Carpenter qui a donné son nom au groupe).
Tout dans Pinback intrigue : l’association contre nature des deux acolytes, les titres des chansons (souvent un seul mot, parfois un nom de ville qui n’a rien à voir avec le sujet apparent de la chanson), les paroles (Penelope est dédié à un poisson rouge). Mystère et séduction d’un groupe qui a récemment évolué vers un son plus live et peut-être perdu au passage un peu de sa mystique. Mais Pinback cru 2001, c’est de la pure : indéfinissable et hautement addictif.
(jediroller)
Radiohead - Amnesiac
Si le FIR n’a pas manqué de participer au plébiscite écrasant de Kid A, son faux jumeau issu des mêmes sessions, souvent en reste du côté de la presse spécialisée trouve également une place de choix dans ce bilan et l’on ne peut que s’en féliciter. Car Amnesiac, à la fois l’album le plus abstrait (Packt Like Sardines In A Crushd Tin Box, Hunting Bears) et le plus spontané (Knives Out, I Might Be Wrong), le plus expérimental (Pulk/Pull Revolving Doors, Dollars And Cents) et le plus touchant (Pyramid Song, You And Whose Army ?) du quintette d’Oxford, est un véritable album-monde, préfigurant en cela l’inépuisable Hail To The Thief sorti deux ans plus tard. Un disque qui pourrait être résumé à lui seul par le génial Like Spinning Plates, dont l’opacité angoissée et l’abstraction déconstruite laissera finalement place à la relative limpidité de nappes métaphysiques proches de Brian Eno et d’un spleen vocal plus mélodique :
Entre-temps, Radiohead aura peu à peu démêlé les nœuds de sa schizophrénie et troquera pour de bon l’électronique pour l’acoustique sur Life In A Glasshouse, final jazzy d’un big band dépressif plus que jamais marqué par la tragédie inéluctable d’une déshumanisation en marche.
(RabbitInYourHeadlights)
Sparklehorse - It’s A Wonderful Life
Depuis que Mark Linkous nous a quittés en mars dernier, force est de constater que c’est dans la ferveur cotonneuse (More Yellow Birds, Morning Hollow) ou parfois plus ardente (les tubesques Piano Fire et King Of Nails) de ce troisième opus que l’on vient le plus souvent se recueillir. It’s a Wonderful Life en effet se prête à toutes les humeurs, nostalgique (Eyepennies), lumineuse (les merveilleux Gold Day et Comfort Me), mélancolique (It’s a Wonderful Life, Apple Bed) ou dépressive (Sea of Teeth), mais plus seulement solitaire.
Invitant PJ Harvey pour deux duos d’anthologie, Nina Persson dont il produirait la même année le premier album solo A Camp, la fidèle Sophie Michalitsianos, future Sol Seppy, déjà présente sur Good Morning Spider, Tom Waits, figure tutélaire des ballades de misfit du plus lo-fi Vivadixiesubmarinetransmissionplot, Adrian Utley de Portishead à la basse et même indirectement Vic Chesnutt, dont Linkous reprend une partie des paroles de Myrtle sur le touchant Little Fat Baby, c’est en effet une envie nouvelle pour l’Américain de s’ouvrir et de communiquer qui domine sur cet ultime chef-d’œuvre, dont l’équilibre magique entre instrumentation rêche, arrangements oniriques ou solaires et sens de l’espace doit beaucoup aux talents conjugués à la production du dompteur d’électricité John Parish et du magicien des rêves soniques Dave Fridmann, clavier des cousins Flaming Lips.
(RabbitInYourHeadlights)
Spoon - Girls Can Tell
Un album de Spoon se devait de figurer dans l’overd00’s. C’est tombé sur Girls Can Tell et ô joie, c’est l’un de mes préférés, et ça n’est pas le seul. Car le gros avantage de ce troisième opus, c’est de faire figure de charnière dans la discographie du groupe. Fuck the audience, on ne m’interdira pas de clamer ma passion pour la période pré-Merge Records avec une rixe de lutins en plein cœur de Boston sur Telephono, des riffs sexués et un martèlement diabolique sur A Series of Sneaks, c’était la grande époque... vraiment... hormis peut-être en matière de reconnaissance et de ventes. Me pardonnera-t-on de dire qu’un decrescendo, lent mais perceptible, s’attarde depuis quelques années sur la formation de Britt Daniel et ses potes ? Comme une étrange sensation qu’à mesure que le groupe monte dans les charts, leurs albums nous font perdre l’inclinaison nécessaire à une bonne pénétration auriculaire. Dernier album d’exception en date et garanti sans attelle : Kill The Moonlight, même si je trouve encore un peu de plaisir à chaque livraison.
