Jamais complètement différent mais jamais complètement le même, l’Américain Tenshun, que l’on accompagne avec assiduité dans ses collaborations régulières avec Bonzo, souvent des sommets d’abstract hip-hop cauchemardé à la lisière de la noise et du dark ambient, n’est pas des plus faciles à suivre en solo. On lui compte par exemple une quinzaine de sorties en 2023, et déjà 5 depuis le début de l’année - rien que ça.

Alors pourquoi cet Auditory Cortex a-t-il fini, plutôt qu’un autre, dans nos esgourdes déjà bien malmenées en la matière ? Eh bien déjà pour son titre et son artwork, laissant entendre que cette sortie-là en particulier, il fallait la prendre au sérieux, idem en constatant qu’il s’agissait d’une sortie physique (en K7 comme il se doit)... et la double intuition s’est avérée payante. Sur cette nouvelle collection d’instrus percutants et saturés, le beatmaker télescope en effet fort joliment drums bruts de décoffrage, plutôt uptempo jusqu’à flirter par moments avec le breakcore (cf. 9 Auditory Cortex), et mélodies distordues générées au synthé modulaire, plus stridentes, aux tonalités parfois presque acid (2 Auditory Cortex, 5 Auditory Cortex) lorsqu’elle n’évoquent pas le malaise dissonant d’une vieille bande originale horrifique gondolée par le temps (3 Auditory Cortex, 8 Auditory Cortex).

Du cristallin 1 Auditory Cortex aux petits faux-airs de Plaid au régressif 11 Auditory Cortex façon soundtrack de jeu vidéo sombre et décadent en passant par les quasi kosmische 6 Auditory Cortex et 7 Auditory Cortex avec leurs arpeggiators insidieux, l’album s’avère par ailleurs plus "varié" - du moins dans le cadre de son paradigme minimaliste - que ses intitulés pouvaient le laisser craindre, et finit par s’imposer comme l’un des sommets en solitaire - à notre connaissance en tout cas - de l’ex pensionnaire d’I Had An Accident Records.