Sur le papier, on attendait beaucoup de ce nouvel opus de la bande à Yoni Wolf, première sortie de son label Waterlines (dénommé d’après un morceau de l’album Mumps, Etc. de 2012) qui entend prendre la suite du défunt Anticon toutes proportions gardées : le compère d’Hymie’s Basement (et âme de Fog) Andrew Broder en coproducteur, des arrangements de cordes, des vocalistes à n’en plus finir pour assurer les choeurs et un featuring de Serengeti. Et puis... non. En essayant avec autant d’application que d’acharnement d’être à la pop folky, bucolique, vibrante, capiteuse même (ces cordes à la Andrew Bird un brin envahissants sur Marigold) ce qu’Alopecia en 2008 était à son versant crépusculaire et habité, The Well I Fell Into met les pieds dans le plat d’une tentation grandissante pour un songwriting chiadé au lyrisme rassembleur qui ne sied guère à ce projet à l’ADN résolument bancal et bricolé, cf. ce que l’on disait déjà du décevant AOKOHIO il y a 5 ans.

Plus aucune folie ni inventivité chez Why ?, troquées ici contre une joliesse parfois à la limite du lénifiant (G-dzillah G’dolah), tout au plus le recyclage de quelques gimmicks éculés (l’introduction maximaliste des refrains de Brand New ou le spoken word pitché de When We Do The Dance par exemple). Ça fait mal de le dire, mais on pense parfois au piano/voix d’Elton John et consorts (Jump, que sa production pseudo-électro indigeste ne fait finalement qu’enfoncer un peu plus) ou à un mauvais ersatz des derniers The National (Atreyu), c’est dire si le groupe n’a plus rien du Why ? que l’on a tant aimé, même pas celui du susnommé Mumps, Etc. qui laissait augurer bien plus de subtilité dans ce virage pop. Quant au versant Van Morrison slash The Band que les Américains semblent vouloir embrasser sur une grande partie de l’album, même lorsqu’il tire sur le jazz et un peu plus de liberté dans les arrangements - mais à peine - à l’image de Later at The Loon, on reste surtout sur l’impression d’un dérivatif ni fait ni à faire, la palme à l’impersonnel Nis(s)an Dreams, Pt. 1 avec ses choeurs sirupeux, qui aurait tout aussi bien pu être enregistré par n’importe lequel de ces copycats country/folk/pop 60s dont la première moitié des années 2010 regorgeait, ou pire encore à l’affreusement sacchariné The Letters, Etc.

Reste le tribal Sin Imperial, probablement le morceau du disque où l’on le sent le plus la patte Broder, tant pour les drums que pour les basses d’ailleurs, évocatrices du fabuleux For Good de Fog : la plus belle preuve, finalement, d’une occasion manquée, celle d’embrasser les télescopages d’une pop véritablement moderne, entre élans des arpeggiators électroniques, breaks baroques, textures expérimentales et refrains désarmants de romantisme assumé, ce dont on sait pourtant l’auteur du génial Elephant Eyelash absolument capable. Un coup pour rien... en espérant que ce ne soit pas tout simplement la fin des haricots.