Au plus profond d’une forêt de bambous, fouler aux pieds un jardin japonais, sec et forcément zen, aux arabesques délicates, en poussant des hurlements suraiguës accompagné d’une armée de druides en transe, frappant comme des possédés sur des percussions africaines, la pluie et le vent fouettant leurs visages inquiétants. C’est à peu de chose près l’impression que procure l’écoute d’un disque d’OOIOO.
Déjà, ce nom : imprononçable !
Et puis cette musique : on l’aura compris, indéfinissable !
Doit-on s’en étonner quand on sait qu’OOIOO compte Yoshimi P-We dans ses rangs ? Activiste infatigable de la scène alternative japonaise – un temps membre d’UFO or Die (avec à ses côtés un certain Yamatsuka Eye), elle est surtout batteuse (mais pas que) des azimutés et fabuleux Boredoms (où l’on retrouve, tiens donc, Eye), elle fait également partie de Free Kitten avec Kim Gordon, elle a même prêté son prénom à un album des Flaming Lips où elle combat de mystérieux robots roses – et même si son instrument de prédilection est la batterie, elle s’essaie également à la trompette, à la guitare, aux claviers et au chant. Tant d’éléments qu’elle met au service d’un quatuor exclusivement féminin qui emprunte autant aux musiques traditionnelles, qu’elles soient japonaises (ce chant suraiguë, parfois simples onomatopées) ou africaines (le goût des percussions hypnotiques et tribales), qu’à la noise, la pop, l’abstract et tellement d’autres choses encore.
Seulement voilà, depuis 2006, plus de nouvelles ! A peine un EP de remixes par Eye en 2007, justement intitulé OOEYEOO, puis plus rien. Pas de nouveau matériel sonore, plus de chants incantatoires polyrythmiques et expérimentaux dédiés aux éléments, plus de psychédélisme tribal ! Cet univers aussi épuisant que fascinant, aussi ardu qu’irrésistible manquait. Et c’est donc avec un certain plaisir que l’on apprend aujourd’hui qu’un nouvel album, Armonico Hewa, doit paraître en octobre chez Thrill Jockey. Peu d’informations le concernant, si ce n’est que l’on retrouvera, outre Yoshimi, le même line-up que sur Taïga - Kayan (guitare), Aya (basse) et Ai (batterie) - et que le titre de l’album, mélange d’espagnol et de swahili, signifie « air dans un état harmonieux ». Alors c’est sûr, leur nom est toujours aussi imprononçable, on se doute que leur musique sera, une nouvelle fois, indéfinissable mais quand même, il nous tarde de retrouver OOIOO : parfois intense, parfois délicieux, toujours intéressant.
Pour patienter, un extrait de Taïga, Umo, qui résume parfaitement ce qu’est OOIOO.