Le streaming du jour #1674 : Antibalas - ’Where the Gods are in Peace’
Drôle de trajectoire que celle d’Antibalas, collectif brooklynite du saxophoniste Martin Perna partageant un certain nombre d’instrumentistes avec les Dap-Kings de leur ex guitariste et ingé son Gabriel Roth, fondateur du label Daptone qui héberge désormais le groupe après un passage par Ninja Tune à leurs débuts. Au contraire d’une certaine logique d’évolution qui voudrait qu’une formation s’éloigne de ses racines pour les ouvrir à davantage de métissage, les New-Yorkais n’ont en effet cessé depuis leur mélangeur Security de 2007, quatrième et meilleur opus, de laisser régresser ces hybridations de l’époque qui les voyaient flirter avec l’abstract hip-hop (Beaten Metal), le dub (Sanctuary), le psychédélisme éthio-funk (Hilo) et des constructions post-jazz libertaires ou méditatives à la Tortoise (I.C.E. et Age respectivement), sous la houlette de producteur du batteur de ces derniers, John McEntire.
Leur éponyme de 2012, première sortie estampillée Daptone, sonnait ainsi comme un retour à l’afrobeat nigérian canal historique, chœurs et chant africanisants, fanfare de cuivres et percus syncopées en avant, avec seulement quelques claviers pour fureter du côté éthiopien de la force et déjouer l’influence écrasante des orchestres hautement politisés de Fela Kuti et de ses héritiers. Avec son omniprésente critique de l’argent qui régit le monde, et la place centrale des rythmiques tribales et du chant et prêches spoken work de Duke Amayo soutenus par des chœurs féminins typiques du genre, Where the Gods are in Peace continue sur cette lancée avec autant d’efficacité que d’incandescence et d’authenticité, loin des facilités des néo-soulmen parfois trop lisses de Daptone, Lee Fields et feu Sharon Jones en tête.
A défaut d’un Hook & Crook trop classique, on saluera ainsi les 10 minutes épiques du bien-nommé Gold Rush ou la construction en trois parties, allant crescendo dans l’intensité de la section rythmique, d’un Tombstown chamanique et baroque aux étranges flûtes et incantations de sorciers, mais non sans regretter l’audace qui aurait pu, il y a 10 ans, mener le groupe sur une voie similaire à celle des géniaux Heliocentrics, rénovateurs désormais inégalés de l’ethno-jazz :
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