Le streaming du jour #636 : Primitive Man - ’Scorn’
Ça bouge en ce début d’année du côté du label rennais Throatruiner, garant de la vitalité des scènes hardcore et metal extrême sous nos horizons. Citons le post-hardcore massif et percutant des Suisses Cortez dont on reparlera certainement sous peu pour leur nouvel opus Phoebus d’ores et déjà en écoute intégrale à deux semaines de sa sortie, The Phantom Carriage et son "blackened hardcore" bipolaire tout aussi braillard et torturé, extrait à l’appui pour annoncer un second LP prévu pour fin février et illustré par l’excellent Romain Barbot (Saåad, I Am Sailor), ou encore Eiskalt, premier album de Vuyvr également venus de Suisse et bien décidés à en remontrer à l’école norvégienne en accélérant le tempo de leur black metal abrasif et vicié.
Néanmoins, c’est aujourd’hui aux Ricains de Primitive Man que l’on a choisi de s’intéresser, un trio basé à Denver, Colorado et emmené par Ethan McCarthy que les amateurs de fulgurances cathartiques connaissent peut-être pour le grind cradingue et sournois de ses formations Clinging To The Trees Of A Forest Fire et Death Of Self. Alors comme d’habitude il y aura bien un ou deux autoproclamés puristes du thrash et du malsain pour débiner ce prétendant au trône des enfers sorti de nulle part, trop ceci, pas assez cela, moins surprenant qu’untel et pas aussi morbide que le voisin, mais la démonstration justement, Primitive Man n’en a que faire, et à l’image du clip de Rags qui s’acharne sur votre rétine jusqu’à la crise d’épilepsie, Scorn n’est là que pour élimer vos neurones couche par couche à coups de dissonances larsenisantes, de grunt crépusculaire et autres saillies sludge (voire punk) ensevelies sous les traînes saturées, lentement, inlassablement, implacablement, jusqu’à ce que la voie soit libre pour déverser son nuoc-mâm directement sur votre cerveau reptilien.
Et pour ce faire, deux conditions : il faut que l’auditeur soit muni de l’organe en question, donc exit les riffs bien gras et autres martèlements binaires pour excités du double kick, et qu’il soit suffisamment captivé pour poursuivre l’écoute jusqu’au moment où il n’aura plus assez de matière grise pour décider du contraire. Et c’est là qu’entre en jeu l’ingrédient principal du bouzin, cette progression dans les atmosphères, ou régression devrait-on dire tant la pesanteur et la froideur primales semblent s’accentuer morceau après morceau, jusque dans ces interludes dark ambient tout en drones poisseux et déliquescents ou en harmonies spectrales et glacées.
Sournois, disait-on, car on a beau sentir que sous les faux airs de doom/sluge intelligent à la Hydra Head l’intention est des plus basiques, on ne peut s’empêcher d’être curieux jusqu’à devoir subir, irrémédiablement abêtis, l’assaut final d’un dernier diptyque martial et tout aussi décérébré que nous à ce stade de l’écoute, même pas vraiment brutal mais juste assez pour nous donner le coup de grâce façon lobotomie frontale, sec et efficace.
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