The K. - Burning Pattern Etiquette
The K. laisse tomber le pugilat systématique et montre ses idées noires.
1. Intrusive Behavior
2. Flatter Me (Caress Me Too)
3. Prude
4. The Mermaid Of Venice
5. Sleeper Hold
6. 20″ Of Discipline
7. Priggish
8. Delusive Meaning
9. Bland Young Man
10. Pink Hiss
Burning Pattern Etiquette est le deuxième album de The K., trio belge porté sur le rock à tendance dure parsemé de mélodies accrocheuses. Sans cesse bringuebalés entre angles obtus et courbes plus policées, ces dix titres dessinent un relief bigarré mais toujours cohérent. C’est que le groupe possède un sens aigu du dosage qui l’empêche de tomber dans le trop-plein ou la surenchère. Pourtant les éléments casse-gueules ne manquent pas : le chant est parfois démonstratif, les lignes de synthétiseur, envahissantes et les mélodies, trop évidentes. Un exemple ? The Mermaid Of Venice. Le morceau pourrait être absolument navrant puisqu’il reprend exactement tous les éléments cités ci-avant. Pourtant, il ne l’est pas. Son côté outré-regardez-comme-on-souffre qui, de prime abord, fait craindre le pire est bien vite battu en brèche par les lignes de basse et les petits effets bienvenus qui inversent la tendance et en font un très chouette moment. En outre, à vouloir tout mettre dans sa mixture, on pouvait craindre la dilution des ingrédients. Or, empruntant au math-rock, au noise-rock, à l’indie-pop, au grunge, au garage et que sais-je encore, The K. réussit à rester percutant. C’est qu’il s’agit d’un trio et que sa musique a beau être particulièrement échantillonnée, elle ne l’est jamais au détriment de l’efficacité. Autrement dit, si tout ne brille pas par sa grande originalité, la dynamique et l’enthousiasme dont le groupe ne se dépare jamais ont tôt fait d’emporter le morceau. Et puis, The K. porte en lui un côté vraiment sombre qui inonde la moindre parcelle de Burning Pattern Etiquette. On sent bien que tout a été composé à la basse et que celle-ci est bien plus attirée par la nuit : c’est particulièrement évident sur Pink Hiss où le groupe laisse s’exprimer ses penchants gothiques et sépulcraux mais aussi ailleurs, Flatter Me (Caress Me Too), Prude et quelques autres où la part belle est réservée au glauque et à l’enfouissement. Enfin, si le point abréviatif acoquiné à son patronyme est sans doute là pour rappeler que le trio est né des cendres de The Kerbcrawlers en 2010, il montre surtout son penchant naturel pour la concision et la sécheresse.
On a déjà parlé de la basse énorme (Geoffrey Mornard) qui aime précipiter les morceaux dans les tréfonds mais la guitare est également importante. Sébastien von Landau s’y montre aussi inspiré qu’au micro. Tout aussi à l’aise dans la pulvérisation de l’obstacle que dans les vicissitudes de l’agonie, son vocabulaire est particulièrement plastique et sert parfaitement les morceaux. Il en va de même pour sa voix qui suit des méandres bigarrés allant du cri vocodérisé au murmure souffreteux. On début, on trouve qu’elle en fait trop mais on se rend bien vite compte qu’elle en fait au contraire juste assez. Sigfried Burroughs s’occupe de la batterie et des claviers, eux aussi participent à l’édification des ambiances en assénant ou en restant à distance, complètement impliqués, jamais en périphérie. Bref, ces trois-là se sont bien trouvés et leur cohésion bâtie au fur et à mesure des nombreux concerts qu’ils ont pu donner (plus de deux cents) est déterminante dans la belle tenue de Burning Pattern Etiquette. Ça joue sec et nerveux mais avec ce qu’il faut d’emphase et de fioritures pour empêcher les morceaux de tomber dans le tout-venant. Une affaire de dosage, encore une fois. Le précédent, My Flesh Reveals Millions Of Souls en 2012, était plus arraché et recroquevillé sur la bagarre. Trois années après - dont une occupée à la composition, l’enregistrement et la production - The K. a changé. Le propos s’est nuancé, réservant son lot d’enclaves plus introspectives qu’à l’accoutumée (Prude, Bland Young Man) tout en restant fondamentalement fiévreux. La musique s’est étoffée. Alors bien sûr, à marcher comme ça en permanence sur le fil, il arrive que le trio se casse la gueule (certains refrains moins inspirés, des moments où l’on voudrait que le groupe montre un peu plus les crocs) mais c’est assez rare et l’anecdotique est régulièrement tenu à distance.
Une nouvelle fois joliment illustré par Bill Van Cutten, Burning Pattern Etiquette est donc un excellent disque, tout à la fois varié et maîtrisé. Développant certaines facettes jusqu’ici cachées derrière les déflagrations, The K. montre un nouveau visage, moins bestial mais pas moins renfrogné et construit des morceaux tiraillés en permanence entre urgence et résignation.
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