Au regard du fabuleux Ensemble, album du mois dernier pour l’équipe d’IRM et les votants du FIR, on se devait de revenir sur ce Non-Fiction aux antipodes du lyrisme ethno-folk luxuriant de cette dernière sortie ouvertement phagocytée par les voltes humanistes et primales de William Ryan Fritch aka Vieo Abiungo, entre BO de film imaginaire et communion spirituelle dans les steppes d’Asie.

Projet, à l’origine, du seul Jon Mueller, Death Blues renouait en effet à la fin du printemps, sur le label Sige Records des Mamiffer Faith Coloccia et Aaron Turner, avec le minimalisme rythmique et hypnotique de l’éponyme de 2012, premier opus dont les incantations bluesy arboraient une dimension mystique nettement plus rugueuse et répétitive. Épaulé par la paire Ken Palme et Jim Warchol dont les guitares acoustiques se transforment en véritables instruments à percussion, l’Américain nous offre ici deux longues pistes de transe polyphonique nettement plus distanciées voire abstraites, dont les vocalises en miroir, rythmiques tribales et autres riffs marteau-pilon nous mettent dans un état second, envoûtés et malmenés dans un même mouvement sans fin dont le souffle continu de boucle instrumentales anguleuses et itératives convoque les expérimentations dadaïstes du krautrock des origines - les babillages de Do faisant notamment penser aux débuts du groupe Faust.

Autant dire que si l’aspect lo-fi demeure plus ou moins une constante dans le projet, ceux qui avaient jugé les travaux solo du batteur de feu Pele, Volcano Choir et Collections of Colonies of Bees sur la foi des désarmants maelstroms orchestraux d’Ensemble risquent fort d’être déroutés, aucun arrangement soyeux pas plus qu’aucun chœur extatique ne venant adoucir ces longs jams entêtants aux crescendos martelés jusqu’à la nausée, pour un résultat impressionnant mais réservé aux oreilles aguerries.