Du coup, ni une, ni deux, pour ceux qui ne connaîtraient pas, ruez-vous sur Girls Can Tell. Tout le monde est servi : les fans de morceaux "pop" aux sonorités si typiques du groupe (Everything Hits At Once, Me And The Beans), les sanguins qui découvriront quelques brûlots indispensables (Believing Is Art, Take A Walk), les amateurs d’instrumental (This Book Is A Movie), les passionnés de morceaux qu’on jurerait ressuscités du passé (The Fitted Shirt, Anything You Want) ou tout simplement ceux qui aiment quand sonne le glas (Chicago At Night). Girls Can Tell, un joli panel de tout ce que le groupe sait faire de mieux, une bonne entrée en matière.
(indie)
The Strokes - Is This It
Une pochette sexy mais élégante, un look veston/jean slim/converses à la fois rétro et branché, des guitares sans fioriture et des mélodies ciselées pour un rock à cheval entre les 70’s de Television ou du Velvet et la pop d’aujourd’hui charriant la mélancolie dans l’urgence et vice-versa, les Strokes en 2001 n’étaient pas à un paradoxe près.
Un marketing savamment étudié pour cristalliser les fantasmes nostalgiques d’une jeunesse new-yorkaise en mal de repères et d’une presse rock à la recherche de sa propre équipée sauvage sans trop de sang ni de sueur, mais une musique pourtant si sincère et évidente qu’elle continuerait de marquer les esprits bien après que la hype se soit éteinte, trop tôt d’ailleurs au regard du très personnel et touchant Room On Fire de 2003. Mais le public alors était déjà passé à autre chose, préférant le son plus glam des Kills ou des White Stripes d’ Elephant à la gueule de bois de Julian Casablancas et ses errances d’éternel inadapté qui culminaient ici avec The Modern Age :
Casablancas qui vient justement d’avouer la semaine dernière sur Twitter que le quatrième album du groupe était finalement terminé et partait au mixage dans la foulée...
(RabbitInYourHeadlights)
The White Stripes - White Blood Cells
En guise d’Odyssée de l’Espace, ici on serait plutôt dans Retour Vers Le Futur, avec dans les rôles principaux The Strokes et The White Stripes. Les premiers se révèlent avec Last Nite tandis que les seconds explosent avec un troisième opus des plus réussis. Un duo batterie / guitare irrésistiblement efficace accompagne la voix de Jack - aussi lyrique que rageuse.
Dans le genre "chanson idéale pour embêter sa petite soeur", on a I Think I Smell A Rat aussi décalée que jubilatoire. Jubilatoire à l’instar de la plupart des titres de ce White Blood Cells, sur album comme sur scène à l’image de cette vidéo de Hotel Yorba où Meg apparaît déchaînée sous son air à côté de la plaque.
De là à dire qu’il s’agit du chef-d’oeuvre rock de la décennie, il y a un monde que l’on ne franchira pas mais force est de constater que cet album aurait fait bonne figure dans un top datant de quelques dizaines d’années, et on peut imaginer qu’il y tiendrait également une place de choix dans quelques dizaines d’autres.
(spydermonkey)
The Strokes sur IRM - Site Officiel - Myspace
Mogwai sur IRM - Site Officiel - Myspace
Eels sur IRM - Site Officiel - Myspace
Air sur IRM - Site Officiel - Myspace
Radiohead sur IRM - Site Officiel
The White Stripes sur IRM - Site Officiel
Pinback sur IRM - Site Officiel - Myspace
Expérience sur IRM - Site Officiel - Myspace
Spoon sur IRM - Site Officiel - Myspace
Björk sur IRM - Site Officiel - Myspace
Sparklehorse sur IRM - Site Officiel - Myspace
Hood sur IRM - Myspace - Site Officiel
The Avalanches sur IRM - Site Officiel - Myspace
Aphex Twin sur IRM
Noir Désir sur IRM - Site Officiel
Labradford sur IRM
Fugazi sur IRM
Lift To Experience sur IRM
Cannibal Ox sur IRM
Fantômas sur IRM
Labradford - Up To Pizmo
- Sulfure Session #1 : Aidan Baker (Canada) - Le Vent Se Lève, 3/02/2019
- Sulfure Session #2 : The Eye of Time (France) - Le Vent Se Lève, 3/02/2019
- Aidan Baker + The Eye of Time (concert IRM / Dcalc - intro du Sulfure Festival) - Le Vent Se Lève (Paris)
- Oliver Barrett - Splinters
- Jak Tripper - The Wild Dark
- your best friend jippy - Unidentified Friendly Object
- Fennesz - Mosaic
- TVAŃ - Каюсь ?!...
- Mantris - I'm So Many People
- NLC & Wolf City - Turning shadow into transient beauty
- Nala Sinephro - Endlessness
- Félicia Atkinson - Space As An Instrument
- Jlin - Akoma
- 2024 à la loupe : 24 albums pop/rock/folk (+ bonus)
- Azimutez votre réveillon avec cette sélection musicale de Noël !
- Theis Thaws - Fifteen Days EP
- 2024 à la loupe : 24 EPs (+ bonus)
- Laura Marling - Patterns in Repeat