IRM Expr6ss #7 - Innocent But Guilty & NLC, Second Seasons, Anatoly Grinberg & Andreas Davids, LPF12, Bancal & Coppergear

Programme 100% electronica/IDM pour ce nouveau volet d’IRM Expr6ss, probablement le genre musical le plus délaissé des amateurs de musiques actuelles ces 10 dernières années, entre le déclin voire parfois la disparition de ses derniers labels historiques (restent notamment Hymen Records et n5MD, régulièrement mis en avant dans nos colonnes) et l’absence de publication digne de ce nom pour le défendre à l’exception d’une paire de blogs anglosaxons. Un genre que certains n’hésitent pas à qualifier d’éteint, ce qui est faire bien peu de cas de son foisonnement dans l’autoproduction, comme souvent le nouveau centre névralgique de ses franges les plus aventureuses et mélangeuses.




- Innocent But Guilty & Nouvelles Lectures Cosmopolites - Hopeful Mutants (Lotophagus Records/Foolish Records, 2/02)

Celui-là on le dorlote depuis le tout début d’année sans se décider à le chroniquer. Tellement appréciés en ces pages qu’on les appelle désormais par leurs initiales IBG et NLC, les deux musiciens français habitués du label Lotophagus ont une fois de plus uni leurs forces un an après l’excellent Dystopian Thoughts feat. Wolf City, troquant l’ambient/post-rock pour une veine électronique de féérie noire télescopant beats variés (dont certains lorgnent étonnamment sur le hip-hop à l’image d’Under the Carpet, Behind the Curtains), arrangements élégiaques et carillonnants, et nappes psyché presque mystiques, entre deux incursions aux sonorités plus électro-acoustiques (Celestial Target). Une petite merveille inclassable comme ils en ont le secret !



- Second Seasons - Density of Traction (Schematic, 27/07)

Suivant le chemin inverse d’un label Warp désormais vendu aux tendances indie tape-à-l’oeil et pseudo-expérimentales, la structure des "Autechre floridiens" Phoenecia continue encore et toujours son petit bonhomme de chemin dans l’underground IDM sans concession. On vous avait déjà touché un mot de Second Seasons il y a quelques mois pour le bien-nommé Immense Heaven, c’est son 3e album de l’année que le mystérieux New-Yorkais livrait fin juillet chez Schematic, un disque cette fois entièrement instrumental à l’onirisme déstructuré et aux beats savamment concassés, entre glitch et pur sound design mais avec un fort accent sur l’atmosphère (Speck Ascent, T !lt) et une improbable efficacité tant rythmique (E/C, Speck Sustained) qu’harmonique (j4 Shimmer, -ext-) en dépit de passages plus abscons aux intitulés idoines (cf. `,- ). Un projet décidément à surveiller de près.



- Anatoly Grinberg & Andreas Davids - inspired by a tragedy (Ant-Zen, 12/06)

Pas encore une année aussi chargée que 2023 pour le Russe Anatoly Grinberg aka Tokee et Massaith, hormis cet EP annonçant pour l’automne un nouveau long-format chez Mahorka, mais l’on n’en avait pas moins omis de chroniquer ce pourtant très beau inspired by a tragedy enregistré avec son collaborateur récurrent Andreas Davids, musicien allemand électro/indus apprécié notamment pour son projet XOTOX. Au programme de ce digne successeur de silence + noise, des rouleaux compresseurs rythmiques à la fois massifs et libertaires phagocytant dans un même élan saturé electronica, noise et power electronics, et des atmosphères aussi aériennes que délétères dont les architectures sonores d’une belle densité mettent en musique le récit imaginaire des survivants d’un crash retrouvés morts dans d’étranges circonstances...



- LPF12 - burn the world quietly (Autoproduction, 26/07)

Jamais absent bien longtemps de l’actualité, l’Allemand Sascha Lemon revient avec l’un de ces exercices qu’il maîtrise à la perfection, grand écart entre miniatures d’IDM stellaire aux velléités mélodiques et longues méditations ambient également adeptes des grands espaces stratosphériques. On passe ainsi sur burn the world quietly d’une cavalcade cybernétique de 3 minutes et demie (rearrange the wor(l)d) à un tick isolationniste distillant sur plus de 16 minutes spleen au clavier d’une lenteur consommée et nappes éthérées, ou d’un redundant Eno-esque aux 12 minutes d’harmonies vaporeuses et mystiques à un anarchy for the light hearted tout en beats syncopés et arpeggios lyriques plié en 4 fois moins de temps, les dernières pièces de 40 minutes à elles deux, rappelant les grandes heures de sa série Whiteout, constituant néanmoins le sommet de cette nouvelle livraison avec leurs tâtonnements à la bougie dans l’infini cosmique.



- Bancal - L’Eau Qui Dort (Martine Ravage Records, 26/04)

Anciennement Abruti (mais en tout bien tout honneur), Clément Decaudin devient Bancal mais reste sur le label lillois Martine Ravage, affilié au collectif d’artistes indépendants Machine Sauvage et actif depuis une demi-douzaine d’années. Dix titres où les synthés analogiques sont à la fête, enfin si l’on peut dire : des rêveries aux beats en général assez downtempo voire absents (les comptines La Benjamine et Benoitement, pas loin de l’excellent Melodium) mais qui s’emballent joliment à quelques occasions, en particulier avec Efilket chassant sur les terres de μ-Ziq, un Restart pas loin d’évoquer les circonvolutions cristallines de Plaid ou encore Paper avec ses accents de dubstep aérien. Une charmante découverte !



- Coppergear - Le Vide Intelligent (Lotophagus, 9/08)

On boucle la boucle sur Lotophagus et un musicien coutumier d’un autre label aussi productif que qualitatif, Musique Moléculaire. Sur ce nouvel opus, le Québécois Mathieu Lachance donne à l’image de sa pochette dans l’épure hypnotique, en quatre longs instrumentaux déroulant avec patience leur downtempo clair-obscur à fortes textures ajoutées, flirtant avec l’ambient-techno mais aussi le classical ambient pour ces arrangements amples et de toute beauté qui confèrent au Vide Intelligent une aura d’élégie contemporaine.