Nouvellement basé à Rome à en croire sa page Bandcamp où l’on pouvait déjà retrouver pour 2024 un certain nombre d’enregistrements autodistribués, à commencer par l’album Under the Volcano lâché cet été (sorte de pendant onirique et dissonant, plein de de glitchs et de distorsions, aux méditations d’un Ry Cooder avec Hawaï comme décor à la place du Texas), mais également des sessions live, collaborations et autre accompagnement de film muet, Mike Cooper nous a désormais habitués à sa sortie annuelle chez Room40, généralement de haute volée comme en témoignait encore l’an passé l’excellent Black Flamingo.

Plus que jamais fasciné par les atmosphères tropicales qu’il retranscrit avec force field recordings aquatiques et animaliers en l’occurrence captés en Martinique (cf. Like Stars Of Gold Painted On The Blue Skeleton Of Crumpled Heaven), apportant une texture particulièrement immersive à ses disques de la veine "exotica", le globe-trotter octogénaire rompu aux expérimentations guitaristiques depuis les années 60 mêle joliment sur Slow Motion Lightning cette inspiration insulaire à d’étranges méditations acoustiques, tantôt dépaysantes par cette utilisation d’un ukulélé ou du bottleneck façon slide guitar hawaïenne en plus ambient et noyée d’effets qu’on lui connaît (Their Voice Struck The Black Sunlit River Like Subterranean Lightning, A Sacred Infusion Of Slow Motion Lightening), tantôt déglinguées comme sur The Dark Notes Were Everywhere, So Dark, So Sombre, They Broke Into A Fountain (ouf !), évoquant davantage des albums tels que Distant Songs Of Madmen ou New Guitar Old Hat Knew Blues et leur blues primitiviste mâtiné de cut-up et d’impros hallucinées.

Enregistré en Espagne dans une chaleur étouffante à l’été 2023 sous l’influence des récits de deux auteurs de fiction caribéens, Wilson Harris et Edgar Mittelholze, qui lui ont inspiré ces titres de morceaux pour le moins littéraires et leur vibe sombre, opaque et psyché, l’album - dont l’artwork en évoque quelques autres du côté de ses sorties pour le label australien de Lawrence English, de Fratello Mare à Oceans Of Milk And Treacle - véhicule assurément cette sensation de moiteur propre aux errements de la conscience, et se double cette fois d’une dimension presque inquiétante. Les percussions insidieuses de Heartland ou celles, plus dynamiques voire tribales de My Bones And My Flute contribuent ainsi, de la même manière que les grouillements drogués de The Groan That Sometimes Splashed Out Of A Bucket Of Sound ou The Spider Of Dawn Had Appended And The Moon Had Far Descended, à instaurer une intrigante mystique aux confins du rêve éveillé et du trip sous psychotropes, qui culmine avec le très évocateur et transcendantal There Was A Deep Silence, Far Away The Baboons Were Howling For Rain.

Fameux, comme toujours avec ce musicien qui n’en finit plus de partir à l’aventure en dépit du poids des années.