Optiganally Yours - O.Y. In Hi-Fi
Drôle d’été, décidément. Cachant un nouvel album d’Optiganally Yours dans les plis de ses circonvolutions mercurielles. Et vous savez quoi ? Il est génial.
1. Theme from O.Y.nisqatsi
2. How Do You Feel ?
3. Whomever Watches You Sleep
4. Pirates And Monkeys
5. Hope In Your Eyes
6. Martin (midori2tree)
7. Lemons And Tacos
8. Too Close To The Sun
9. Night Shop
10. Prelude to O.Y.nisqatsi
11. O.Y.nisqatsi
12. Bionic Whale
13. This Heart
On ne s’attendait vraiment pas à retrouver Optiganally Yours. Pas de nouvelles depuis Optiganally Yours Presents : Exclusively Talentmaker ! qui nous ramène tout de même quelques dix-huit années en arrière. Qu’était-il advenu de l’art étrange et singulier de Pea Hix et Rob Crow consistant à extirper des bombinettes pop et sexy d’un parterre joliment ringard ? Pour rappel, chez Optiganally Yours, on aime annoncer la couleur. La pièce-maîtresse autour de laquelle tout s’articule se trouve être l’optigan, instrument bizarroïde commercialisé par Mattel à l’orée des ’70s. Fruit de l’accouplement d’un orgue avec un tourne-disque, le rejeton se montre tout à la fois moche et irascible : on y insère un « Optigan Program Disc » pré-enregistré selon l’ambiance recherchée - « Pop Piano Plus Guitar », « Latin Fever », « Songs of Praise », « Country Style Pak » et j’en passe - et on pianote sur le clavier de trois octaves comme un Charly Oleg primitif. Le hic, c’est qu’à la longue, l’Optigan Program Disc (en acétate) sonne comme un vieux phonographe au bout du rouleau (ça crachote, ça claque et ça chuinte) et qu’il est dangereux de varier le tempo sous peine de ne jamais le retrouver. Bref, s’appuyer sur un truc pareil est une véritable gageure. Mais Pea Hix et Rob Crow n’en ont cure, c’est même ce qu’ils recherchent, maladivement acquis à la cause de cet ancêtre du sampler qui n’obéit ni au doigt ni à l’œil. Cette fois-ci, le duo a pu s’amuser en utilisant des milliers de boucles archivées qui n’ont jamais été publiées sur les disques du programme Optigan originel. Comme ces enregistrements étaient des enregistrements de studio hi-fi, va pour O.Y. In Hi-Fi.
N’ayant rien perdu de son art du haiku musical où la créativité naît de la contrainte, Optiganally Yours reste fidèle à son credo et met sur pied un album tout à la fois kitsch et irrésistible. Pea Hix maîtrise l’optigan, Rob Crow, le songwriting grande classe qui s’empare de tout et n’a peur de rien (et surtout pas du ridicule) et jamais l’un ne s’efface au profit de l’autre. Même lors des moments les plus péraves et embarrassants - au hasard, les breaks d’accordéon grotesques de Lemons And Tacos - on reste magnétisé par la grande tenue de l’ensemble. On est en permanence à la limite du second degré mais Optiganally Yours se refuse pourtant à tomber dans les affres de l’ironie facile et les morceaux demeurent strictement authentiques, c’est bien pour cela qu’ils fonctionnent si bien. Ces deux-là ne se moquent jamais de leur musique, encore moins de son élément central, l’optigan, et s’emparent de cet environnement désuet pour exprimer avant tout ce qu’ils ont au plus profond. On rigole parfois certes, mais on est plus encore attentif à ce qu’il se passe, à ce que l’on reçoit. Les nappes imposantes qui ouvrent Theme From O.Y.nisqatsi posent tout à la fois le décor et s’en détachent. Il n’y a aura rien de plus grandiloquent dans le disque mais rien de moins saisissant non plus. D’ailleurs, par trois fois, on retrouve disséminé dans l’album ce « O.Y.nisqatsi » (après le thème viendra le prélude puis l’éponyme) probablement inspiré de la trilogie de Godfrey Reggio mise en musique par Philip Glass. Une trilogie dont la première occurrence ne devait pas porter de titre puisque « le langage n’est plus capable de décrire le monde dans lequel nous vivons » (alors que ses films le pouvaient) et qu’il a, pour des raisons légales, fini par nommer tout de même en s’appuyant sur la langue des Hopis qui n’existe qu’à l’oral (et qui n’a donc pas le bagage culturel propre à l’écrit).
De là à dire qu’Optiganally Yours peut se targuer d’être à même de décrire le monde, il y a un pas que l’on ne franchira pas bien que l’on en ait très envie. Après tout, les deux farceurs en imposent en s’appuyant sur de la pacotille, tirent une profondeur insoupçonnée d’une armada de sonorités légères et ce faisant, ouvrent grand leurs bras à la complexité : un bon résumé du bordel ambiant tout de même. En outre, ce morceau d’ouverture permet de bien comprendre le « hi-fi » du titre car jamais Optiganally Yours n’a si bien sonné. Juste après, How Do You Feel se montre plus sautillant, presque primesautier mais conserve néanmoins ce nouvel éclat sonore et il en sera de même jusqu’à la toute fin. Qu’ils s’appuient sur des éléments tropicalistes (Pirates And Monkeys, Bionic Whale), déterrent le pire du pire de la muzak (Martin (midori2tree)) ou en appellent au génie des alpages (Lemons And Tacos), les morceaux adoptent un grain très actuel alors qu’ils sont bâtis sur une technologie obsolète. On a même du mal à reconnaître l’optigan mais il ne fait pourtant aucun doute qu’il est bel et bien là tant O.Y. In Hi-Fi demeure étrange et mystérieux. Pour preuve, ces Whomever Watches You Sleep, Too Close To The Sun ou This Heart, pétris d’intentions contradictoires mais s’inscrivant immédiatement sous la peau. La palme sans doute pour le merveilleux Night Shop, meilleur morceau de Pinback depuis des lustres mais un Pinback qui aurait camouflé son habituelle amertume sous un vernis encore plus solaire et multicolore qu’à l’accoutumée. Rien à faire, on reste captif de cette poignée de morceaux mortels bien après que le dernier souffle de O.Y. In Hi-Fi s’est tu.
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