Impossible d’apporter une quelconque aide à une ville endeuillée comme l’est Manchester en ce jour. Aussi relatif qu’anecdotique et probablement inutile, nous proposons néanmoins un coup de projecteur sur l’un des plus prolifiques artistes basés sur les bords de l’Irwell.

Il n’est pas aisé de continuer à dénombrer les sorties de Brin Coleman. Non content d’avoir proposé une soixantaine de longs formats en tant que Bing Satellites, celui-ci officie également sous les pseudonymes de Ghost Harmonics, Blocker, The Ambient Visitor ou The Lovely Moon.

Débutons par le mémorable Extensions of Reality dévoilé en fin d’année dernière par Bing Satellites et qui constituait une formidable porte d’entrée vers un univers à la fois stellaire et ambient. Sur ce disque, les déstructurations électroniques granuleuses se lovent dans des nappes synthétiques étirées, le temps semble suspendu et, les cavalcades en moins, quelques chuchotements déformés convoquent même le 100th Window de Massive Attack (A Dream Within A Dream).

Sur ces trois titres oscillant entre le quart d’heure et la vingtaine de minutes, le Mancunien déploie des ambiances atmosphériques rendant ouvertement hommage au Music For Airports de Brian Eno. Loin de singer ce dernier, Bing Satellites s’inspire de cette approche basée sur des boucles de guitares élégiaques pour amener l’ensemble ailleurs, vers une autre terre défrichée de tout antagonisme antérieur. Une image qui prend un sens particulier en ce jour.

Impossible de s’attarder sur chacune des sorties de l’Anglais puisqu’il en est déjà à quatre longs-formats en ce début d’année 2017. Toutefois, il paraît aussi peu évident, lorsque l’on s’est arrêté sérieusement dessus, de passer sous silence la qualité et la profondeur d’une oeuvre telle que Music From Mission Control Or Something où, sur quatre-vingt minutes, le Britannique expérimente, déconstruit et fait résonner des sons qui semblent venir de l’espace.

"J’ai besoin d’un lieu où je n’ai qu’à appuyer sur la touche ’Record’ et commencer à improviser des sons" précise Brin Coleman qui s’est inspiré pour l’occasion d’une petite chambre mancunienne qu’il a pris le temps, au fil des années, de perfectionner jusqu’à la transformer en potentiel studio d’enregistrement.

Sur Music From Mission Control Or Something, les field recordings captés en Californie en décembre 2016 répondent à des improvisations organiques hantées par les réverbérations produites en février 2017 dans ce fameux studio mancunien. Entre ambient minimaliste, drones éthérés (l’odyssée de trois quarts d’heure que constitue Kindness of Heart, Warmth of Spirit) et une chill-out méditative (Hidden Shallows), Bing Satellites laisse bien plus de choses au hasard - la démarche restant improvisée - qu’il n’y parait au regard de la complexité et de la sincérité de ce contenu essentiel qui permet de prendre du recul avec une actualité autrement plus lourde.