Sans égaler tout à fait les charmes vintage du mélancolique Chandelier ou l’élégance kaléidoscopique du magique Lawson Graham, ce troisième opus pour l’écurie Fake Four du beatmaker canadien préféré de l’underground alt-rap ricain met immédiatement à l’aise : entre ses instrus lyriques aux beats épurés et sa cohorte d’habitués au micro (du sémillant Ceschi au nasillard Nomad, en passant par le fervent Gregory Pepper et le facétieux Kirby Dominant qu’il côtoie respectivement au sein de Common Grackle et Paranoid Castle), Woke Up Alone est taillé pour traîner un moment sur la table de chevet des amateurs de hip-hop de chambre poignant et racé.

C’est d’ailleurs dans le confort solitaire de son home studio que le producteur de Saskatoon a mixé ce nouvel opus, préservant jusqu’au bout en dépit de la fonction primordiale des collaborations (on retrouve également Open Mike Eagle, Onry Ozzborn ou Astronautalis au rang des invités, excusez du peu) l’essence introspective de cet album concept qui narre les mésaventures d’un homme en deuil tentant de ressusciter sa femme.

Foi surnaturelle et déni du réel se confondent jusqu’à l’accomplissement du douloureux processus d’acceptation (Give Up, adouci par le timbre de Greg Pepper qui incarne la conscience du narrateur), et Kirby Dominant à contre-emploi dans le rôle principal s’avère touchant comme jamais dans sa quête du dernier espoir qui le verra croiser la route d’une multitude d’hommes de science, de charlatans, du Diable en personne (Evil Ebeneezer, flegmatique à souhait) et même du fantôme de sa défunte épouse auquel Jean Boots prête sa voix capiteuse sur l’épique Don’t Give Up ou l’envoûtant Carry Over :