Flûtiste reconnue qu’on avait pu croiser au côté d’Orla Wren, Konntinent ou The Owl Service, Katie English est également passée maître dans la pratique du gamelan et de dulcimers fabriqués par ses soins. De formation classique, la Londonienne, moitié de Littlebow (projet auquel participe également aux percussions l’excellent Jérôme Tcherneyan de Piano Magic), a depuis longtemps dépassé cet académisme, mettant son talent d’instrumentiste au service de compositions électro-acoustiques largement improvisées qu’elle enregistre sous le pseudo d’Isnaj Dui. On lui doit à ce jour une demi-douzaine de sorties sur son propre label FBox Records, ainsi que quelques autres chez Home Normal ou Smallfish, et certains chanceux ont eu l’occasion de la voir partager la scène avec Library Tapes, Nils Frahm ou Simon Scott... excusez du peu.

Abstracts on Solitude, sa troisième sortie chez Hibernate après les EPs Protective Displacement et Something More (en collaboration avec l’Anglais Hybernation) respectivement parus en 2010 en 2011 via le sous-label Rural Colours destiné aux éditions en libre téléchargement, devrait surprendre plus d’un non-initié par sa palette sonique particulièrement irréductible voire ambivalente. La musicienne explore en effet sur ces six titres des univers a priori antinomiques, traçant des ponts discrets entre musique de chambre pastorale (Edit et Nature Of Light, pièces lumineuses à la flûte solo), austérité post-classique (The Last Will Become A Darker Grey), glitch futuriste (What Lies Inside, composé en réponse à une crise de panique) et drone ancestral (Quarter Wave, puis Peripheral Motion où les cordes d’un dulcimer lancinant et les percussions d’un gamelan narcotique se taillent la part du lion) pour accoucher d’un disque paradoxalement cohérent et finalement tout aussi immersif qu’intrigant.

Tandis que l’on peut déjà écouter sur Bandcamp de larges extraits de Duodecim, pour lequel les souscriptions sont encore possibles avec une sortie prévue en août également chez Hibernate, on se dit que d’atmosphères lynchiennes en rêveries bucoliques, la musique d’Isnaj Dui n’a sûrement pas fini de marquer notre année.