Partagé entre la réappropriation en cinémascope d’un folkore africain mélancolique et lancinant, et la tentation d’un néo-classique inquiétant dont les cordes subtilement dissonantes ne vont pas sans rappeler la claustrophobie aride des récents travaux orchestraux de Jonny Greenwood (notamment sur les BO de There Will Be Blood ou Norwegian Wood ), ce premier enregistrement sous le pseudonyme de Vieo Abiungo permet au multi-instrumentiste William Ryan Fritch de s’exprimer à nouveau en toute liberté, après s’être malheureusement vu relégué au second plan sur le dernier opus plus ouvertement hip-hop de Sole & The Skyrider Band.

Ceux qui avaient déjà eu l’occasion d’apprécier le lyrisme doux-amer de son Music For Honey And Bile d’inspiration plus nord-américaine sorti l’an dernier chez Asthmatic Kitty ne seront pas totalement dépaysés par l’univers élégiaque de cet And The World Is Still Yawning particulièrement ambivalent et métissé, qui nous offre le luxe de s’accompagner en édition limitée d’un second CD de remixes. Soit près de 80 minutes inédites laissant place aux visions de Benoît Pioulard, Nils Frahm également chargé du mastering de l’objet (et dont le nouvel opus Felt sort dans un mois chez Erased Tapes, extraits à l’appui), l’ancienne violoncelliste du Kronos Quartet Joan Jeanrenaud ou encore du génial Field Rotation omniprésent cette année pour le plus grand bonheur des amateurs de drone-ambient orchestral et monumental, en solitaire comme au fil des compilations, collaborations et autres réinterprétations.